Dans le régime de communauté légale réduite aux acquêts, les époux peuvent chacun isolément passer un certain nombre d'actes et engager par ces actes les biens de la communauté. Il est pourtant des décisions dangereuses qu'un époux ne prendre seul : c'est notamment le cas d'un engagement de caution, qui, sans être un acte de disposition, peut avoir pour effet de payer la dette d'autrui et appauvrir considérablement le patrimoine de la caution. C'est la raison pour laquelle l'article 1415 du Code civil prévoit que « chacun des époux ne peut engager que ses biens propres et ses revenus, par un cautionnement ou un emprunt, à moins que ceux-ci n'aient été contractés avec le consentement exprès de l'autre conjoint qui, dans ce cas, n'engage pas ses biens propres ».
Autrement dit, un époux seul ne peut engager que ses revenus. Mais la jurisprudence exige que ces revenus soient identifiés et n'autorise pas le créancier à saisir un compte en banque susceptible de contenir aussi des revenus du conjoint (Arrêt de la 1re chambre civile de la Cour de cassation du 3 avril 2001).
De plus, l'époux seul ne peut engager la communauté. Or tous les biens acquis par les époux après leur mariage font partie de la communauté, et une difficulté se pose lorsque des économies sont réalisées en compte et que ce compte est alimenté par les revenus d'un seul époux. A partir de quel moment les revenus deviennent-ils acquêts de communauté ?
C'est précisément la question qui s'est posée aux juges de la Cour de cassation dans l'arrêt de la 1re chambre civile du 14 janvier 2003.
En l'espèce, un époux commun en bien s'était porté caution d'une société au profit d'une banque, sans l'accord de son épouse. A la suite de cet engagement de caution, la banque avait fait pratiquer une saisie attribution du compte chèque postal, du plan d'épargne logement et du compte titres ouverts au nom du mari. Les époux demandèrent alors la mainlevée de ces saisies au motif qu'elles avaient pour objet des biens communs, alors que le cautionnement avait été souscrit sans le consentement exprès du conjoint.
La question à résoudre était celle de savoir à partir de quel moment et selon quel critère, les revenus cessent d'être revenus pour devenir acquêts de communauté.
Pour la Cour de cassation, le compte de dépôt était saisissable car il n'était alimenté que par les revenus de l'époux débiteur, alors que le plan d'épargne et le compte titre devaient être considérés comme des acquêts de communauté et nécessitaient le consentement exprès de l'épouse pour être engagés.
[...] de mainlevée des saisies pratiquées sur le plan d'épargne logement et le compte titres ouvert au nom de M. X l'arrêt attaqué retient que les époux ne contestent pas que ces comptes sont alimentés par les seuls revenus du mari, caution ; que, dès lors, leur caractère de biens communs au sens de l'article 1401 du Code civil, ne s'oppose pas à ce qu'ils soient l'objet du droit de poursuite du créancier du mari ; Attendu qu'en se déterminant ainsi, alors que le plan d'épargne logement et le compte titres étaient des acquêts que le mari ne pouvait engager par un cautionnement contracté sans le consentement exprès de la femme, la cour d'appel a violé le texte susvisé ; PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE mais seulement en ce qu'il a rejeté la demande des époux X . [...]
[...] Les créanciers n'accepteront pas l'engagement d'un époux qui n'offre pour gage que des biens propres. Il est donc de l'intérêt même des époux de ne pas offrir à leurs créanciers un gage excessivement réduit. Cet arrêt du 14 janvier 2003 renforce l'appréciation critique de l'article 1415 du Code civil. Il conduit en effet à l'instauration d'une cogestion de fait pour les opérations importantes, car le refus de consentir aura pour conséquence la non-conclusion de l'acte par le tiers (le prêt ne sera pas accordé). [...]
[...] Il est pourtant des décisions dangereuses qu'un époux ne prendre seul : c'est notamment le cas d'un engagement de caution, qui, sans être un acte de disposition, peut avoir pour effet de payer la dette d'autrui et appauvrir considérablement le patrimoine de la caution. C'est la raison pour laquelle l'article 1415 du Code civil prévoit que chacun des époux ne peut engager que ses biens propres et ses revenus, par un cautionnement ou un emprunt, à moins que ceux-ci n'aient été contractés avec le consentement exprès de l'autre conjoint qui, dans ce cas, n'engage pas ses biens propres Autrement dit, un époux seul ne peut engager que ses revenus. [...]
[...] Cela signifie-t-il qu'un compte de dépôt, sur lequel sont versés les revenus de l'époux débiteur, est saisissable intégralement quel que soit le montant du solde créditeur ? Il semblerait raisonnable de considérer que celui-ci représente au moins pour partie, des économies constitutives d'acquêts et non de simples revenus au sens de l'article 1415 du Code civil. Dans cette décision, la Cour de cassation ne semble pas ici poser de limites à la règle de la saisissabilité du compte de dépôt. [...]
[...] Sur ce point, l'arrêt d'appel a été cassé, au motif que le compte titres et le Plan d'Epargne Logement étaient des acquêts que le mari ne pouvait pas engager par un cautionnement contracté sans le consentement de son épouse (article 1415 du Code civil). En ce qui concerne le compte titres, cette solution semble opportune, les titres correspondent à des acquisitions de biens nouveaux, financées en l'espèce avec les revenus du mari. Il s'agit donc d'acquêts au sens exact du terme. Le créancier ne peut donc se saisir de tels biens communs qui ne sont en rien des revenus. En revanche en ce qui concerne le plan d'épargne logement la solution peut prêter à discussion. [...]
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