Le droit de la famille semble se heurter à davantage d'incertitudes que la filiation elle-même. En effet, si la vérité biologique est implacable, il s'avère que les règles juridiques applicables à la filiation puissent rencontrer une divergence d'intérêts. Ainsi en est-il du cas où il existe un conflit de paternité c'est-à-dire un conflit entre deux pères probables. En effet, l'article 310-3 du Code civil dispose que la filiation se trouve par l'acte de naissance de l'enfant, par l'acte de reconnaissance et par l'acte de notoriété constatant la possession d'état. Il est alors possible que plusieurs personnes en même temps usent de ces facultés énumérées : l'un peut être lié à un enfant par la possession d'état et l'autre peut l'avoir reconnu.
Devant un tel conflit, la solution n'est pas toujours aisée. Ainsi en est-il d'un arrêt du 14 février 2006 de la Première Chambre Civile de la Cour de Cassation dans lequel un couple marié a un enfant, le mari se comportant aux yeux des tiers comme le père tout en ayant connaissance de l'existence de l'amant de sa femme qui a, antérieurement à la naissance, reconnu l'enfant. Le litige s'engage donc dans la recherche de la filiation à l'égard de l'un ou de l'autre. L'amant saisi la justice en vue de demander la contestation de la paternité à l'égard du mari et désira rétablir la vérité avec une demande d'expertise biologique.
Devant la Cour d'appel, la demande de l'amant fût rejetée au motif que l'action est irrecevable. Devant la Cour de Cassation il invoque l'absence d'une possession d'état continue, il a vécu une relation avec la mère, ainsi que le droit qui l'allègue à l'expertise biologique pour rétablir la vérité. La question est donc de savoir si en cas de conflit entre une possession d'état d'enfant légitime conforme au titre de naissance et une reconnaissance prénatale par un tiers il faut faire privilégier l'un ou l'autre de ces modes d'établissement de la filiation et donc de savoir si celui qui a reconnu l'enfant peut ou non bénéficier d'une action en contestation de paternité. En cas de conflit entre une reconnaissance par un tiers et une possession d'état à l'égard du mari, l'action en vue d'expertise biologique est-elle ouverte au profit du tiers qui a reconnu l'enfant?
La Cour de Cassation répond au conflit en avançant qu'en pareil cas primauté est donnée à la possession d'état, même lorsque la reconnaissance a eu lieu avant la naissance : en cela, l'arrêt précise le régime applicable à la solution du conflit (I), toutefois, cette solution s'avère aujourd'hui obsolète. La vérité biologique supplante désormais l'aspect sociologique établit par la possession d'état, ce qui a pour effet direct de limiter très sérieusement la portée de notre arrêt dans le temps (II) : la position de la Cour de Cassation ne peut qu'évoluer.
[...] Cette solution doit être analysée comme une volonté de sécuriser la filiation. On va donc éviter de chambouler l'apparente certitude de la filiation au nom de la vérité biologique. C'est d'ailleurs sur ce terrain que la portée de l'arrêt doit être analysée : la position de la cour remise en cause par l'ordonnance du 4 juillet 2005 semble limiter fortement la portée de l'arrêt du 14 février 2006 en ce qu'aujourd'hui, une place plus importante est accordée à la vérité biologique et donc à la pertinence de la demande d'expertise biologique. [...]
[...] Devant la Cour d'appel, la demande de l'amant fût rejetée au motif que l'action est irrecevable. Devant la Cour de Cassation il invoque l'absence d'une possession d'état continue, il a vécu une relation avec la mère, ainsi que le droit qui l'allègue à l'expertise biologique pour rétablir la vérité. La question est donc de savoir si en cas de conflit entre une possession d'état d'enfant légitime conforme au titre de naissance et une reconnaissance prénatale par un tiers il faut faire privilégier l'un ou l'autre de ces modes d'établissement de la filiation et donc de savoir si celui qui a reconnu l'enfant peut ou non bénéficier d'une action en contestation de paternité. [...]
[...] Aujourd'hui, la vérité sociologique est multiple, il n'est pas rare qu'un enfant ait plusieurs pères durant sa vie, la vérité biologique est, quant à elle, unique : un enfant n'a qu'un seul père de sang La recherche de la vérité biologique est donc une évidence. L'ordonnance du 4 juillet 2005 abrogeant l'article 322 du Code civil rompt avec l'ancienne règle qui voulait qu'on ne puisse contester un lien de filiation lorsque titre et possession d'état coïncidait. Aujourd'hui, la contestation de la filiation est possible en pareil cas dans le délai de cinq ans depuis la naissance ou la reconnaissance si elle est ultérieure (article 333 du Code civil). [...]
[...] Première Chambre Civile de la Cour de Cassation février 2006 Le droit de la famille semble se heurter à davantage d'incertitudes que la filiation elle-même. En effet, si la vérité biologique est implacable, il s'avère que les règles juridiques applicables à la filiation puissent rencontrer une divergence d'intérêts. Ainsi en est-il du cas où il existe un conflit de paternité c'est-à-dire un conflit entre deux pères probables. En effet, l'article 310-3 du Code civil dispose que la filiation se trouve par l'acte de naissance de l'enfant, par l'acte de reconnaissance et par l'acte de notoriété constatant la possession d'état. [...]
[...] Ce tiers ne pourra demander une expertise biologique et le moment de la reconnaissance, avant ou après la naissance, devient un élément indifférent. La constitution d'une possession d'état devient donc un moyen efficace pour un couple de faire échec à la reconnaissance prénatale de l'enfant par un tiers. Et cette solution se justifie d'autant plus que peu importe le moment de la reconnaissance, celui-ci n'a que peu d'intérêt pour renseigner le juge sur la possible paternité de celui qui reconnaît. [...]
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