« La liberté d'aimer n'est pas moins sacrée que la liberté de penser. Ce qu'on appelle aujourd'hui l'adultère est identique à ce qu'on appelait autrefois l'hérésie » disait Victor Hugo. En effet, il est flagrant que l'évolution des mœurs a contribué à l'évolution de la conception juridique de la notion d'adultère.
En l'espèce, un constat d'adultère est établi le 29 novembre 1989 entre Mr Pierre Schmit et Mme Bensard, sa maitresse. L'épouse de l'amant, qui reproche à Mme Bensard d'avoir « détourné son mari de son foyer » et de lui avoir causé personnellement un préjudice moral en poursuivant publiquement cette relation, forme alors une demande en dommages et intérêts assortie d'une demande de publication du jugement dans deux journaux à l'encontre de Mme Bensard. Toutefois l'épouse est déboutée de sa demande en première instance, puis par la cour d'appel de Grenoble qui considère dans un arrêt en date du 11 septembre 1995 que si la relation extraconjugale est avérée, Mme Bensard n'est pas la cause de la rupture du couple Schmit. De plus la cour d'appel condamne la plaignante à verser des dommages et intérêts à Mme Bensard et à une amende civile pour procédure abusive. Mme Schmit forme alors un pourvoi en cassation.
[...] Mme Schmit forme alors un pourvoi en cassation au motif que les agissements de Mme Bensard sont constitutifs d'une faute au sens de l'article 1382 en raison de sa connaissance de la relation légitime qu'il existait entre les époux Schmit et des conséquences prévisibles sur leur union. De plus elle reproche à l'arrêt de la cour d'appel de l'avoir condamnée à des dommages et intérêts ainsi qu'à une amende civile en raison du caractère abusif de son action en justice et de son recours en appel alors même qu'aucun fait fautif ne lui a été imputé. Nous écarterons cependant ce dernier point des débats ultérieurs étant donné son intérêt limité concernant l'adultère et ses rapports aux tiers. [...]
[...] Pour autant peut-on considérer que l'évolution de la notion d'adultère témoigne du déclin du devoir de fidélité au sein du mariage ? L'évolution de la notion d'adultère et ses conséquences vis-à-vis des tiers entraine l'apparition d' une conception stricte de la faute du tiers I. L'évolution de la notion d'adultère et ses conséquences vis-à-vis des tiers Le déclin progressif du devoir de fidélité au sein du mariage ainsi que l'évolution des mœurs ont contribué à faire aujourd'hui de l'adultère, un fait insuffisant à engager la responsabilité d'un tiers Un déclin progressif du devoir de fidélité au sein du mariage Le devoir de fidélité au sein du mariage est consacré par l'article 212 du Code civil : les époux se doivent mutuellement fidélité cependant ce principe classique, prolongement du principe de monogamie semble connaitre un essoufflement dû à l'évolution des mœurs. [...]
[...] Concernant les tiers au contrat de mariage la vision classique semblait admettre que l'adultère puisse engager la responsabilité délictuelle du complice de l'époux infidèle : l'époux trompé pouvant demander des dommages et intérêts aux deux personnes qui ont concouru à son offense en se fondant sur l'article 1382 du Code Civil comme le montre un arrêt de la Cour d'appel de Paris datant du 25 mars 1955 : La faute civile que constitue [ ] l'adultère d'un époux permet à son conjoint de réclamer réparation au tiers qui a [ ] coopéré à l'adultère et ce même en l'absence d'intention dolosive caractérisée. L'arrêt de la Cour de cassation en date du 4 mai 2000 opère sur ce point un revirement de jurisprudence en soutenant que l'adultère à lui seul n'est plus un fait susceptible d'engager la responsabilité d'un tiers. L'adultère, un fait insuffisant à engager la responsabilité d'un tiers La mise en œuvre de l'article 1382 du Code civil nécessite une faute, un préjudice et un lien de causalité. [...]
[...] C'est donc sur le terrain de la faute du tiers que l'arrêt du 4 mai 2000 innove, en imposant une vision plus contemporaine de l'adultère : lorsque l'adultère est reproché non à l'époux mais à l'amant, la faute civile est admise restrictivement. Un arrêt du 20 juin 1980 rendu par le TGI de Dunkerque montre le chemin parcouru : l'adultère constitue un délit civil non seulement pour celui qui le commet mais pour son complice : Dès lors l'époux trompé peut obtenir des dommages et intérêts non seulement de son conjoint mais de celui qui le seconde dans la violation de la foi conjugale et concourt à l'offense. [...]
[...] Une conception stricte de la faute du tiers L'apparition de conditions nécessaires à la reconnaissance de la faute du tiers (A') ainsi que l'introduction de la notion d'imputabilité aux tiers (B') semble montrer la volonté du législateur d'aller dans le sens d'une conception stricte de la faute du tiers concernant l'adultère. L'apparition de conditions nécessaires à la reconnaissance de la faute du tiers Désormais pour considérer l'adultère comme une faute civile permettant d'engager la responsabilité de son auteur, tiers au contrat de mariage, il est nécessaire que cet acte remplisse un certain nombre de conditions. La cour de cassation approuve les conditions posées par la Cour d'appel de Grenoble à savoir la connaissance de l'union légitime du partenaire ainsi que des dommages que peut causer l'adultère à cette union. [...]
Bibliographie, normes APA
Citez le doc consultéLecture en ligne
et sans publicité !Contenu vérifié
par notre comité de lecture