Ces deux arrêts rendus, l'un par la chambre criminelle de la cour de cassation le 29 octobre 2002 et l'autre par la deuxième chambre civile le 6 juin 2002, illustrent l'évolution récente du droit de la responsabilité du fait d'autrui lorsque le dommage a été causé par le fait d'enfants mineurs. Dans la première affaire (Cass., crim., 29 octobre 2002), un enfant confié à sa mère à un centre de vacances géré par une association s'était rendu coupable de vols et de violences.
Dans la deuxième affaire, rendue quelques mois plus tôt (cass., civ 2, 6 juin 2002), l'enfant qui a commis les délits avait été confié à une association de protection de l'enfance par la décision d'un juge des enfants lui transférant la garde. Les faits se sont produits alors que l'enfant était en visite ponctuelle chez sa mère, et cette dernière a été considérée civilement responsable des agissements de son enfant.
Il semble désormais que la notion d'autorité parentale a supplanté la notion de garde dans l'attribution de la responsabilité du fait des enfants mineurs, mais c'est la garde juridique qui prévaut pour l'éventuelle exonération des parents.
[...] Dès lors, en choisissant d'utiliser l'expression autorité parentale le législateur lève toute ambiguïté et fige la jurisprudence de la cour de cassation. En effet, l'expression autorité parentale a un contenu juridique uniforme : elle s'exerce de plein droit par les parents auxquels elle est indissociablement attachée. Dès lors, son transfert par contrat est impossible et seule une décision de justice peut la transférer. Au point que, dans l'arrêt du 6 juin 2002, lorsque cette dernière a été transférée par une décision de justice, même un séjour ponctuel chez l'un des parents ne fait pas peser la responsabilité sur les parents. [...]
[...] Le législateur, par la loi du 4 mars 2002, a remplacé l'expression garde par autorité parentale tirant les conséquences de l'évolution jurisprudentielle. La notion d'autorité parentale : vers une abstraction de la garde En opérant un changement de vocabulaire, le législateur a affirmé son intention de suivre les évolutions de la jurisprudence de la cour de cassation. En effet, le mot garde peut laisser apparaître une certaine ambiguïté. Faut-il entendre garde au sens de droit de garde général conféré par la filiation ? [...]
[...] C'est d'ailleurs sur ce fondement que, dans sa décision du 29 octobre 2002, la cour de cassation maintient la responsabilité des parents qui avaient confié leur enfant à un centre de vacances. Mais une interprétation stricte de cet alinéa ne permettait d'exonérer les parents qu'en cas de force majeure et de faute de la victime. C'est alors que, par une création prétorienne, la cour de cassation a décidé de reconnaître un contenu normatif à l'alinéa 1 pour en dégager une théorie générale de la responsabilité pour autre : on est responsable ( ) du dommage ( ) par le fait des personnes dont on doit répondre Dès lors, il devient possible, lorsqu'à titre principal, la garde a été transférée par une décision de justice d'en transférer les accessoires, dont la responsabilité. [...]
[...] Ce nouvel état du droit résulte d'une création prétorienne de la cour de cassation qui fait une nouvelle interprétation des rapports entre l'alinéa 4 et l'alinéa 1 de l'article 1384 du code civil. Une interprétation extensive de l'article 1384 du code civil Traditionnellement, l'alinéa 1 était considéré comme n'ayant pas de véritable contenu normatif. Il ne faisait qu'introduire les alinéas suivants. Dès lors, seul l'alinéa 4 semblait pouvoir s'appliquer s'agissant de la responsabilité des parents du fait de leurs enfants mineurs. [...]
[...] Les faits se sont produits alors que l'enfant était en visite ponctuelle chez sa mère, et cette dernière a été considérée civilement responsable des agissements de son enfant. Saisie d'un pourvoi formé par la mère, la deuxième chambre civile casse l'arrêt d'appel au visa de l'article 1384 alinéa 1 estimant que la garde de l'enfant relevait de l'association, car aucune décision judiciaire n'était intervenue pour la rendre à sa mère. Ces deux arrêts qui illustrent l'évolution de l'interprétation que fait la cour de cassation de l'article 1384, s'inscrivent dans le prolongement des jurisprudences Blieck de 1991 et Bertrand de 1997. [...]
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