La pratique des mères porteuses, pratique également nommée « gestation pour autrui », a longtemps posé problème en France, avant les lois de bioéthique de 1994 et l'insertion de l'article 16-7 dans le Code civil l'interdisant expressément, car les avancées de la science le permettaient et que cette pratique était déjà légalisée dans les autres pays.
C'est pourquoi l'arrêt du 31 mai 1991 était particulièrement délicat : par une convention, une femme s'était engagée à donner au couple de M. Y et Mme X l'enfant qu'elle mettrait au monde suite à son insémination artificielle, réalisée grâce au sperme de M. Y. A sa naissance, l'enfant a été affilié à M. X, sans indication de la filiation maternelle, et le couple a demandé l'adoption plénière de l'enfant.
Dès lors, la question était de savoir si, en l'absence de lois l'interdisant et en l'état de la science, une convention de mère porteuse à titre gratuit peut être annulable comme portant atteinte à l'ordre public et aux bonnes mœurs, révoquant l'adoption en découlant.
[...] Ce premier attendu montre clairement la position des juges de cassation : la convention de gestation pour autrui est tout à fait illicite de par son objet, car le corps humain n'est pas un bien pouvant être commercialisé Il est donc impensable pour la Cour de cassation de stipuler des contrats ayant pour objet une personne humaine, et cette réaffirmation de l'indisponibilité du corps humain sera suivie par d'autres décisions on peut notamment citer la décision du Conseil d'Etat en assemblée du 27/10/1995 Morsang-sur-Orge, condamnant l'attraction dans une boîte de nuit du lancer de nain portant atteinte à la dignité humaine. La Cour de cassation se sert de ces arguments pour justifier sa décision d'annuler l'arrêt rendu par la cour d'appel. [...]
[...] C'est pourquoi la cour d'appel a retenu que en l'état actuel des mœurs, la méthode de la maternité substituée doit être considérée comme licite et non contraire à l'ordre public Cela signifie que si cette pratique n'était pas officiellement autorisée, il existait clairement des hésitations quant à sa licéité, sans quoi il n'y aurait pas eu litige. Il était donc important que la Cour de cassation vienne préciser ce qu'il était réellement de la question. L'autre élément pesé dans la décision de la cour d'appel est bien sûr également les avancées scientifiques et l'état des mœurs en 1991. [...]
[...] Malgré les arguments avancés par la cour d'appel, la cassation est ici bien justifiée. A Un objet illicite Une convention dont l'objet serait illicite est nulle. Aucun texte n'interdisant la maternité de substitution, il revenait aux juges de cassation de démontrer malgré tout le caractère illicite de l'objet. L'autorité de l'article 1128 du Code civil Les articles 1126 à 1130 du Code civil règlementent l'objet des conventions, et l'article 1128 dispose Il n'y a que les choses qui sont dans le commerce qui puissent être l'objet de conventions. [...]
[...] Y est de toute façon le père biologique. C'est pourquoi la cour d'appel a pu dire que cette adoption est conforme à l'intérêt de l'enfant, qui a été accueilli et élevé au foyer de M. et Mme Y pratiquement depuis sa naissance Il semble donc que les juges du fond ont tenté de faire abstraction du mode de conception de l'enfant, pour voir que depuis sa naissance, il a été dans les faits adopté par le couple Y et élevé par eux, et donc que son adoption plénière ne serait que l'officialisation d'une situation de fait, qui est dans son meilleur intérêt. [...]
[...] Plus grave : les juges de cassation considèrent que la cour d'appel, en statuant ainsi, a opéré un détournement de l'institution de l'adoption donc les règles sont fixées articles 353 et suivants du code. La Cour de cassation marque donc une position stricte quant à la pratique de la gestation pour autrui, la considérant clairement comme portant atteinte à des droits fondamentaux, malgré son passage progressif dans les mœurs Mais cette décision a vocation à être oubliée, car les lois de bioéthique seront bientôt révisées, et les sénateurs ont montré, depuis quelques années, un intérêt particulier pour les mères-porteuses ; il est donc possible que ces conventions soient bientôt permises, ce qui compliquera énormément le droit positif. [...]
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