Cour de cassation 2e chambre civile 29 avril 1994, arrêt du 29 avril 1994, article 242 du Code civil, mariage, divorce, procédures de divorce, cour d'appel, séparation des époux, séparation de fait, adultère, jurisprudence, procédure, loi du 18 mai 1816, loi du 27 juillet 1884, loi du 11 juillet 1975, loi du 23 mars 2019
L'arrêt soumis à notre réflexion, délivré par la deuxième chambre civile de la Cour de cassation le 29 avril 1994, concerne une requête pour divorce pour faute. En l'espèce, un homme et une femme se marient puis divorcent. Nous n'avons pas connaissance du jugement de première instance, mais on peut supposer que le tribunal de grande instance a prononcé un divorce aux torts de la femme. La femme aurait donc interjeté appel devant la cour d'appel de Toulouse en faisant constater l'adultère de son mari qui aurait eu lieu durant la procédure de divorce.
[...] La notion d'adultère a longtemps été perçue comme une faute majeure conduisant au divorce, il en est pour preuve que jusqu'en 1975 l'adultère était une cause péremptoire du divorce au même titre que la condamnation pénale. Cette cause péremptoire résultait d'une appréciation in abstracto de la faute. La seule constatation des faits entraînait la prononciation du divorce. L'adultère fut ainsi pendant très longtemps considéré comme étant une violation irrémédiable des devoirs et obligations du mariage et fut une cause péremptoire du divorce en tant qu'il était apprécié in abstracto par les juges du fond. [...]
[...] En l'espèce, la requérante invoque un divorce pour faute en démontrant un adultère de la part de son époux. Cette vision de la faute pour adultère, bien qu'inscrite à l'article 242 du Code civil, a évolué durant la deuxième moitié du 20e siècle. En effet, la décision de la Cour de cassation s'inscrit dans une volonté d'individualisation et les juges, en appréciant la faute commise, ne s'attardent plus uniquement sur la faute, mais aussi sur les circonstances. On est donc passé d'une appréciation in abstracto à une appréciation in concreto laissant plus de libertés aux individus. [...]
[...] L'opposabilité des devoirs et obligations du mariage jusqu'à la prononciation du divorce Au moyen de son pourvoi, la femme soutient que la cour d'appel n'a pas appliqué l'article 242 du Code civil. Il résulte ainsi de cet article que l'existence d'une séparation de fait entre deux époux, même imputable à la faute de l'un d'eux, ne confère pas aux époux encore dans les liens du mariage une immunité privant de leurs effets normaux les offenses dont ils peuvent se rendre coupables l'un envers l'autre. En d'autres termes, la femme estime qu'au terme de l'article 242 du Code civil, il n'est pas possible de déroger aux devoirs et obligations du mariage. [...]
[...] Dans un élan de déjudiciarisation du mariage et dans une sorte de désinstitutionnalisation du mariage, il est donc logique aujourd'hui de se demander s'il ne serait pas possible de supprimer tout simplement le divorce pour faute. Pour conclure, l'évolution du divorce qui fut supprimé avec la loi du 18 mai 1816, restauré avec la loi du 27 juillet 1884, élargi avec la loi du 11 juillet 1975 puis enfin déjudiciarisé et allégé avec successivement les lois du 26 mai 2004, la loi dite J 21 et la loi du 23 mars 2019, peut, dans le futur, amener à une suppression du divorce pour faute en accord avec l'évolution des mœurs et de la société qui se veut plus libérale envers la vie privée et la vie sexuelle des personnes. [...]
[...] La deuxième chambre civile de la Cour de cassation, dans son arrêt en date du 29 avril 1994, rejette le pourvoi formé par la femme au motif que son moyen n'est pas fondé. La haute juridiction a estimé que l'appréciation faite par les juges d'appel ont permis d'en déduire que l'adultère commit par le mari ne constituait pas une violation grave des devoirs et obligations du mariage rendant intolérable le maintien de la vie commune. Les juges de cassation soulignent ainsi que le devoir de fidélité est moins contraignant à cause de la durée prolongée de la procédure de divorce. [...]
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