Commentaire d'arrêt, Cour de cassation, 1re chambre civile, 8 juillet 2009, indépendance des époux, régime légal de la communauté, autonomie bancaire, recours subrogatoire, bien propre, bien commun, loi du 22 septembre 1942, article 221 du Code civil
En l'espèce, Monsieur X marié sous le régime légal de la communauté avec Madame X depuis 1967, a versé les arrérages de sa pension de retraite sur un compte épargne ouvert à son seul nom à compter de juillet 1997. Malgré l'absence de procuration, Madame X a retiré et effectué des virements sur ce compte pour plus de 19 000 euros. Monsieur X a donc poursuivi la banque pour obtenir une indemnisation du fait de la négligence du banquier.
Après avoir indemnisé le mari, la banque assigne en justice sa femme en restitution des sommes versées. En première instance, le tribunal a fait droit à la demande de la banque en ordonnant à l'épouse de lui rembourser les sommes litigieuses. L'épouse interjette donc appel. La cour d'appel de Rouen, par un arrêt du 31 janvier 2008, déboute l'épouse de sa demande en confirmant le jugement de première instance en la condamnant à verser à la banque les sommes litigieuses par application du bénéfice de subrogation. En effet, les juges considèrent que les pensions de retraite du mari constituaient un bien propre et non un bien commun. Pour cette raison, l'épouse se pourvoit en cassation.
[...] Ainsi l'époux non titulaire du compte doit avoir une procuration afin d'effectuer des opérations sur ce compte, qui doit être écrite et remise au banquier, car elle ne se présume pas. Cela n'est pas nouveau, la première chambre civile ayant déjà adopté la même solution dans une décision du 3 juillet 2001. En l'espèce, l'épouse aurait dû obtenir un tel pouvoir avant de procéder aux opérations sur le compte personnel de son mari, quand bien même les fonds versés sur le compte étaient des biens communs. Dans le régime légal de la communauté, la majorité des biens sont communs, mais d'autres peuvent être propres aux époux. [...]
[...] On favorise donc la gestion concurrente des époux alors que le principe est la cogestion. C'est donc l'autonomie bancaire entre les époux qui est réaffirmée ici à l'instar de l'application des règles du droit des régimes matrimoniaux, à tel point que M. BEAUBRUN parle d'un « véritable contre régime matrimonial ». Cette position est critiquable, car les juges se basent sur la logique du droit bancaire. Il faudrait en réalité réussir à articuler l'article 221 avec les articles et 1421 du Code civil. Selon V. [...]
[...] En effet, par principe, sous le régime légal, les gains et salaires des époux sont des biens communs. Cependant, la consécration de l'autonomie bancaire vient mettre à mal ce principe, car on laisse aux époux la possibilité de gérer comme il l'entend ces biens, ce qui limite donc de manière manifeste la qualification de biens communs. Enfin, dans la pratique, la décision de la Cour de cassation apparaît intéressante pour les époux mariés sous le régime légal de la communauté. [...]
[...] Ainsi, la Cour de cassation en l'espèce rend sa décision « abstraction faite du motif erroné » de la cour d'appel qui avait retenu que les pensions de retraite du mari constituaient un bien propre. En revanche, malgré cette divergence, la cour d'appel et la Cour de cassation parviennent au même résultat. Il faut donc faire une distinction entre le droit lui-même qui est le droit à la pension de retraite qui est propre au mari, et le produit du droit qui correspond aux arrérages de cette pension qui sont des biens communs. [...]
[...] De plus, cette présomption de pouvoir issue de l'article 221 du Code civil est critiquable du fait qu'elle ne joue pas entre époux, mais que pour les tiers, ce pourquoi en l'espèce le mari a cherché à obtenir indemnisation auprès de la banque et non pas directement auprès de son épouse. Enfin, cela est contestable au regard de la diversité des régimes matrimoniaux. En effet, par principe le régime légal impose une communauté entre les époux. Or, cette possibilité d'ouvrir un compte personnel où seul le titulaire y aura accès vient contrevenir à cette règle. N'aurait-il pas mieux fallu dans ce cas que les époux recourent au régime de la séparation de biens ? [...]
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