On a tendance à dire que “le divorce est le contentieux de l'usure matrimoniale”. Face à cet adage le législateur de 1975 a mis en place trois procédures permettant de rompre cette détérioration du lien conjugal : le divorce par consentement mutuel (art. 230 à 232) ; le divorce accepté (art. 233 et 234) ; le divorce pour faute (art. 242 à 246). Une véritable palette de divorce est donc proposée à l'article 229 du Code civil, aux époux qui souhaitent mettre un terme à leur vie commune. Ils doivent alors choisir le cas qui paraît le plus adapté à leur situation, ou plus précisément à leur relation.
Dans l'affaire qu'a eu à traiter la Cour d'appel de Bordeaux le 19 novembre 1996, les époux ont choisi le fondement du divorce pour faute.
En effet, l'épouse mène depuis 1982 une vie ponctuée de grands espaces indépendants laissant son mari seul, retenu par ses obligations professionnelles. Ce dernier entretient alors une liaison adultère non dissimulée depuis 1989, avec une dame divorcée, qu'il a installée et meublée dans une maison bordelaise. Il ne vit plus avec son épouse légitime depuis 1992, mais malgré cette séparation les époux continuent de mener une apparente vie commune, puisqu'ils se montrent ensemble au réveillon et à des réceptions d'amis. Plusieurs attestations établissent la distance affective manifestée par l'épouse à l'égard de son mari en 1990 et 1991.
Des époux ayant violé de manière réciproque et à plusieurs reprises les obligations du mariage, peuvent-ils légitimement former une demande en divorce en invoquant la faute de l'autre ?
[...] Une solution contractualiste considérant que les effets du mariage ne sont pas d'ordre public La Cour d'appel retient donc l'inapplicabilité de l'article 242 du Code civil, aux motifs que les faits fautifs ne sont pas imputables aux époux, puisque ceux-ci avaient mutuellement organisé leur vie conjugale. Le juge d'appel déboute les parties de l'ensemble de leurs demandes et réforme la décision déférée, en précisant de manière sous-entendue, qu'un mode de vie décidé en commun par les époux ne peut être sanctionné par le divorce pour faute. En effet, les époux vont devoir reformuler leur demande, en se basant sur un autre cas de divorce tel que le consentement mutuel ou le divorce accepté. [...]
[...] Tout d'abord, il doit s'agir d'un fait fautif, c'est-à-dire un fait qui est contraire aux obligations du mariage prévues aux articles 212 et suivants du Code civil. Ce fait fautif doit constituer une atteinte grave à ces obligations, c'est-à-dire que la violation vénielle est en principe pas admise. Cependant, il est de jurisprudence constante que lorsque plusieurs violations vénielles se succèdent, on considère qu'il y a violation des devoirs et obligations du mariage. Dans ce sens, le divorce pour faute est considéré comme une sanction des droits et des devoirs respectifs des époux. [...]
[...] La Cour d'appel de Bordeaux se place sans aucun doute dans une conception contractuelle du mariage, puisqu'elle confère aux parties un pouvoir important, à savoir la possibilité de déroger aux devoirs et obligations du mariage. Cependant, cette décision semble isolée, puisque la majorité de la jurisprudence et de la doctrine considère que le mariage a un caractère institutionnel, sacrosaint, qui le distingue du simple contrat. À ce titre, les effets du mariage échappent aux pouvoirs de la volonté des époux, qui ne peuvent en aucun cas y déroger. [...]
[...] Dans l'affaire qu'a eue à traiter la Cour d'appel de Bordeaux le 19 novembre 1996, les époux ont choisi le fondement du divorce pour faute. En effet, l'épouse mène depuis 1982 une vie ponctuée de grands espaces indépendants laissant son mari seul, retenu par ses obligations professionnelles. Ce dernier entretient alors une liaison adultère non dissimulée depuis 1989, avec une dame divorcée, qu'il a installée et meublée dans une maison bordelaise. Il ne vit plus avec son épouse légitime depuis 1992, mais malgré cette séparation les époux continuent de mener une apparente vie commune, puisqu'ils se montrent ensemble au réveillon et à des réceptions d'amis. [...]
[...] Toutefois, cette position peut être critiquée, puisque comme le précise l'article 4 de la Déclaration des droits de l'Homme et du Citoyen du 26 aout 1789 qui fait partie intégrante du bloc de constitutionnalité (Décision du C.Const Taxation d'office) : La liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui : ainsi, l'exercice des droits naturels de chaque homme n'a de bornes que celles qui assurent aux autres Membres de la Société la jouissance de ces mêmes droits En d'autres termes : la liberté des uns s'arrête là où commence celle des autres Il convient donc d'analyser si cette décision a un impact considérable sur la conception du mariage, ou s'il s'agit d'une solution isolée ne constituant pas un revirement de jurisprudence. L'impact de la décision sur la conception du mariage : un contrat ou une institution ? Au-delà des préoccupations relatives au cas d'espèce, la Cour d'appel de Bordeaux doit en réalité répondre à une question bien plus large que la jurisprudence et le législateur ne parviennent pas ou ne souhaitent pas débattre. [...]
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