« Rien de plus beau que d'obliger sans demander aucune récompense. » Même si, s'agissant du régime légal de la communauté réduite aux acquêts, le Code civil se montre assez magnanime, il n'a pas fait sien ce proverbe populaire. Ainsi, « la communauté doit récompense à l'époux propriétaire toutes les fois qu'elle a tiré profit de biens propres ». Mais, encore faut-il prouver le profit...
En l'espèce, deux époux étaient mariés sous le régime légal. Ils divorcent et des difficultés surviennent dans le partage et la liquidation de la communauté. L'époux soutient que la communauté a encaissé des fonds propres lui appartenant et, qu'à ce titre, en vertu de l'article 1433 du Code civil, elle lui doit récompense.
La Cour d'appel le déboute partiellement de sa demande : elle reconnaît son droit à récompense s'agissant de l'investissement de fonds propres provenant de la succession de son père dans l'acquisition d'un immeuble commun mais elle rejette ses autres demandes de récompense.
[...] Cela ne veut bien sur pas dire que l'encaissement de fonds propres sur un compte personnel ne donnera jamais droit à récompense. Cela veut simplement dire que, dans cette hypothèse, l'époux titulaire du compte ne pourra pas se contenter de prouver l'encaissement pour fonder son droit à récompense, il devra établir par tous moyens laissés à l'appréciation souveraine des juges du fonds que la communauté a profité de ses biens propres. C'est la solution qui s'appliquait de façon uniforme avant les arrêts de revirement de 2005. [...]
[...] Le profit est présumé et le droit à récompense établi. Il reviendra à la communauté (via l'autre époux) de prouver que les fonds n'ont pas profité à la communauté, autrement dit qu'ils n'ont pas été utilisés dans l'intérêt commun. En revanche, s'il s'agit d'un compte personnel 4 voire même d'un compte personnel transformé en compte joint la communauté n'a pas encaissé les fonds. En l'espèce, des circonstance auraient pu permettre de revenir, au moins partiellement, sur cette exclusion systématique du compte personnel de l'application de la présomption de profit. [...]
[...] Ce sera à l'autre conjoint de prouver l'absence de profit injuste car autant la preuve de l'encaissement est aisée pour le titulaire du compte demandeur de la récompense (il dispose des relevés de compte), autant celle de l'absence de profit sera très compliquée pour l'autre époux. Celui-ci devra prouver que les fonds ont été utilisés dans un but contraire à l'intérêt commun. Il faut prouver l'utilisation des fonds (ce qui ne sera pas simple car cet époux n'aura bien souvent pas la maîtrise des relevés de compte) et leur affectation. [...]
[...] Il est donc insuffisant pour fonder le droit à récompense. Notons que la 1ère chambre civile avait déjà utilisé exactement la même formulation dans un arrêt du 3 février 2010. Ce n'est donc pas une nouveauté. Simplement, en l'espèce, les circonstances qui auraient pu permettre l'admission de la récompense étaient nombreuses. La Haute juridiction réaffirme donc de façon très claire sa jurisprudence : en présence d'un compte personnel, il n'y a pas encaissement au sens de l'article 1433 du Code civil. [...]
[...] Elles ont toutes les deux la maîtrise du compte, le pouvoir de disposer des fonds en dépôt et (élement probant important) l'accès aux relevés de compte. Il y a donc ici une égalité des armes qui rend possible l'application de la présomption. Solution proposée par le demandeur au pourvoi et soutenue par certains auteurs comme le professeur Vareille : tous les biens sont présumés communs. Il n'y a donc pas lieu de s'interroger sur la nature du compte. Qu'il s'agisse d'un compte perso ou d'un compte joint, dès lors que des fonds propres sont déposés sur un compte, ils sont présumés communs. [...]
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