À l'heure de la pacification des divorces, où la majorité des divorces se font par consentement mutuel, ou sans qu'il soit fait référence à leurs motifs, est-il encore des juges qui ont à connaître d'un divorce pour violation du devoir conjugal, est-il encore des couples qui portent devant les tribunaux les détails de ce qui relève de leur intimité la plus profonde ?
L'arrêt rendu le 3 mai 2011 par la Cour d'appel d'Aix en Provence nous prouve que oui.
En l'espèce, une épouse souhaite divorcer de son mari en raison de son refus d'avoir des relations sexuelles avec elle. À cette fin, elle présente une requête en divorce.
Le JAF prononce le divorce aux torts exclusifs du mari et condamne celui-ci au paiement de lourds dommages-intérêts. Ce dernier interjette appel de l'ordonnance du juge aux affaires familiales de sorte que la Cour d'appel doit se demander si l'absence de relation sexuelle est-elle une violation grave et renouvelée des obligations du mariage justifiant le prononcé d'un divorce pour faute d'une part et l'allocation de dommages-intérêts d'autre part ?
[...] La CA prend d'ailleurs le soin de préciser que le mari ne peut justifier son abstinence par des raisons médicales, la fatigue chronique justifiée par des horaires de travail conséquents ne peut donc suffire à justifier l'absence de relation sexuelle. S'agissant de l'intensité du devoir conjugal, la jurisprudence de la Cour de cassation a beaucoup évolué à l'époque contemporaine. Alors qu'il était communément admis qu'il n'y avait pas de viol, à raison du devoir conjugal, entre époux, la haute juridiction est revenue sur sa qualification (Cass. Crim juil D 7). En effet, le devoir conjugal excluait le viol, car il justifiait juridiquement les relations sexuelles dans le cadre du mariage. [...]
[...] 342), tout est dit dans le Code civil pour ne pas dire (et appréhender) les relations sexuelles (J.M. Bruguière). Sans doute faut-il y voir une illustration de la pudeur morale qui animait les rédacteurs du Code civil. Si l'existence d'un tel devoir n'a jamais été réellement niée, il faut toutefois admettre que les auteurs ont souvent fait preuve d'une grande ingéniosité pour en déceler l'existence dans les textes. Le devoir conjugal se trouve consacré par le devoir de communauté de vie En effet, l'article 215, alinéa 1er, du Code civil énonce désormais que les époux s'obligent mutuellement à une communauté de vie Il s'agit d'un devoir qui s'impose aux deux époux qui ne sauraient être assimilés à une simple cohabitation matérielle. [...]
[...] La preuve du consentement de la victime appartient donc au défendeur, le mariage ne permet donc plus de le présumer. II) Le rappel des conséquences de la violation du devoir conjugal Deux conséquences se révèlent envisageables et cumulables : la dissolution du mariage pour l'avenir, par divorce et l'allocation de dommages- intérêts A. La dissolution du mariage par divorce Le divorce est une sanction classique de l'inexécution d'un devoir des époux par l'un d'entre eux. La procédure qui permet de sanctionner les fautes de l'un des époux par divorce est celle du divorce pour faute. [...]
[...] Par la même, la Cour d'appel réaffirme l'existence du devoir conjugal et les sanctions possibles de sa violation (II). L'affirmation du maintien du devoir conjugal Le devoir conjugal est un devoir des époux particulier : celui d'avoir des relations sexuelles. Si l'on en trouve la trace dans les décisions des juges, le Code civil ne dit rien sur le devoir conjugal, aucune disposition ne le vise expressément. C'est la jurisprudence qui vient donc affirmer son existence et préciser ses limites A. [...]
[...] La communauté de vie englobe aujourd'hui la cohabitation, la résidence commune, mais plus largement une communauté affective et intellectuelle. La cohabitation selon les auteurs, un double contenu : la communauté de toit et de lit. Le devoir de cohabitation impose aux époux une communauté de vie, conçue en premier lieu comme le partage du même toit : Boire, manger, coucher ensemble, c'est mariage ce me semble (Loysel). Mais pour les auteurs, si la plupart des époux partagent donc le logis, l'aspect affectif, la communauté de lit, recouvre le devoir conjugal. [...]
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