L'article 310-1 dispose que « tous les enfants dont la filiation est légalement établie ont les mêmes droits et les mêmes devoirs dans leurs rapports avec leur père et mère ».
En l'espèce, la filiation est le lien juridique qui unit un enfant à sa mère et à son père : elle fonde la parenté. La filiation confère aux enfants un statut juridique déterminé sur le plan patrimonial et extrapatrimonial. C'est-à-dire qu'elle fournit aux enfants une certaine protection, une certaine sécurité, mais en contrepartie elle leur impose des obligations à caractère moral.
Cependant, pour posséder ces droits et ces devoirs, il faut que la filiation soit légalement établie, c'est-à-dire qu'elle doit être prouvée conformément aux exigences de la loi.
Cet article, issu de la loi du 4 mars 2002, est situé dans le chapitre 1er du titre VII du livre Ier du Code civil. Il est placé avant la section 1, en tête des « Dispositions communes à la filiation légitime et à la filiation naturelle », compte tenu de son importance emblématique. En effet il met fin aux discriminations qui existaient autrefois entre les enfants adoptés, les enfants « adultérins » (naturels) et les enfants légitimes.
La filiation juridique se distingue ainsi de la filiation affective. Cette dernière n'a pas d'existence légale, puisqu'elle n'est pas officiellement constatée. La filiation juridique correspond à la filiation par le sang qui procède d'une relation entre un homme et une femme mariés (filiation légitime) ou non mariés (filiation naturelle). Mais le droit admet aussi qu'un lien de filiation artificiel soit créé entre un enfant et une personne ou un couple qui lui sont génétiquement étrangers, la filiation adoptive.
Cette nouvelle égalité entre les filiations, constituées comme telles au regard de la loi, favorise-t-elle une égalité des droits et aussi des devoirs entre ces enfants ?
Ainsi nous verrons en quoi cet article pose un principe essentiel, celui de l'égalité entre les filiations. Nous nous attacherons à définir le contexte qui a poussé le législateur à concevoir cet article, et nous expliquerons en quoi cet article constitue une évolution essentielle du droit français.
Puis nous nous interrogerons sur les limites de cet article, en mettant en avant le paradoxe suivant : vu que l'article 310-1 annonce le principe d'égalité dans les droits et les devoirs, quelle est désormais l'utilité de la légitimation ? Nous montrerons que tous les enfants n'ont pas la même facilité pour établir leur filiation, et qu'enfin cet article n'a pas réussi à être un aboutissement en soi, puisque les législateurs ont trouvé nécessaire de modifier à nouveau cette partie du Code civil sur la filiation.
[...] Cependant il est de plus en plus facilité par les expertises d'ADN qui ne laissent plus de chance aux pères récalcitrants. En France, l'établissement de la légitimité d'un enfant né d'un inceste ou d'une procréation médicalement assistée est proscrit. En effet quand elles se réalisent malgré l'interdiction légale, les procréations illicites se trouvent rejetées par le système juridique qui refuse de donner un état aux enfants qui en sont issus. Leur existence semble être pour la société une atteinte à l'ordre social, aux bonnes mœurs. [...]
[...] D'autre part la structure grammaticale de l'article met en évidence cette volonté d'instaurer une égalité complète entre les enfants. L'utilisation de l'adjectif qualificatif tous ainsi que la répétition de l'expression les mêmes marquent l'égalité entre enfants légitimes et naturels. De plus l'emploi de la conjonction de coordination et à deux reprises dans la phrase montre une accumulation, qui met alors en avant une triple égalité : entre enfants, dans leurs droits et devoirs, entre parents. Cependant cette égalité de principe se heurte toujours à certaines réalités contraires : d'abord, elle ne peut concerner que les enfants dont les deux liens de filiation sont établis, ce qui n'est pas toujours le cas. [...]
[...] En effet il existait une hiérarchie des filiations : les enfants légitimes, c'est-à-dire nés du mariage, avaient un statut préférable à celui des enfants naturels, nés hors mariage. La filiation légitime bénéficiait d'un statut supérieur aux autres filiations : seul l'enfant légitime disposait d'une plénitude de droits. Cette discrimination paraissait logique dans un système où le seul type d'union légalement admis était le mariage. De plus, à cette époque, il était impossible de faire la preuve d'une paternité biologique. En effet, la fidélité de l'épouse, imposée par le droit du mariage, était la garantie de l'exactitude des filiations paternelles. [...]
[...] En effet le nouvel article 334 du Code civil, institué par la loi de 1972, proclamait que l'enfant naturel simple avait en général les mêmes droits et les mêmes devoirs que l'enfant légitime dans ses rapports avec ses père et mère L'enfant naturel accédait ainsi au statut de l'enfant légitime, mais cette accession n'était pas absolue, puisqu'elle pouvait céder à une disposition légale expresse. Ainsi on maintenait encore la filiation légitime comme modèle de référence. Cependant la loi du 3 janvier 1972 qui posa le principe d'égalité entre les filiations pour la première fois de l'histoire du droit français, n'en avait pas tiré toutes les conséquences. Cette loi reposait sur une conception probabiliste de la filiation. [...]
[...] Ce projet de réforme du droit de la filiation a pour ambition de clarifier les principes qui structurent notre droit. Il permet des contestations autrefois interdites : il sera désormais possible à l'amant d'une femme mariée de faire déclarer sa paternité à l'égard de l'enfant mis au monde par celle-ci, même si le mari élève l'enfant comme le sien, ce qui était autrefois impossible. Ainsi cette réforme vise essentiellement à corriger la manière dont le problème a été traité jusque- là. C'est le résultat d'un processus long, mais il n'y a pas d'élément véritablement déclencheur. [...]
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