Hubert Delajoue a vendu plusieurs biens afin de se procurer du nouveau matériel pour sa nouvelle passion, la photographie. Sa femme, Rose Delajoue, découvre alors que son conjoint a vendu l'argenterie qu'elle avait reçue en cadeau de mariage de sa tante, que les tableaux de maître ont disparu du salon et que les deux fauteuils Louis XIII ont été déménagés par un ami de son mari et vendus à un brocanteur. Elle se rend compte également que son époux a fait démonter et a vendu les serres qui abritaient sa collection (à elle) de bonzaïs dans leur maison de campagne.
Problème de droit : dans quelle mesure les actes passés par un seul des époux sur des biens sont-ils valables ?
Un pouvoir exclusif est attribué à chacun des époux par l'article 1428 du Code civil, qui dispose que chaque époux administre librement et seul ses propres, en dispose également librement et en a la jouissance. Cette règle a pour conséquence que l'acte fait par le conjoint sur le propre de son époux est un acte fait sur la chose d'autrui qui, sauf circonstances particulières tenant au mandat apparent ou au mandat tacite, est nul.
Mais, afin de garantir la sécurité des tiers et la cogestion, des limites sont opposées à ce principe.
[...] Par ailleurs l'article 1424 du code civil affirme que les époux ne peuvent l'un sans l'autre, aliéner ou grever de droits réels les immeubles dépendant de la communauté. Le législateur a tenu à refuser la possibilité de l'existence d'une présomption de pouvoir en matière immobilière. Or ici nous pouvons considérer que les serres sont des immeubles par destination. Hubert ne pouvait donc en aucun cas vendre la serre. Rose pourra alors demander la nullité de l'acte de vente selon l'article 1427 alinéas 1 du code civil précité. [...]
[...] - Si en revanche l'argenterie n'était pas utilisée comme une décoration, elle échappe à la qualité de meuble meublant et la présomption de pouvoir mise en place par l'article 222 du code civil s'appliquera. Hubert était dans cette hypothèse en droit d'agir seul quant à la vente de l'argenterie. Rose ne pourra donc pas agir en nullité de la vente. Cependant la Cour de cassation, dans un arrêt du 6 juillet 1976, a affirmé que l'acte fait par le conjoint sur le propre de son époux est un acte fait sur la chose d'autrui est nul. [...]
[...] Les présomptions de pouvoirs des articles 221 et 222 du code civil I. Jurisprudence - Ass. Plénière 4 juillet 1985 (JCP II rapport A. Ponsard) : L'article 221, alinéa du Code civil, aux termes duquel l'époux déposant est réputé, à l'égard du dépositaire, avoir la libre disposition des fonds et des titres en dépôt, dispense le dépositaire de procéder à toute vérification de propriété ou de pouvoir au moment où ces fonds ou titres sont déposés et tient en échec à son égard la présomption de communauté ; que cette dispense ne peut être remise en cause rétroactivement par le décès de l'un des époux ; qu'en effet, si la règle de l'article 221 précitée cesse d'être applicable après la dissolution du mariage, les effets qu'elle a produits antérieurement doivent être respectés ; que, s'il n'a pas reçu opposition des héritiers, le dépositaire ne peut donc prendre aucune initiative en ce qui concerne le fonctionnement du compte. [...]
[...] Mais il faut noter que cette hypothèse ne reste possible qu'à condition que la consistance du patrimoine originaire ait été prouvée par un état descriptif, même sous seing privé, établi en présence de l'autre conjoint et signé par lui (article 1570 du code civil). Si cette preuve n'est pas apportée il faudra se référer à l'article 1402 du code civil qui admet d'autres mécanismes de preuve (par exemple, Rose pourra demander le témoignage de sa tante). De plus l'article 1599 du code civil prévoit que la vente de la chose d'autrui peut donner lieu à des dommages et intérêts si l'acheteur ignorait que la chose fût à autrui. [...]
[...] Cette règle a pour conséquence que l'acte fait par le conjoint sur le propre de son époux est un acte fait sur la chose d'autrui qui, sauf circonstances particulières tenant au mandat apparent ou au mandat tacite, est nul. Mais, afin de garantir la sécurité des tiers et la cogestion, des limites sont opposées à ce principe. D'une part il s'agit des présomptions d'acquêts et de pouvoir ; la présomption de communauté est sans incidence à l'égard des meubles qu'un époux détient individuellement. [...]
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