Il s'agit ici de faire le point sur une question de procédure contentieuse. Une entreprise « non-candidate » peut-elle se voir reconnaître un intérêt pour contester la passation d'un marché public ou d'une délégation de service public ?
La question de l'intérêt à agir sera étudiée dans le cadre d'une procédure devant les juridictions administratives, mais également devant le Conseil de la concurrence.
La jurisprudence est différente selon que l'on soit dans le cadre d'un marché public ou d'une délégation de service public. Notons dès à présent que le juge administratif se montre plus sévère en matière de marché public.
Il est de jurisprudence constante en matière de marché public, qu'une entreprise qui a renoncé à présenter une offre ne se verra pas reconnaître un intérêt à agir suffisant pour contester la décision de passation du marché en cause (CE, 30 mars 1906, Ballande : Rec., p.280). Ainsi, le Conseil d'Etat oppose une fin de non-recevoir aux recours pour excès de pouvoir formés contre les actes de passation d'un marché public par une entreprise n'ayant pas présenté d'offre (CE 11 juillet 1919, Le calvet et autres : Rec., p.280).
[...] Le Conseil d'Etat a en effet reconnu l'intérêt à agir d'une entreprise non-candidate mais qui aurait été irrégulièrement empêchée de soumissionner par l'administration (CE 19 janvier 1938, Société générale de fonderie : Rec., p.50 ; CE 19 février 1996, SA Aubettes : Rec., p.45). Dans cette dernière affaire, la société plaignante s'était vue reconnaître un intérêt à agir contre une décision de passation d'un marché pour lequel elle n'avait pas pu être candidate en raison d'une erreur de l'administration. En l'espèce, il s'agissait d'une irrégularité touchant les conditions de publicité et ayant empêché la société de soumissionner. [...]
[...] Intérêt à agir d'une entreprise non-candidate pour contester la passation d'une délégation de service public ou d'un marché public Enoncé de la question de droit posée Il s'agit ici de faire le point sur une question de procédure contentieuse. Une entreprise non-candidate peut-elle se voir reconnaître un intérêt pour contester la passation d'un marché public ou d'une délégation de service public ? La question de l'intérêt à agir sera étudiée dans le cadre d'une procédure devant les juridictions administratives, mais également devant le Conseil de la concurrence. [...]
[...] En effet, la majorité des affaires soumises à l'appréciation du conseil de la concurrence concerne des ententes entre candidats soumissionnant à un appel d'offres dans le cadre d'un marché public ou d'une délégation de service public, faussant ainsi le jeu de la concurrence. Les avis et décisions du conseil de la concurrence concernant directement les acheteurs publics restent plus rares. En effet, pour qu'un acheteur public entre dans le champ d'intervention du conseil de la concurrence, il faut que celui-ci intervienne dans le cadre d'un processus d'achat visant une activité économique. [...]
[...] A l'inverse dans le cadre d'une délégation il suffit d'avoir fait acte de candidature, que celle-ci soit retenue ou pas est sans conséquence sur l'intérêt à agir. Aux vues de cette première jurisprudence, une entreprise non-candidate n'a a priori pas la possibilité de contester une délégation de service public. Cependant dans un arrêt du 23 septembre 2003, la Cour administrative de Marseille semble assouplir un tel principe (CAA de Marseille septembre 2003, nº03M699 et nº03MA1184 Compagnie méditerranéenne d'exploitation des services d'eau et communauté d'agglomération de Fréjus st Raphaël Comité intercomm. [...]
[...] Cependant, un tel intérêt est subordonné à une procédure en deux temps et n'est pas reconnu dans le cadre d'un appel d'offres ouvert (CE Ass avril 1986, Compagnie luxembourgeoise de télédiffusion : Rec., p.97). Face à la position sévère du juge français, la jurisprudence communautaire reconnaît à une entreprise non candidate, mais susceptible d'être lésée par une spécification discriminatoire d'un marché public, un intérêt à agir pour contester ledit marché (CJCE 12 février 2004 aff. C-230/03 Grossmann Air Service, Bedarfsluftfahrtunternehmen GmbH & Co. KG et République autrichienne). Dans cette affaire, l'entreprise plaignante n'avait pu présenter d'offre en raison de la présence dans les documents de l'appel d'offre de dispositions discriminatoires. [...]
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