« Le droit de la concurrence (est) conçu essentiellement comme une discipline du droit privé faisant appel aux règles du droit civil, du droit commercial et du droit pénal » (D. Linote). Cette vision du droit de la concurrence semble aujourd'hui totalement obsolète, tant le droit public est profondément marqué par le droit de la concurrence. L'entrée des personnes publiques dans la sphère économique et l'expansion du droit communautaire en sont les principales causes. Cependant, pendant longtemps le juge administratif s'est totalement désintéressé de l'action des personnes publiques sur le marché économique par rapport au droit de la concurrence, considérant que les actes administratifs ne pouvaient fausser le jeu de la concurrence puisqu'ils relèvent de l'organisation d'un service public ou de l'exercice de prérogative de puissance publique (Compagnie Générale des Eaux, 23 juillet 1992, Conseil d'Etat). Cependant l'ordonnance de 1986 était censée marquer l'avènement des règles de concurrence dans le droit français. Abrogeant, l'ordonnance de 1945 qui encadrait la fixation des prix par l'Etat ; l'ordonnance de 1986 reprend les principales règles communautaires en matière de concurrence et instaure un nouvel organe de contrôle, le Conseil de la concurrence. Cependant, cette entrée de la concurrence dans le droit interne va être des plus délicates notamment en matière de répartition des compétences, le juge administratif ne voulant déléguer au Conseil de la concurrence sa compétence dans l'annulation d'acte administratif. La question sera partiellement tranchée suite à l'arrêt Fédération Française des Sociétés d'assurance du 8 novembre 1986, Conseil d'Etat, pour être totalement réglée avec l'arrêt Million et Marais, en date du 3 novembre 1997. Le Conseil d'Etat qui voit l'essentiel du contentieux concurrentiel aller devant le Conseil de la concurrence opère un étonnant revirement de jurisprudence, en estimant que l'ordonnance de 1986 fait partie du bloc administratif du juge qui annulera désormais un acte administratif qui contreviendrait à l'ordonnance, mais que l'acte sera annulé au regard des effets anticoncurrentiels que l'acte pourrait entraîner. Cependant, l'arrêt Million et Marais engendre de nouvelles interrogations notamment concernant la répartition du contentieux. La question s'est très rapidement posée donnant lieu à un vaste contentieux.
[...] La compétence du juge administratif étant élargie, il apparaît comme un nouveau juge intervenant dans le domaine concurrentiel. Cependant, le Conseil de la concurrence garde un rôle important dans l'application de l'ordonnance, ce qui peut laisser planer une ambiguïté sur la séparation de compétence de chaque organe. II- Le Conseil de la concurrence et le juge administratif, l'application commune du droit de la concurrence nuancée par des intérêts divers Le Conseil de la concurrence a été créé par l'ordonnance de 1986 et un réel conflit de compétence est né avec l'ordre administratif. [...]
[...] Il est même possible de considérer que le rôle du Conseil de la concurrence est mis en valeur puisque le Conseil d'Etat va se servir de son expérience et de sa jurisprudence, pour rendre des décisions dans lesquelles il n'a pas a contrario l'expérience requise pour statuer. Cette position du conseil d'Etat est très significative, quant à la volonté de produire une jurisprudence homogène et juste. Il semble dès lors que le conseil d'Etat reconnaisse qu'il n'a pas l'expérience suffisante, pour statuer d'office et fait appel au conseil de la concurrence pour l'aider dans sa décision. [...]
[...] Le juge administratif se retrouve en quelque sorte juge de droit commun, il n'a certes pas de pouvoirs spéciaux, mais il peut néanmoins demander l'intervention du Conseil comme c'est le cas en l'espèce. Même si le Conseil de la concurrence et le juge administratif se servent d'un droit identique, il semble délicat de pouvoir parler d'une unification totale du droit de la concurrence, tant les intérêts visés par chacune des institutions sont différents. Une unification du droit de la concurrence que partielle L'application du droit de la concurrence par le juge administratif peut apporter de nombreuses questions. [...]
[...] Le Conseil d'Etat ne contrôle donc pas un acte qui placerait une entreprise en situation d'abus de position dominante, mais bien si l'acte résulte d'un abus de position dominante. Le juge administratif est alors habilité à contrôler les actes émanant des personnes publiques en veillant à ce que l'acte n'engendre d'abus de position dominante. Précédemment, l'arrêt Ville de Pamier de 1989,Tribunal des conflits, considérait que la compétence du juge administratif se déduisait par la non-application de l'ordonnance de 1986, en effet, un acte administratif était considéré comme n'étant pas constitutif d'une activité de production, de service, de distribution, dès lors, il n'était pas possible de pouvoir dire qu'un acte faussait la concurrence. [...]
[...] Ainsi, le Conseil d'Etat va insérer dans le contrôle de légalité d'un acte administratif le droit de la concurrence. La particularité de cet arrêt réside donc dans le fait que le CE reconnaît la compétence du juge administratif pour le contrôle d'acte émanant d'une personne publique affectataire du domaine public, mais qu'en outre le Conseil d'Etat fait appel au Conseil de la concurrence pour l'aider dans sa décision. Il faudrait dès lors se demander dans quelle mesure, le droit de la concurrence appliqué par le juge administratif, a t'il un impact dans le contrôle de légalité d'un acte administratif. [...]
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