En matière de concentration économique, le juge administratif, en particulier celui de l'excès de pouvoir, s'est déjà prononcé, à plusieurs reprises, sur la légalité des décisions du ministre chargé de l'économie autorisant ou refusant une opération de concentration.
Le Conseil d'Etat s'est également prononcé sur cette même question, dans l'arrêt Société Métropole Télévision (M6) rendu le 27 juin 2007. En voici les faits : le 6 juillet 2004, les sociétés TF1 et AB ont conclu un protocole d'accord en vue de l'acquisition du contrôle conjoint de la société Télé-Monte-Carlo (TMC). Le 30 juillet 2004, elles ont notifié au ministre chargé de l'économie ce protocole, qui prévoit le rachat de 80% du capital de la société TMC par TF1 et AB, par l'intermédiaire d'une société commune créée à cet effet. Dans sa décision du 27 octobre 2004, le ministre a autorisé cette opération de concentration, sous condition du respect par les sociétés TF1 et AB de plusieurs engagements. La société Métropole Télévision, en tant que société tierce mais surtout concurrente, a formé un recours pour excès de pouvoir devant le Conseil d'Etat : elle demande l'annulation de cette dernière décision.
Sachant que le domaine des concentrations, relevant du droit de la concurrence, est traditionnellement le terrain de prédilection des autorités nationales de la concurrence, l'intérêt de cet arrêt demeure donc au niveau du contrôle qu'exercera le juge de l'excès de pouvoir sur la décision ministérielle. Quels sont le cadre et la portée du contrôle du Conseil d'Etat sur la décision administrative du ministre d'autoriser une opération de concentration ? Quels sont les moyens à la disposition du Conseil d'Etat pour apprécier la légalité de cette décision ?
[...] Quels sont le cadre et la portée du contrôle du Conseil d'Etat sur la décision administrative du Ministre d'autoriser une opération de concentration ? Quels sont les moyens à la disposition du Conseil d'Etat pour apprécier la légalité de cette décision ? Au final, la requête de la Société Métropole Télévision est rejetée dans son ensemble par le Conseil d'Etat. En général, le Conseil estime à plusieurs reprises que le ministre n'a pas commis d'erreur d'appréciation mais laisse certaines questions entre les mains du Conseil de la Concurrence. [...]
[...] A plusieurs reprises, le Conseil d'Etat constate que le ministre n'a pas commis d'erreur d'appréciation Il ne se concentre donc plus sur l'erreur manifeste d'appréciation. Par ailleurs, la longueur de l'arrêt montre bien que le Conseil d'Etat s'est livré à une analyse concurrentielle très détaillée. Ainsi, on constate que le juge administratif s'approprie un raisonnement économique qui semblait réservé aux autorités nationales de la concurrence. De plus, si dans l'affaire Orangina ainsi qu'en l'espèce, le Conseil d'Etat s'est aligné sur l'analyse du ministre, il lui est déjà arrivé d'annuler une décision du ministre autorisant une concentration et même de se démarquer du Conseil de la Concurrence lorsque le ministre s'était aligné sur un de ses avis Sect février 2004, Société Royal, Philips Electronics e.a). [...]
[...] pour conclure que le ministre n'était pas tenu de saisir le Conseil de la Concurrence Ainsi, deux observations sont nécessaires. Tout d'abord, le Conseil d'Etat n'utilise plus la technique de l'erreur manifeste d'appréciation mais exerce dorénavant un contrôle complet sur le refus ministériel de saisir le Conseil de la Concurrence. Ensuite, il est probable que le Conseil d'Etat institue a contrario une véritable obligation de saisir le Conseil de la Concurrence en cas d'atteinte à la concurrence non palliée par les engagements des parties. [...]
[...] Mais a-t-il les moyens de cette ambition ? Laurent Richer, professeur à l'université Paris avocat à la Cour d'Appel de Paris En matière de concentration économique, le juge administratif, en particulier celui de l'excès de pouvoir, s'est déjà prononcé, à plusieurs reprises, sur la légalité des décisions du ministre chargé de l'économie autorisant ou refusant une opération de concentration. Selon l'article L430- 1 du Code du Commerce, modifié par la loi relative aux nouvelles régulations économiques du 15 mai 2001, et qui s'aligne sur le droit communautaire : Une opération de concentration est réalisée : Lorsque deux ou plusieurs entreprises antérieurement indépendantes fusionnent ; 2 Lorsqu'une ou plusieurs personnes, détenant déjà le contrôle d'une entreprise au moins ou lorsqu'une ou plusieurs entreprises acquièrent, directement ou indirectement, que ce soit par prise de participation au capital ou achat d'éléments d'actifs, contrat ou tout autre moyen, le contrôle de l'ensemble ou de parties d'une ou plusieurs autres entreprises. [...]
[...] On pourrait ainsi croire que le ministre reconnaît un certain droit d'observation aux entreprises tierces. Est-ce ici l'application du principe du contradictoire ? Selon le Conseil d'Etat : aucun texte ni aucun principe n'exigent que la décision du ministre ne soit précédée d'une procédure contradictoire avec les tiers intéressés Ainsi, l'obligation du ministre de publier la notification n'entraîne pas l'application du principe du contradictoire en faveur des entreprises concurrentes. De plus, le ministre chargé de l'économie n'était pas tenu de communiquer aux sociétés concurrentes les engagements pris par les parties. [...]
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