Le journal « Der Standard » est édité et rédigé par Oscar Bronner GmBH & Co. KG ( ci-après « Bronner ») une société autrichienne. Celle-ci détient une part de marché minoritaire sur le sol autrichien (3,6% en termes de tirage et 6% en termes de recettes publicitaires). Une autre société, Mediaprint, édite et distribue quant à elle les quotidiens « Neue Kronen Zeitung » et « Kurier ». Elle dispose non seulement de la majorité des parts de marché mais en plus, elle dispose du seul système de distribution de journal au niveau national.
Désirant intégrer ce système de distribution à domicile, Bronner demande donc à Mediaprint de distribuer également son journal. La société Mediaprint refusant de l'intégrer à son système de distribution, Oscar Bronner a saisi alors les juridictions autrichiennes en application de la législation nationale de réglementation de la concurrence (article 35 de la Kartellegestz).
Bronner ayant analysé le comportement de Mediaprint comme un abus de position dominante en ne lui laissant pas la possibilité d'accéder au système de portage contre le paiement d'un prix raisonnable.
Bronner indique également que le système de portage mis en place par Mediatprint n'a pas d'équivalent en Autriche (la voie postale ne permettant pas entre autres d'être livré dès les premières heures comme c'est le cas pour les journaux distribués par Mediaprint) et de surcroît elle indique que du fait de la faible part de marché dont elle dispose sur le marché des quotidiens autrichiens, elle ne peut être rentable à effectuer elle même cette opération.
Saisie de cette demande les autorités compétentes autrichiennes (1) surseoit à statuer et renvoie devant la Cour de Justice des Communautés Européennes une question d'interprétation de l'article 86 du Traité (ci-après article 82 du TCE) sanctionnant l'abus de position dominante. Ainsi le Kartellgericht demande si l'article 82 du TCE est applicable en l'espèce.
Plus précisément la question sera de savoir si une société en situation de position dominante sur le marché de la distribution de journaux nationaux, et qui de surcroît édite des journaux, abuse de sa position et constitue une atteinte au marché communautaire en refusant l'accès à son réseau de distribution à un autre journal national ?
La Cour de Justice répond par la négative en refusant de qualifier la position dominante de Mediaprint d'abusive. Son raisonnement, dont la forme didactique est plus qu'avérée, constitue la ligne directrice de notre commentaire puisque dans un premier temps celle-ci s'efforce de délimiter la position dominante (I), pour dans un deuxième temps chercher à savoir si cette position constitue ou non un abus (II) (rejet des prétentions basées sur l'article 82 en l'espèce).
[...] Or il semble que le raisonnement de la Cour soit tout autre car la partie substantielle évoque bien plus un outil capable d'appréhender un plus grand nombre de marché que le renvoie à une notion stricte qui limiterait la Cour (à un espace géographique par exemple). La cour est ici dans un mode de raisonnement que l'on a déjà rencontré en Droit européen de la concurrence. En effet, avec des notions qui peuvent paraître floues et imprécises pour une personne non avertie, elle se donne le choix d'embraser un plus grand nombre de cas, recourant ainsi à un raisonnement casuistique . [...]
[...] (http://curia.europa.eu/common/recdoc/repertoire_jurisp/bull_cee/tab_index_B .htm) C'est ainsi qu'elle défini le marché en cause (le marché du produit) comme étant celui constitué par les systèmes de portage à domicile Mais elle ne se limite pas à cela car comme on le sait, plus on aura défini un marché restreint, plus le droit européen de la concurrence (en l'occurrence la Cour) a de chance que ces entreprises soient en position dominante. Or plus il y a de chance qu'elle soit en position dominante plus il y a de chance qu'on leur reproche d'en avoir abuser. Donc plus on restreint les marchés plus on contrôle les entreprises. [...]
[...] On peut rappeler ici la décision du 9 novembre 1983 Michelin qui dit que le territoire d'un Etat membre auquel s'étend une position dominante est susceptible de constituer une partie substantielle du marché commun Comme nous l'avons dit, le critère de l'affectation (et par son biais celui de la position dominante) peut être appréhendé par le marché du produit en cause, ici la cour retient bien ce critère et s'oppose alors à la prétention de Mediaprint et de la Commission qui en invoquant un critère géographique strict qui exclurait une position dominante touchant la communauté. En outre le raisonnement de la Cour est justifié pleinement par le fait que le refus de Mediaprint d'ouvrir son marché national à un éditeur national empêcherait ; mutadis mutandis ; l'ouverture de celui-ci à une autre entreprise membre de la communauté, donc perturberait le développement du marché. On voit dès lors tout l'intérêt pour la Cour de retenir le marché de distribution de quotidien et non celui plus limitatif du marché des journaux nationaux. [...]
[...] Et si l'on se tient au droit positif on remarque le juge national peut désormais appliquer le droit communautaire, voir même qu'il applique tout le droit communautaire (aussi bien le Soft Law tel les directives du règlement d'exemption de l'article 99). Pour autant, on ne peut que constater la manière habile dont la Cour se dégage des limites qu'auraient pu être le marché national autrichien I. Les critères de détermination de l'abus de cette position dominante Si l'arrêt de la Cour paraît être un cas déjà maintes fois utilisé notamment dans la caractérisation de l'abus il faut constater que cet arrêt innove tout de même notamment sur l'utilisation de notion de facilités essentielles A. [...]
[...] Le caractère objectif d'une situation donnée pouvant prêter à confusion lorsque l'on se rend compte qu'un même marché supporte l'appellation de distribution sélective alors même que la Cour ne répond précisément sur le point de savoir si la vente par correspondance (par internet) entre dans le champ d'application discriminatoire de ces marchés (voir en ce sens l'arrêt YSL contre E. Leclerc traité en TD) Pourtant il nous semble regrettable que la Cour ne retienne pas dans ce cas le fait que Mediaprint ai autorisé Wirtschaftsblatt a accédé au réseau de portage. [...]
Bibliographie, normes APA
Citez le doc consultéLecture en ligne
et sans publicité !Contenu vérifié
par notre comité de lecture