Cassation civile 1ère du 14 mai 1996
Un expert atteste de vice de fabrication de tuiles. L'acquéreur agit contre le vendeur en garantie de conformité. La CA, par un arrêt infirmatif, refuse de faire droit à cette demande. Il s'agirait d'un vice caché et non d'une délivrance non conforme. Or, l'action n'a pas été intentée dans le bref délai exigé pour l'action en garantie des vices cachés (articles 1641 et 1648). Le pourvoi conteste le rejet du fondement de l'action en garantie de conformité (article 1604) car si la chose est impropre à l'usage auquel elle est destinée, elle est, par voie de conséquence, non conforme à ce qui devait être livré. En outre, il y aurait une erreur sur les qualités substantielles de la chose (article 1110) puisque les caractéristiques de celle-ci ne correspondent pas à ce que l'acheteur voulait acquérir. Les juges du fond auraient dû relever d'office ce fondement de sorte à octroyer une indemnisation à l'acquéreur.
Lorsqu'un défaut de la chose la rend impropre à son utilisation normale, le fondement de l'action peut-il la garantie en délivrance conforme ?
La Cour refuse ce second fondement. Elle rappelle le champ d'application de la garantie des vices cachés. Il s'agit des cas dans lesquels le vice caché rend la chose impropre à sa destination normale. C'est bien le cas ici. En revanche, la chose correspond à celle commandé ; il n'y a donc pas de manquement à l'obligation de délivrance conforme. Seule l'action en garantie des vices cachés est envisageable, elle est exclusive de toute autre et les juges du fond n'avait pas à rechercher si le fondement de l'erreur pouvait être invoqué. Enfin, le demandeur a agit presque deux années après avoir eu connaissance du vice. Il n'a pas agit à bref délai de sorte que les juges du fond, après avoir apprécié souverainement cette condition, ont pu rejeter sa demande.
Déjà, en 1993 (not. cassation civile 1, 8 décembre 1993), la 1re chambre civile avait marqué son intention de distinguer délivrance (donc obligation de conformité) /vice caché en énonçant que « le défaut de conformité de la chose vendue à sa destination normale » relève de l'action en garantie des vices cachés. (...)
[...] les réflexions d'O. Tournafond, De la transposition de la directive du 25 mai 1999 à la réforme du Code civil, D doctr., p ; P. Jourdain, Transposition de la directive sur la vente du 25 mai 1999, ne pas manquer une occasion de progrès, D point de vue p ; D. Mainguy, Propos dissidents sur la transposition de la directive du 25 mai 1999 sur certains aspects de la vente et des garanties des biens de consommation, J.C.P I ; sur la directive no 1999/44/C.E. [...]
[...] En effet, par la formulation qu'elle choisit dans l'arrêt étudié, elle généralise l'obligation à tout produit complexe. Quoiqu'il en soit, cette obligation est énoncée en application de l'article 1604 du Code civil. La Cour de cassation applique donc le régime de la vente au logiciel, ce qui peut être surprenant eu égard au régime particulier applicable à ces œuvres. L'application contestable du régime de la vente à l'œuvre de l'esprit Après de maintes débats, le législateur a décidé de protéger les logiciels par le droit d'auteur (et non par le droit des brevets). [...]
[...] Goubeaux, À propos de l'erreur sur la valeur, Mélanges Ghestin préc., p et s. Op. cit., p En ce sens également, Y.-M. Serinet, Erreur et vice caché : variations sur la même thèse . : Mélanges Ghestin, L.G.D.J p no 2 : «Les interférences entre l'erreur et la garantie édicilienne paraissent fatales dès lors que l'erreur peut consister en l'ignorance d'un défaut caché, vice qui se manifeste dans l'absence d'une qualité substantielle exigée par l'acheteur relativement à l'aptitude du bien à un certain usage». Y.-M. Serinet, op. [...]
[...] Delebecque, op. cit., no 313. En ce sens, Laurent, L'enchevêtrement des actions de l'acheteur liées à l'état du bien vendu, Thèse, Nantes nos 170 et s. ; F. Collart Dutilleul et Ph. Delebecque, op. cit. no 314 ; Y.-M. Serinet, op. cit., p no 23. La jurisprudence se montre en effet peu exigeante lorsque l'inaptitude à l'usage de la chose suffit à rendre certaine et évidente l'existence d'un défaut inhérent de la chose. V. [...]
[...] Précisons toutefois que la transposition de la directive précitée de 1999 sur la vente nécessitera une réforme en la matière puisque son article 5-1 prévoit que s'il existe un délai de prescription dans le droit national, celui-ci ne doit pas expirer au cours des deux ans qui suivent la délivrance, article 5-1. Notons que le délai est même de trente années lorsque l'acquéreur agit en non-conformité de la chose. Précisions toutefois que l'acheteur peut préférer exercer une action estimatoire, qui lui permet de demander une diminution du prix, tout en gardant la chose défectueuse, article 1644 du Code civil. Solution admise depuis Cass. civ. 1re novembre 1954, J.C.P II obs. H.B. Cass. civ. 1re juillet 2001, Bull. civ. no 225 ; D somm. [...]
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