Monsieur X est gynécologue-obstétricien. Il nous a consultés pour un problème qu'il rencontre avec une patiente à qui il a sauvé la vie lors d'un accouchement qui s'est mal déroulé. Mais celle-ci le poursuit quand même en responsabilité pour non-respect du refus de soin.
En effet, Monsieur X a été appelé en urgence pour l'accouchement difficile de la patiente qui avait perdu beaucoup de sang. Le médecin a alors demandé à une infirmière de transfuser la patiente (ce qui est fréquent lors des accouchements). Or il s'est avéré que cette patiente était Témoin de Jéhovah et qu'elle s'est immédiatement opposée à la transfusion en raison de ses convictions idéologiques. Monsieur X lui a expliqué le danger de mort imminent qu'entraînait son refus de soin. La patiente est quand même restée sur sa position jusqu'au moment de perdre connaissance. Monsieur X a donc, pour sauver la patiente qui venait de mettre au monde un nouveau-né, transfusé cette dernière, qui sans quoi, serait aujourd'hui décédée. Reste qu'il n'a pas respecté la volonté de sa patiente, laquelle lui oppose donc le non-respect de son refus de soin pour le poursuivre en responsabilité.
Monsieur X souhaite savoir ce qu'il risque, à quelle solution va aboutir la procédure. La difficulté que soulève le cas d'espèce est une contradiction entre plusieurs devoirs du praticien. Sauver la vie de la patiente ou respecter son refus et forcément la voir mourir sans réagir alors que la médecine peut aujourd'hui, sans aucune difficulté transfuser et sauver la patiente. Heureusement la jurisprudence administrative a déjà eu à répondre à cette problématique de savoir si un principe doit l'emporter sur l'autre, ce qui va nous permettre de donner une solution à peu près certaine de ce que sera le dénouement de la procédure, si la patiente décide d'aller jusqu'au bout.
Les moyens dont dispose actuellement la médecine suscitent à la fois enthousiasme par les progrès scientifiques réalisés mais ils suscitent également la méfiance. Les malades souhaitent de plus en plus participer aux décisions qui les concernent, au nom de leur autonomie. Et à l'inverse, ils s'inquiètent de ce qu'il sera décidé pour eux s'ils ne sont plus en mesure de donner leur avis. Ils peuvent aussi craindre de perdre leur statut de personne pour devenir l'objet d'une médecine technico-scientifique du fait des souffrances, de la mauvaise qualité de vie ou encore de la dépendance liée aux soins pratiqués.
Pour cela, le droit français et la déontologie médicale reconnaissent les droits des malades et plus particulièrement la nécessité de leur consentement pour tout acte médical. Le consentement du malade aux soins constitue sur le plan juridique l'élément fondateur de la relation soignant/soigné et ce, pour une plus grande autonomie de l'usager du système de santé.
[...] S'ils désobéissent à ce commandement, ils croient se priver de la vie éternelle alors que s'ils refusent la transfusion, ils pensent se retrouver dans le paradis qu'ils pensent voir instaurer très prochainement. Ils n'ont pas peur de la mort, ont l'espoir de la vie éternelle, car après Armageddon (période de la lutte ouverte de Dieu tout puissant contre toutes les forces sataniques), le paradis sur terre renaîtra avec le Royaume du Christ. Néanmoins, les fidèles peuvent accepter certaines fractions du sang comme l'albumine, les immunoglobulines ou les préparations pour hémophiles. [...]
[...] On peut en déduire une grande constance du conseil d'Etat sur le sujet. En effet, la solution retenue dans l'ordonnance du 16 août 2002 après entrée en vigueur de la loi du 4 mars 2002 sur les droits des malades est identique à celles retenues antérieurement à cette loi par les juridictions administratives. Alors pourtant que le cas jugé en octobre 2001 l'avait été avec toutes les précautions et la lenteur d'une procédure au fond en vue d'indemnisation (près de 11 ans entre la transfusion et la décision du celui de 2002 a été jugé avec toute la rapidité, l'urgence d'une procédure en référé liberté (11 jours entre la transfusion et la décision finale). [...]
[...] 1111-6 ou la famille ou, à défaut, un de ses proches et, le cas échéant, les directives anticipées de la personne, aient été consultés. La décision motivée de limitation ou d'arrêt de traitement est inscrite dans le dossier médical. La loi Leonetti qui a été élaborée dans le contexte de l'affaire Vincent Humbert prévoit donc que le corps médical doit tenir compte des directives qu'aurait données le patient lorsqu'il était en état d'exprimer sa volonté. Que faut-il retenir de ces dispositions ? [...]
[...] Mais, souhaitant juger l'affaire au fond comme il en a le pouvoir contrairement à la Cour de cassation, le Conseil d'Etat a examiné lui-même le fond de la requête. Il relève tout d'abord que compte tenu de la situation extrême dans laquelle M. X se trouvait, les médecins qui le soignaient ont choisi, dans le seul but de le sauver, d'accomplir un acte indispensable à sa survie et proportionné à son état, ce qui ne constitue pas une faute de nature à engager la responsabilité de l'hôpital Dans ces conditions, et quelle que fût par ailleurs leur obligation de respecter une volonté fondée sur des convictions religieuses le centre hospitalier n'a commis aucune faute. [...]
[...] Cependant, en ce qui concerne les conséquences potentielles de l'acte, même si leur information s'inscrit mal dans le cadre d'une situation d'urgence qui est l'objet de notre étude, une évolution jurisprudentielle tendant à y inclure les risques exceptionnels ainsi que la position du législateur de 2002 mérite d'être évoquée. En effet, il était classiquement admis que l'information était limitée aux risques normalement prévisibles (Cass. civ novembre 1969). Cependant, selon une décision récente de la Cour de cassation, le médecin n'est pas dispensé de ses obligations d'information par le seul fait que ces risques revêtent un caractère exceptionnel (Cass. 1ère civ octobre 1998). [...]
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