Au Moyen Age, en France, l'Eglise se montrera favorable aux associations d'entraide, dénommées « confréries » dès lors qu'elles se créent dans le cadre de ses objectifs. Certaines de ces confréries se constitueront au sein de corps de métier, prenant le nom de corporations. Le pouvoir royal en prenant le pas sur l'Eglise se montrera d'abord méfiant à l'égard de celles-ci à cause de la mainmorte . Plus tard, lorsque Saint Louis et Philippe-le-bel créeront un droit d'amortissement frappant les biens de mainmorte, le pouvoir royal se montrera bien plus bienveillant envers les corporations. Avec la Renaissance, la féodalité est brisée et le pouvoir royal va de nouveau montrer de l'hostilité à l'égard des corps intermédiaires. A la veille de la Révolution, la liberté d'association est sujette à des turbulences. En effet Turgot, par un édit de 1776 (qui ne sera pas avalisé par le parlement) tente d'interdire les corporations. De plus, la liberté associative s'étend désormais au delà des groupements professionnels avec l'éclosion de « clubs de pensée » La Déclaration des droits de l'homme, votée le 16 août 1789, reconnaît la liberté de « communiquer ses pensées et opinions » mais ne reconnaît pas la liberté d'association.
En revanche, le décret des 13 et 14 Novembre 1790 affirme que : « les citoyens ont le droit de s'assembler paisiblement et de former entre eux des sociétés libres ». Mais il ne s'agit que d'une illusion car plusieurs facteurs vont entrainer une régression : la montée en puissance des jacobins, le libéralisme économique ambiant, la volonté de reconnaître l'Etat comme le seul débiteur des aides sociales, les révoltes ouvrières… Dès lors, les décrets d'Allarde (2 et 7 Mai 1791) supprimeront les corporations de métiers ; la loi Le Chapelier (14 et 15 Juin 1791) interdit les associations ouvrières mais maintient les Chambres de commerce ; la loi du 18 Août 1792 supprime les confréries ; et, enfin la loi du 7 Thermidor an III interdit les clubs politiques. Une tolérance sera constatée durant le Directoire : affirmation de la liberté politique des associés ; reconnaissance de la validité de « sociétés par actions » au prix d'une autorisation ; restitution à l'Eglise de ses biens et admission d'associations caritatives et mutualistes. Napoléon Bonaparte se montrera plus sévère envers la liberté d'association puisqu'il fera de la « coalition » un délit pénal (article 291 code pénal). La Révolution de 1843 connaitra le même mouvement de va-et-vient : affirmation de l'interdiction de toute association si le Gouvernement l'estime dangereuse pour la sécurité publique (loi du 18 Juin 1840) puis liberté de s'associer (loi du 22 Juillet 1848 et Constitution du 4 Novembre 1848). Même Napoléon III, qui permit aux sociétés anonymes de se constituer librement se montra toujours hostile aux associations professionnelles, notamment salariales. Toutefois, la fin du 19e siècle va se traduire par une prolifération d'associations formées sans autorisation publique. Entre 1871 et la date de parution du projet Waldeck-Rousseau devant aboutir à la loi de 1901 il n'y eut pas moins de 32 projets ou propositions de loi sur la liberté d'association. Cette loi rejoignait en effet l'évolution de la pensée sociale et l'évolution de la perception par l'Etat des groupements intermédiaires. En effet, ces derniers étaient à l'origine perçus comme des rivaux des pouvoirs politiques ; cela explique la lente adoption de la loi de 1901. Toujours est-il que dès le 1er Juillet 1901 l'association peut se constituer librement, sans autorisation préalable (sauf en ce qui concerne les congrégations) ; et l'article 291 du code pénal est abrogé.
Mais cette loi fera l'objet de nombreuses critiques doctrinales notamment en raison de ses carences qui la rendent très souvent inapte à résoudre les difficultés qui se posent dans les associations. En effet la loi de 1901, Loi de liberté a laissé une très grande marge aux sociétaires dans l'élaboration des statuts, véritable acte juridique fondateur du groupement. Aussi, qu'il s'agisse des rapports entre sociétaires ou avec les tiers, les statuts sont censés régir le groupement. Situation avantageuse pour les sociétaires car expression même de la loi de l'autonomie mais qui peut s'avérer dangereuse car quid lorsque les statuts n'envisagent pas une situation ?
A cause de ce danger permanent, on pourrait peut-être considérer que la loi de 1901 ne crée pas un véritable droit des associations mais uniquement la liberté d'association. Au demeurant elle a créé un véritable groupement devant fonctionner et pouvant revêtir la personnalité juridique.
C'est ainsi que malgré le silence de la Loi de 1901 et des statuts, les juges n'ont pas violé l'Art 4 du Code civil en refusant de statuer et ont simplement, par un raisonnement « a pari » appliqué à des associations les solutions retenues pour les sociétés. Il faut tout de même préciser qu'ils n'avaient guère d'autre choix. En effet, aujourd'hui le référé législatif n'existe plus ; il n'existe plus de doute quant au pouvoir d'interprétation du juge ; la jurisprudence en tant que source du droit ne fait plus l'objet d'aucune contestation.
Aussi dans un des premiers arrêts (Civ.1re 11 déc. 1973) les juges ont transposé la règle de la survie de la personnalité morale pour les besoins de la liquidation à une association.
Le procédé paraît simple tant la tentation est grande de faire du droit des sociétés, droit nettement plus complet, un droit commun à tous les groupements de personnes. La jurisprudence est assez fournie en la matière, et on a toujours pensé qu'il s'agissait de solutions ponctuelles ne pouvant constituer un droit normatif. Toutefois un arrêt récent de la Cour de Cassation du 3 mai 2006, rendu à propos de l'étendue des pouvoirs du président d'une association, permet de croire le contraire. En effet les juges suprêmes affirment dans l'un des attendus que : « Les dispositions du Code civil et à défaut du Code de commerce, régissant les sociétés présentent une vocation subsidiaire d'application » aux associations. Voilà un attendu bien général, qui pourrait donner matière à réflexion, les juges suprêmes ne nous donnant aucune indication quant à la technique de la transposition. Un auteur commentant cet arrêt s'est d'ailleurs demandé si le canevas indiqué par cet attendu ne serait pas de rechercher d'abord dans les dispositions générales relatives aux sociétés, puis celles relatives aux sociétés civiles et enfin celles relatives aux différentes sociétés commerciales. Si tel est le cas nous entrevoyons déjà la pénibilité du travail qui pourrait être celui des juges saisis par des associations. Au-delà de cette difficulté, douter de l'efficacité d'une telle transposition face aux problèmes immenses créés par les carences de la Loi de 1901 ne serait peut-être pas malvenu.
Cette étude présente ainsi, des intérêts théorique et pratique.
D'un point de vue théorique, il s'agit entre autre de constater la subsistance du débat ancien de l'application de la loi par le juge et de mesurer ainsi l'étendue des pouvoirs dont il dispose.
Car, si les juges par un raisonnement analogique dont on connaît les origines , ont réussi à résoudre un certain nombre difficultés qui se posaient dans les associations ; il n'en demeure pas moins que leur interprétation reste fortement encadrée par des préceptes légalistes résistants.
D'un point de vue pratique, le rôle des associations dans la vie politique et sociale a fortement accru : des associations caritatives, cultuelles, intellectuelles aux associations de consommateurs, raciales, de défense des sans-papiers. Les associations sont partout et naissent chaque jour. Le phénomène est tel qu'un auteur leur a aujourd'hui reconnu un « statut de nouveau tribun ». Il a donc été question pour les juges de transposer un droit des sociétés excessif à des associations vivantes, mouvantes, véritables actrices de la vie sociale.
Dès lors comment s'effectue cette transposition jurisprudentielle ? Quelle en est la portée ?
L'appréciation de cette pratique jurisprudentielle laisse entrevoir de l'ombre et de la lumière. En effet si de lege lata elle nous parait limitée (Titre I) elle pose les jalons, par les règles qui sont transposées, des voies de rapprochement possible entre tous les groupements de personnes, de lege ferenda (Titre II).
Afin de ne pas noyer le lecteur sous un trop plein d'informations, et de respecter les limites que cette forme de recherche impose, il convient de préciser que par droit des associations nous entendrons uniquement la loi de 1901. Car si elle n'en constitue pas l'unique source législative , elle reste néanmoins le principal référent de l'association de droit commun.
[...] Il ne peut profiter d'une question particulière pour réglementer, un domaine en l'occurrence, celui des associations. Toutefois, le juge peut lorsque les circonstances l'exigent statuer au-delà de ce qui lui a été demandé en soulevant d'office certains moyens mais il reste lié par les prétentions des parties : Les limites à l'interprétation du juge L'interprétation du juge est limitée pour deux raisons fondamentales : D'une part, le juge ne peut disposer de façon générale, par voie de règlements seule l'interprétation par voie de doctrine est autorisée au sein de laquelle on retrouve le raisonnement par analogie. [...]
[...] D'après M. Guyon, le silence de la loi de 1901 serait justifié. Elle est la conséquence du caractère contractuel de l'association, qui comme tous les contrats, repose à titre principal sur la volonté librement exprimée par les parties C'est à cause de cette liberté qu'on a considéré que la loi de 1901 est en réalité une loi de confiance. Cette délégation légale faite au profit des sociétaires va être à l'origine de profondes perturbations à l'intérieur du groupement ainsi créé. [...]
[...] Sociétés oct.- déc Rev. Sociétés p ;318, note Y. Guyon En effet, l'art. 1er de la loi de 1901 la qualifie de convention qui est régie quant à sa validité par les principes généraux du droit applicables aux contrats et obligations Civ. 1ère juin 2002, D. p note Y. Chartier Rép. Min. 19256, JCP 2000, p DOMAT (Lois civiles, Civ. [...]
[...] Réunies mars 1914, D I note L.S., S I - Cass. Civ. 1re nov RTDcom p.413, no 18 obs. E Alfandari. - Cass. Civ. 1re nov.1994, Rev. sociétés 1994, p.318, note Y. Guyon. [...]
[...] Afin d'assurer la promotion de ce centre, le délégué de gestion de la société engagea une campagne de publicité. Par ailleurs, les commerçants prenant à bail un local situé par le centre avaient souscrit une clause essentielle aux termes de laquelle ils adhéraient à l'Association des Commerçants du Centre (A.C.C.) dont l'objet était de favoriser la publicité des commerçants dudit centre. La SCC envoya alors à L'ACC ses factures, et celle-ci régla seulement deux d'entre elles en estimant qu'elle n'était pas encore déclarée au moment de la passation du contrat de publicité. [...]
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