Une partie de la doctrine tend à différencier la notion de « dommage » de celle de « préjudice ». La première est souvent définie par la doctrine comme « la lésion subie à proprement parler, qui s'apprécie au siège de cette lésion » tandis que le préjudice est généralement perçu comme « la conséquence de la lésion, ou la suite du dommage ». Dommage ou préjudice sont, selon J.C. Carbonnier, des synonymes. Plusieurs catégories de dommages existent. Tout d'abord, il y a le dommage matériel qui résulte d'une atteinte au patrimoine de la victime. Il se caractérise soit par une perte subie soit par un gain manqué. Il existe aussi le dommage corporel qui résulte quant à lui, d'une atteinte directe à la personne, c'est-à-dire de blessures plus ou moins graves et même de mort. Enfin, un troisième dommage existe, le dommage moral auquel nous nous attacherons plus particulièrement. Ce dernier se définit comme un mal, une souffrance qui résulte d'une atteinte à un droit de la personnalité ou d'une atteinte physique. Il peut aussi s'agir d'une souffrance éprouvée par les proches de la victime. Dans ce cas, on parle de préjudice moral par ricochet.
En vertu de l'article 1382 du Code civil, « tout fait quelconque de l'homme qui cause à autrui un dommage oblige, celui par la faute duquel il est arrivé, à le réparer ». De fait, pour avoir intérêt à intenter une action en responsabilité civile, il faut avoir subi un dommage. On en conclut donc que dès lors qu'un dommage a été commis, la victime peut se voir indemnisée, du fait du préjudice qu'elle a subi. Pour ce qui est du dommage matériel, la réparation ne fait aucun doute. En revanche pour ce qui est du dommage moral, la question est plus difficile d'autant plus que le Code civil ne mentionne rien sur cela. Historiquement, le droit romain admettait déjà la réparation du préjudice moral dans un grand nombre de domaines. Cependant, une fausse interprétation des textes du droit romain accrédita dans notre ancien droit l'opinion que le dommage moral ne devait pas être réparé en matière de responsabilité contractuelle. Aussi, en doctrine notamment, l'indemnisation du préjudice moral a donné lieu à discussion. Certains y sont défavorables et soutiennent que le dommage est insusceptible de réparation en nature ou en argent car ce dommage est extrapatrimonial. De plus, admettre cette indemnisation signifierait que l'on peut monnayer les sentiments humains. D'autres auteurs avaient avancé la thèse que l'indemnisation du dommage moral était principalement fait dans le but de punir l'auteur du dommage, c'est-à-dire de ne pas laisser sans sanction la faute commise par lui. L'inconvénient de cette thèse est que la réparation ne peut intervenir que lorsqu'il y a une responsabilité pour faute de l'auteur du dommage.
Concrètement, la réparation du dommage moral a été retenue très tôt par la jurisprudence même si cette indemnisation pose des problèmes très spécifiques. L'idée reste celle que l'argent est une consolation à la douleur. Cette possible indemnisation a été consacrée et résulte notamment de l'application de la loi du 5 juillet 1985 même si cette réparation a été reconnue dès le XIXème siècle.
Ainsi, il se pose la question de savoir en quoi ce dommage moral est-il réparable ? Ceci est une question primordiale dans la société actuelle, société qui évolue, tout comme l'indemnisation de ce type de dommage chez la jurisprudence.
De fait, même si la réparation du préjudice moral a été reconnue et consacrée par le droit positif (I), il ne faut pas oublier que ce n'est pas sans limite ni critique (II).
[...] Tout ou presque est aujourd'hui indemnisé. Même la perte d'un animal peut être, selon quelques décisions jurisprudentielles, réparée. Une des premières reconnaissances de l'indemnisation remonte à un arrêt du 15 juin 1833 dans lequel les Chambres réunies ont affirmé que la seule difficulté d'apprécier le quantum d'un dommage reconnu en principe ne permet pas de rejeter l'action de la victime. De fait, à partir de cet arrêt même en étant difficilement évaluable, le dommage moral fut indemnisé d'une part, car les dommages et intérêts visent moins à effacer le dommage qu'à compenser l'irréparable, et d'autre part, car réparer le préjudice moral permet d'éviter de laisser sans sanction le fautif dès lors qu'il n'y a pas de dommage matériel. [...]
[...] De fait, l'évaluation faite par le juge ne peut être qu'arbitraire. Il résulte alors de cette impossibilité d'appliquer ce principe que la réparation du dommage moral trouve sa meilleure justification dans l'idée de peine privée. Cette idée conduit généralement à des indemnités élevées, notamment pour la réparation de l'atteinte aux sentiments d'affection. Mais il peut aussi arriver que la victime soit dissuadée à monnayer sa souffrance. Par exemple, celle qui résulte d'une atteinte portée à son honneur. Ce que souhaite la victime, c'est tout simplement une condamnation exemplaire révélant aux yeux de l'opinion que l'auteur du dommage a anormalement agi. [...]
[...] Aujourd'hui donc la jurisprudence, au grand dam de la majorité de la doctrine, est de plus en plus favorable à l'indemnisation de la victime par ricochet. Une demande de cette dernière signifie donc que la créance de dommages et intérêts est transmissible aux héritiers. Comme pour ce qui concerne le cas de la victime immédiate, les juridictions administratives ont mis longtemps à admettre qu'un proche de la victime directe pouvait demander une réparation du préjudice moral. Ce n'est que par un arrêt du 29 mars 2000 que le Conseil d'Etat s'est rallié à la position de la Cour de cassation. [...]
[...] Les souffrances endurées par la victime englobent toutes les souffrances morales et physiques subies par la victime. Quant au préjudice esthétique, il concerne l'ensemble des souffrances morales éprouvées par la personne victime atteinte en apparence. Le préjudice moral par ricochet La perte d'un être cher autrement appelé le préjudice d'affection est le dommage que l'on ressent du fait de la mort d'un être cher ou même à la vue de ses souffrances ou infirmités. La première fois qu'un tel préjudice par ricochet a été retenu, ce fut à la fin du XIXe siècle par la chambre criminelle de la Cour de cassation en 1877. [...]
[...] Jourdain - Droit civil : les obligations, J.-L. Aubert, J. Flour - Droit civil : Les Obligations, F. Terré, Y. Lequette, P. Simler - Droit civil, A. [...]
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