En matière de responsabilité contractuelle, il est reconnu par la jurisprudence qu'entre le médecin et son patient s'établit un contrat. Aussi, la responsabilité du médecin peut être engagée sur ce fondement lorsque celui-ci faillit aux obligations qui lui incombent. Dans le commentaire qui nous est demandé de l'arrêt dit Perruche du 17 novembre 2000, cette question est élargie puisqu'il s'agit d'analyser l'action en réparation de l'enfant né handicapé.
Cet arrêt a été rendu en Assemblée plénière par la Cour de cassation. Il apparaît dans l'exposé des faits qu'une femme enceinte croyant être atteinte par la rubéole consulte son médecin et lui fait part de son désir de recourir à une interruption volontaire de grossesse (IVG) en cas de confirmation de ses symptômes du fait des risques que cette affection fait peser sur le fœtus. Après un test réalisé par un laboratoire et concluant que la femme est immunisée contre cette maladie et l'analyse du médecin allant dans le sens des résultats, celle-ci ne réalise donc pas l'IVG. L'enfant né se trouve affecté de graves séquelles consécutives à une atteinte in utero par la rubéole. Les époux, parents de l'enfant intentent donc une action en leur nom et au nom de leur enfant.
Le 17 décembre 1993, la cour d'appel de renvoi juge que le médecin et le laboratoire ont commis des fautes contractuelles et dès lors que le préjudice subi par la mère devait être réparé. Néanmoins, la cour d'appel n'établit pas un lien de causalité entre les fautes du médecin et du laboratoire et le préjudice de l'enfant ne lui ouvrant donc pas la possibilité d'obtenir réparation.
[...] Le raisonnement de la Cour de cassation est simple : sans faute du médecin et du laboratoire, il y aurait eu IVG et l'enfant ne serait pas né, il ne serait donc pas handicapé. C'est ce que défend Jourdain pour qui sans faute, le handicap aurait pu être évité. Admettre ce raisonnement c'est également considérer que la mort eût été moins préjudiciable que la vie. La Cour de cassation ne l'explicite pas et il est certain que cet arrêt s'attache à réparer le préjudice de l'enfant. Ainsi, le raisonnement utilisé par la Cour de cassation n'a pour vocation qu'à permettre une réparation. [...]
[...] Il n'y a donc pas de lien de causalité selon les juges du fond et la conséquence juridique immédiate est le rejet de l'indemnisation de l'enfant, la solution de la cour d'appel étant que la cause (une et unique) du handicap de l'enfant est la rubéole contractée par la mère et non la faute du médecin et du laboratoire. En outre, les juges du fond soutiennent que l'enfant ne peut se prévaloir du fait que sa mère n'a pas procédé à une IVG. Par cette attitude, les juges du fond se conforment à la jurisprudence judiciaire antérieure qui refusait d'accueillir ce type d'action pour cette raison mais aussi pour des raisons d'éthique (notamment civ. 1ère 25 juin 1991). Autrement dit, la cour d'appel va dans le sens de la jurisprudence. [...]
[...] Le fait que les parents puissent être indemnisés n'est pas le cœur de cet arrêt, c'est bien la consécration par la plus Haute juridiction, réunie en Assemblée plénière, du droit pour l'enfant handicapé d'être indemnisé de son propre préjudice. Tout le cœur du problème dans cet arrêt est de bien comprendre que la Cour de cassation, par delà la reconnaissance d'un lien de causalité reconnaît l'existence non seulement d'un préjudice mais d'un préjudice d'être en vie ce qui témoigne d'une prise de position pour le moins novatrice. [...]
[...] Commentaire d'arrêt: Cour de cassation, Assemblée plénière du 7 novembre 2000, "Perruche" En matière de responsabilité contractuelle, il est reconnu par la jurisprudence qu'entre le médecin et son patient s'établit un contrat. Aussi, la responsabilité du médecin peut être engagée sur ce fondement lorsque celui-ci faillit aux obligations qui lui incombent. Dans le commentaire qui nous est demandé de l'arrêt dit Perruche du 17 novembre 2000, cette question est élargie puisqu'il s'agit d'analyser l'action en réparation de l'enfant né handicapé. [...]
[...] La loi dispose en outre : la compensation du handicap relève de la solidarité nationale Il est donc clair que les praticiens ne sauraient être responsables du préjudice, la compensation à l'impossibilité pour l'enfant d'obtenir réparation par voie judiciaire résidant dans la solidarité nationale. La disposition visant à une réparation via la solidarité nationale est restée lettre morte. On retiendra de cette loi anti Perruche l'impossibilité pour l'enfant d'obtenir réparation de son préjudice personnel. La jurisprudence Perruche n'a donc plus court et ses défenseurs qui voyaient dans celle-ci la possibilité d'obtenir l'indemnisation du préjudice d'être né handicapé se sont portés devant la Cour européenne des droits de l'homme afin d'empêcher l'effet rétroactif de la loi de 2002 aux jugements rendus antérieurement. [...]
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