Le simple fait d'être illettré ou incapable ne saurait être un élément de nature à empêcher de pouvoir disposer de ses biens. Toutefois, le testament des infirmes et des illettrés pose un délicat problème. En effet, le testament pose, pour s'assurer de la manifestation non équivoque de la volonté du testateur, des conditions de forme obligatoires, à peine de nullité de l'acte. Toutefois, l'absence de pleines capacités ne dispense pas des formes requises, car si la forme est destinée à protéger le disposant, à plus forte raison est-elle indispensable lorsqu'il s'agit de s'assurer de la volonté régulièrement manifestée d'une personne dont les capacités sont amoindries et qui est de la sorte affaiblie.
L'intelligence des signes ne se confond pas avec l'intention libérale du testateur, qui est une question de fond. L'intelligence des signes est une exigence formelle, elle est une composante de l'existence de l'écriture elle-même, sa composante intellectuelle.
[...] Ainsi, pour certains, le testament à main guidée ne serait valable que si la graphie de l'acte identifie son auteur, il serait nul lorsque les mots et les lettres tracés à l'aide de la main guidance ne portent plus la marque personnelle du testateur, même si ce dernier a eu conscience des signes tracés. (Cass. 1re civ avr Eliot). Cependant, une autre analyse fait valoir que la validité formelle du testament à main guidée n'est pas subordonnée à la reconnaissance du graphisme personnel du testateur. En effet, estime-t-on, par-delà l'état de l'écriture guidée, il convient de s'en tenir à l'intelligence des signes tracés par le testateur et à sa volonté libérale. [...]
[...] Pour ce qui est désormais de la volonté non équivoque de disposer d'un illettré complet, notons que la jurisprudence n'admettant pas la forme olographe, il faudra et nous l'avons déjà dit, avoir recours à une autre forme testamentaire, bien plus encline à confirmer le but de sa démarche. Finalement, s'il est clairement établi que la volonté de tester est une exigence impérative du droit testamentaire, notons en outre que sa protection s'effectue principalement au regard du formalisme qui encadre l'élaboration des dispositions pour cause de mort. Pourtant, l'infirmité ou l'illettrisme sont des circonstances qui parfois, peuvent nous amener à nous interroger sur les parades des testateurs, mises en œuvre pour pallier leur incapacité. Dans quelle mesure le formalisme testamentaire est-il alors respecté ? (II). [...]
[...] Ainsi, lorsque l'on parle d'infirmes ou d'illettrés en matière testamentaire, il faut distinguer selon que la circonstance ait été ou non de nature à faire valoir une absence de volonté marquée de la part du testateur Si ce n'est pas le cas, la disposition doit être jugée valable. Dans le cas contraire, elle est nulle. En outre, une fois que la volonté est attestée, peu important que le disposant soit pleinement valide ou infirme, lettré ou illettré, il convient de vérifier la validité du testament au regard des conditions de forme qu'il impose (II). [...]
[...] Le problème peut en effet être masqué, soit sous le couvert de l'exigence d'une graphie personnelle du testateur (dans la mesure où celle-ci est estimée nécessaire, il est évident que l'aide matérielle ne peut être que limitée), soit encore par l'expression de main passive Le plus souvent, elle s'entend d'une passivité purement intellectuelle ; ainsi quand il est dit que le testament olographe à main guidée est nul lorsque le testateur n'a été qu'un instrument passif incapable de comprendre la valeur des caractères qu'il traçait. Or le problème de l'étendue de l'aide matérielle se pose très clairement non pas en cas de passivité intellectuelle, mais au contraire, dans l'hypothèse d'une passivité exclusivement physique, par exemple l'infirme parfaitement lucide, mais dont la main est entièrement inerte, c'est-à-dire dépourvue de toute motricité nerveuse. Le testament olographe en ce cas est-il valable ou nul ? Jusqu'où peut aller l'aide matérielle du tiers ? Peut-elle être totale ? [...]
[...] La forme olographe est dans ce cas impossible. Cependant, le recours au testament par acte public pourrait permettre à la personne totalement illettrée, de faire valoir ses dernières volontés, en confiant à un notaire, le soin de les rédiger et à charge pour ce dernier de lui lire ce qu'il a écrit. A propos des demi-illettrés en revanche, dans un arrêt du 6 octobre 1959, Clasquin, la première chambre civile de la Cour de cassation a approuvé un arrêt de la Cour d'appel d'Aix du 19 mars qui avait considéré valable le testament d'une personne qui ne savait pas écrire, mais savait lire. [...]
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