En droit romain, le terme de servitude s'appliquait à l'usufruit, l'usage et l'habitation, sous le vocable de « servitudes personnelles ». Il s'appliquait aussi aux services fonciers établis entre deux fonds qui constituaient les « servitudes réelles ». La dénomination de servitude ne désigne plus désormais que cette dernière catégorie. Ainsi l'article 637 du c.civ dispose-t-il qu' « une servitude est une charge imposée sur un héritage pour l'usage et l'utilité d'un héritage appartenant à un autre propriétaire ».
Aussi les servitudes ont donc manifestement un caractère réel dans la mesure où elles grèvent le fonds servant (celui qui la supporte) et profitent au fonds dominant (celui qui en bénéficie).
Etant imposées sur un « héritage », elles ont nécessairement une assiette corporelle, elles sont donc toujours immobilières. Plus précisément, les servitudes ne peuvent porter que sur des immeubles par nature (encore que les arbres soient exclus de leur assiette : Req. 6 avril 1841) du domaine privé. En effet, aucune servitude ne peut, en principe, valablement être constituée sur le domaine public.
Pourtant, la jurisprudence civile considère que l'institution de servitudes du fait de l'homme sur le domaine public est possible quand elles ne sont pas incompatibles avec l'affectation de la dépendance domaniale sur laquelle elles s'exercent (par ex : Civ, 12 mai 1932), mais la jurisprudence administrative ne l'admet, quant à elle, que pour les servitudes établies avant l'incorporation des biens considérés au domaine public (par ex : CE 11 mai 1959 : DAUPHIN), et non pour les servitudes constituées après (par ex : CE 10 décembre 1954 : Commune de Champigny). Pour autant, nous laisserons dans cet exposé de côté cette divergence pour nous contenter d'étudier les servitudes en tant que charge imposée à un fonds dit servant, et supportant donc une servitude passive, au profit d'un autre fonds, appelé dominant qui, lui, bénéficie d'une servitude active. Ainsi, selon le fonds considéré, la servitude sera active ou passive, et son attachement aux fonds servant et dominant implique qu'elle se transmette passivement et activement avec les fonds concernés, à leurs propriétaires successifs.
Dans le cadre de la vente d'un immeuble, il est indispensable pour en apprécier la valeur et donc en fixer le prix, de déterminer s'il existe des charges qui le grèvent, ou au contraire, s'il en bénéficie au détriment d'un fonds voisin. Cette détermination pourra être aisée s'il existe des ouvrages ou des éléments matérialisés qui indiquent la présence d'une servitude, tels qu'une porte, un aqueduc. La servitude sera alors dite apparente, et s'oppose, dans la classification de l'Ancien droit retenu par l'article 689 du c.civ aux servitudes non apparentes, qui, elles, n'ont pas de signe extérieur de leur existence, comme par exemple la prohibition de construire sur un terrain (servitude non aedificandi).
Le Code civil distingue d'autre part dans son article 688 les servitudes continues et les servitudes discontinues : « les servitudes continues sont celles dont l'usage est ou peut être continuel, sans avoir besoin du fait actuel de l'homme » (par ex : conduites d'eau, égouts, vues…), alors que les servitudes discontinues « sont celles qui ont besoin du fait actuel de l'homme pour être exercées » (droit de passage, puisage, pacage…), une servitude est donc discontinue quand elle ne peut s'exercer que par l'intervention de l'homme, et continue quand elle s'exerce sans intervention de l'homme.
Ainsi, en fonction des différentes combinaisons possibles de ces classifications, le rôle du notaire dans une vente immobilière ne sera pas le même, puisqu'en tout état de cause, c'est un devoir du vendeur que d'informer l'acquéreur des servitudes qui existent sur le bien qu'il entend vendre, et il appartient donc au notaire, dans le cadre de son devoir de conseil, d'éclairer utilement le vendeur et l'acquéreur sur la portée de l'information à fournir, et sur les conséquences éventuellement financières qui peuvent en découler afin d'assurer au mieux l'équilibre du contrat dont il est garant.
Les servitudes ont été conçues comme un moyen de régler les relations de voisinage, dans un intérêt économique. Ainsi, cette organisation peut résulter de la volonté même des propriétaires et de leur faculté de disposer de leurs biens comme ils l'entendent, et l'on parle alors des servitudes du fait de l'homme (I), mais le code civil a également organisé les rapports de voisinage en les soumettant à de nombreuses servitudes établies par la loi, qualifiées de servitudes naturelles ou légales (II).
[...] C'est le seul mode de création des servitudes non apparentes. C'est sur ces servitudes que le travail du notaire est le plus grand puisqu'elles sont quasiment obligatoirement écrites et publiées, et, si elles ne le sont pas, la difficulté de les prouver pourra jouer en faveur du notaire qui aura omis de les mentionner ou de les rechercher. L'acquisition des servitudes par prescription Comme les autres droits réels immobiliers, les servitudes du fait de l'homme peuvent s'acquérir par prescription. Mais seules les servitudes continues et apparentes sont susceptibles de possession et peuvent donc être acquises ainsi, les servitudes non apparentes et les servitudes discontinues ne peuvent s'acquérir par la possession même immémoriale article 691 c.civ. [...]
[...] Cependant seules sont annexées au PLU les servitudes figurant sur une liste établie par décret. Il convient donc d'interroger le vendeur en lui rappelant l'obligation qui pèse sur lui de déclarer à son acquéreur l'existence des servitudes qui peuvent limiter la libre circulation ou les modifications du bien. Cette obligation lui pèse en effet à double titre : en vertu de la jurisprudence qui considère que sont connues de lui les servitudes qui sont la conséquence normale de la nature et de la situation de l'immeuble (cass. [...]
[...] Il découle de plus de l'article 637 du c.civ impose que les servitudes ne peuvent porter que sur des fonds distincts, appartenant à deux ou plusieurs propriétaires. Ainsi un indivisaire ne peut être titulaire d'une servitude sur le fonds indivis (Civ 3ème, 6/02/1973). L'absence de dualité de fonds, dans une copropriété, entre les parties communes et les parties privatives, paraît également exclure toutes servitude entre elles. En effet, dans une copropriété les parties privatives et communes forment, dans la théorie générale, un ensemble indissociable puisque chaque copropriétaire est à la fois propriétaire exclusif de sa partie privative et propriétaire indivis des parties communes. [...]
[...] Comme tout droit réel, les servitudes peuvent être établies par des actes juridiques unilatéraux ou par une convention. Ce sont des actes de disposition puisqu'il s'agit, pour le propriétaire du fonds servant d'aliéner certaines de ces prérogatives de propriété pour l'usage ou l'utilité du fonds dominant. Un simple acte volontaire suffit pour établir un droit de servitude, même non écrit s'il n'est pas équivoque. Mais pour la preuve de ce droit, un acte authentique présente un véritable intérêt : s'agissant d'un acte constitutif d'un droit réel immobilier, il y a lieu de le publier au bureau des hypothèques pour en assurer l'opposabilité aux tiers. [...]
[...] La prescription extinctive s'applique à toutes les servitudes du fait de l'homme, qu'elles soient continues ou discontinues, apparentes ou non apparentes. Et cette prescription joue quelle que soit la cause du non- usage prolongé (force majeure, abstention volontaire du propriétaire du fonds dominant, ou même fait du propriétaire du fonds servant), en revanche, le point de départ du délai de prescription diffère selon la nature de la servitude. Pour les servitudes discontinues, qui supposent l'accomplissement d'actes matériels, les 30 ans commencent à courir du jour où l'on a cessé d'en jouir, c'est-à-dire à compter du dernier acte d'exercice de la servitude, la preuve en est régie par l'article 1315 c.civ (le propriétaire du fonds dominant doit prouver qu'elle a été utilisée dans le délai de 30 ans)). [...]
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