La cause est « une des notions les plus incertaines du droit civil » en raison de la controverse qui existe à la fois sur sa définition et sur son rôle. Le rapport du groupe de travail de la Cour de cassation sur l'avant-projet de réforme du droit des obligations et de la prescription datant du 15 juin 2007 souligne d'ailleurs que l'idée de cause est perçue dès 1891 par Fuzier-Herman dans son code civil annoté comme une « complication inutile et une source de confusion ». Depuis le début du XXème siècle et le célèbre pamphlet anticausaliste de Planiol, le caractère faux, inutile, incertain, ambigu et obscur du concept de cause a été largement dénoncé par la doctrine.
Présente dans quatre articles du Code civil, ce dernier n'en donne cependant aucune définition. L'article 1108 du Code civil fait ainsi d'« une cause licite dans l'obligation » une des « quatre conditions (…) essentielles pour la validité d'une convention » tandis que les articles 1131 à 1133 du Code civil fixent le régime de la cause. La définition alors purement doctrinale propose une approche dualiste de la cause. La cause renvoie à la raison pour laquelle les parties ont contracté. Il s'agit d'identifier la réponse à la question du but pour lequel la convention a été formée. La cause pour laquelle on s'oblige peut d'une part être la cause immédiate (causa proxima), dite objective ou abstraite, elle correspond à la cause contrepartie. La cause du contrat peut d'autre par recouper des raisons finales plus éloignées (causa remotae) et la cause mobile est alors subjective. Dans un contrat de vente d'un bien immobilier, la cause objective s'apparente à l'achat du bien tandis que la cause subjective peut aussi bien être l'habitation privée ou l'ouverture d'un commerce. Objective ou subjective, la cause s'apparente dans le premier cas au contrat et dans le second cas, la cause renvoie à l'obligation.
L'étude du rôle de la cause dans le droit des contrats dépend grandement de sa définition et de l'approche choisie pour appréhender ce concept. En outre, la pérennité de la théorie de la cause en droit français ne semble pas assurée. En effet, en réponse à l'avant-projet de réforme du droit des obligations de Pierre Catala qui consacre à la cause dix articles, la Cour de cassation aborde la question du « maintien discutable de la notion de cause ». La cause s'apparenterait à une terminologie abstraite et vague et constituerait à ce titre une source d'insécurité juridique dénoncée par la Commission européenne et le Parlement européen. De manière similaire, la grande majorité des Etats européens et les principes européens du droit des contrats ne reconnaissent pas la cause. Pour ces différentes raisons, l'abandon de la cause du droit français des contrats est préconisé.
Renoncer à la cause, facteur d'insécurité juridique, ne peut être pertinent qu'au regard des fonctions que cette notion remplies en droit français des contrats. La cause, fausse et inutile pour les anticausalistes de la fin du XIXème siècle, ne pourrait-elle pas s'avérer être un instrument protéiforme intéressant du fait de sa conception dualiste et malgré son caractère jugé incertain ?
L'approche dualiste de la cause permet en effet d'assurer à la fois une protection de l'intérêt individuel (I) et de l'intérêt collectif, c'est-à-dire de l'ordre social (II).
[...] D'autre part, l'absence ou l'extinction de l'élément déterminant le consentement et identifiée comme la cause par l'économie du contrat permet une substitution à la théorie de l'imprévision. La protection de l'intérêt individuel est, par ailleurs, approfondie par une appréciation des motifs déterminants des parties dans le contrôle de l'existence de la cause. De la sorte, les clauses contractuelles perturbant l'équilibre envisagé par les parties sont réputées nulles et non écrites. L'article 1131 du Code civil prend, en droit commun, le relais de l'article L 132-1 du Code de la consommation. [...]
[...] - Alain Sériaux, Manuel de droit des obligations, Puf Droit p à 61. Article : - Xavier Lagarde, Sur l'utilité de la théorie de la cause, Recueil Dalloz 2007, p Rapports : - Collectif, sous la direction de Pierre Catala, Rapport sur l'avant-projet de réforme du droit des obligations (Articles 1101 à 1386 du Code civil) et du droit de la prescription (Articles 2234 à 2281 du Code civil), Paris, La Documentation française articles 1124 à 1126-1. http://www.ladocumentationfrancaise.fr/rapports- publics/054000622/index.shtml - Collectif, Rapport du groupe de travail de la Cour de cassation Sur l'avant-projet de réforme du droit des obligations et de la prescription 15 juin 2007, paragraphes 26 à 28 : http://www.courdecassation.fr/jurisprudence_publications_documentation_2/aut res_publications_discours_2039/discours_2202/2007_2271/groupe_travail_10699. [...]
[...] La théorie de la cause assure ainsi un rôle de protection individuelle, c'est un instrument d'équité Deux des rôles de la cause objective : vice du consentement et imprévision La cause, considérée comme la contrepartie objective de l'obligation, est présumée exister. Le défaut de cause constitue alors une source de nullité d'un contrat au titre, en pratique, d'un vice du consentement. La preuve de l'absence de cause peut être apportée par tous les moyens. Dans un acte à titre onéreux, l'absence de contrepartie, pourtant attendue, relève en effet de l'erreur ou de la contrainte lors de la conclusion du contrat. [...]
[...] De la sorte, la cause, alors appréhendée selon une approche objective, remplit différents rôles : il s'agit d'une part de prolonger la théorie des vices du consentement et de cantonner la théorie de l'imprévision Un développement jurisprudentiel récent d'autre part, permis d'étendre la théorie des clauses abusives du droit de la consommation au droit commun des contrats A. La théorie classique, une approche objective à la notion de cause 1. La théorie classique : la cause abstraite et objective La théorie classique développée par Jean Domat au XVIIes siècle et reprise par Pothier au XVIIIe siècle inspire les rédacteurs du Code civil. L'existence de la cause de l'obligation est appréciée de manière objective. La cause correspond alors au but spécifique recherché par les parties qui est propre à chaque type de contrat. [...]
[...] La cause et la théorie des clauses abusives La théorie des clauses abusives n'appartient pas au droit commun des contrats. Les clauses abusives, définies par l'article L 132-1 du Code de la consommation comme ayant pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat peuvent ainsi être éradiquées, en droit de la consommation, lorsque le rapport contractuel met en jeu un profane et un professionnel. [...]
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