Dès lors que la capacité délictuelle devient de plus en plus englobante, en raison de considérations d'équité, les causes subjectives de non-imputabilité disparaissent du droit de la responsabilité civile pour laisser place à une responsabilité pour faute objective voire selon certains auteurs, une responsabilité sans faute
[...] Le fait est que le mot responsabilité ne figure pas dans l'article 489-2. En conséquence nombreux sont ceux qui n'ont souhaité voir dans la disposition légale qu'une simple "obligation à réparation" fondée sur le rétablissement de l'équilibre des droits des victimes et non sur une véritable responsabilité. Par ailleurs, pour ceux qui pensent également que l'aliéné ne peut commettre de faute mais considèrent en revanche que le législateur a consacré une véritable responsabilité, celle-ci revient à un nouveau cas de responsabilité objective, une responsabilité sans faute selon Jean Carbonnier. [...]
[...] Le partage de responsabilité qu'aurait neutralisé son incapacité délictuelle et donc la non imputabilité de sa faute, redevient possible et l'auteur du dommage en profitera par un bienfait du hasard. Même sur sa position de principe, la Cour de Cassation n'évite pas le reproche d'aller contre le sens commun en uniformisant la capacité délictuelle tout au long de la minorité. Vers le haut c'est nier l'éducation et l'école; vers le bas c'est nier l'image d'innocence qui s'attache au très jeune enfant. [...]
[...] Cependant, dans les situations où l'infans n'était plus auteur mais victime du dommage, la jurisprudence se contentait de l'établissement de l'existence d'un discernement suffisant chez l'enfant pour que puisse être laissée à sa charge une partie du préjudice, conséquence de son comportement fautif (Cass, 2°Civ décembre 1974). La contradiction devenait intenable. Revirement jurisprudentiel par les arrêts du 9 mai 1984 :l'infans victime et auteur de dommage. Par cinq arrêts rendus le 9 mai 1984 dans des espèces où étaient en question la responsabilité d'un infans, l'assemblée plénière a réalisé un retentissant revirement de jurisprudence en proclamant le principe de la responsabilité civile de plein droit de cinq mineurs âgés respectivement au moment de l'acte de et 13ans, pour les dommages causés par leurs faits. [...]
[...] La jurisprudence n'a pas encore eu l'occasion de se prononcer de façon certaine sur cette question. En revanche, la question de l'application du texte au mineur dément fut rapidement et définitivement tranchée par la Cour de Cassation. Dans un arrêt de sa chambre Civile du 20 juillet 1976, la Haute Juridiction rejeta un pourvoi formé contre un arrêt qui retenait la responsabilité d'un mineur de 17 ans qui avait agi en état de démence, en application de l'article 489-2. Plusieurs enseignements peuvent être tirés sur la portée de la jurisprudence qu'a entendu promouvoir la Cour de Cassation, mais aussi des controverses doctrinales : Il semble que la haute juridiction a entendu engager la situation de l'aliéné sur celle de l'homme "normal" en matière de responsabilité civile. [...]
[...] Ainsi du capitaine de navire qui tira sur un matelot dans un accès de démence provoqué par l'abus d'alcool mais résultant avant tout des excès de boisson antérieurs civ, Le Havre février 1873, "La Mathilde") Par ailleurs, après la découverte d'un principe général de la responsabilité du fait des choses, les tribunaux ont eu l'idée d'appliquer l'article 1384 alinéa à la responsabilité du dément. Le caractère objectif de cette responsabilité devait en effet exclure la condition d'imputabilité morale exigée dans les responsabilités personnelles subjectives. La Cour de Cassation en vint ainsi à admettre dans l'affaire Trichard que le conducteur d'une automobile pris d'une crise d'épilepsie, et relaxé au pénal en raison de son état de démence, fut condamné à indemniser sa victime sur la base de l'article 1384 al1 (CCass, civ décembre 1964). [...]
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