En poussant un propriétaire de bar à narguilé à assigner l'Etat en responsabilité du fait des lois pour le préjudice engendré par l'interdiction de fumer dans les lieux publics, l'application du décret du 16 novembre 2006 a récemment permis de rappeler les enjeux posés par la notion de responsabilité sans faute. Cette dernière résulte d'une interprétation jurisprudentielle de l'article 1384 du Code Civil: « On est responsable non seulement du dommage que l'on cause par son propre fait, mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre, ou des choses que l'on a sous sa garde ». Responsabilité de plein droit, elle introduit l'idée d'une responsabilité indirecte, où le responsable est éloigné de plusieurs degrés du dommage commis. Elle revient parfois à désigner le responsable juridique d'un dommage survenu par hasard ou par malchance : par là elle se rattache au désir de trouver un responsable à tout, autrement dit, quelqu'un qui paie.
C'est alors que cette notion devient problématique. Son but est la protection des personnes : en désignant un responsable, elle désigne un débiteur et permet la réparation. La responsabilité sans faute a donc d'abord une fonction économique d'indemnisation. L'enjeu économique est important puisque la responsabilité sans faute revient à faire porter le coût du risque par le prestataire, l'employeur ou le propriétaire plutôt que l'usager. Cette mesure de protection peut conduire à la constitution d'un marché du risque du côté du prestataire, ou fortement influencer l'évolution d'une profession. Certains secteurs peuvent par exemple être déstabilisés par le renchérissement du coût des assurances professionnelles.
[...] La Charte de l'environnement, dans laquelle figure le principe de précaution, a été adoptée définitivement en mars 2005. En consacrant le droit de chacun à "vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé" dans la Constitution de la Vème République, elle contribue à renforcer, dans une mesure difficile à évaluer, l'obligation pour l'administration de ne pas engager sa responsabilité. Au terme de ce bref aperçu historique, le développement de la responsabilité sans faute témoigne d'une volonté d'extension progressive par le juge tant de la notion de dommage que du lien de causalité en vue de favoriser une meilleure indemnisation des victimes. [...]
[...] La Cour a ainsi édicté un principe général de responsabilité du fait des choses que l'on a sous sa garde. Dans cette affaire, le propriétaire d'une remorque dont la chaudière avait explosé tuant un ouvrier fut déclaré responsable, en l'absence même de la preuve de sa faute Les conditions de la responsabilité du fait des choses D'abord fondée sur une présomption de faute du gardien de la chose (Arrêt Teffaine), la responsabilité du fait des choses devient, avec l'arrêt Jand'heur du 13 février 1930, une responsabilité de plein droit, fondée sur une présomption de responsabilité : Le gardien de la chose ne peut se dégager de sa responsabilité en prouvant son absence de faute, il doit alléguer d'un cas de force majeure ou démontrer la faute de la victime (exonération seulement partielle si la faute de la victime n'est pas constitutive d'un cas de force majeure). [...]
[...] Le litige concerne le montant de l'indemnité initialement allouée à la personne de M. Cames. En l'espèce, ni lui ni son employeur, l'Etat, n'avaient commis de faute. Néanmoins, jugeant que l'Etat devait garantir ses ouvriers contre le risque résultant des travaux qu'il leur fait exécuter dans le cadre du service public, le Conseil d'Etat proposa d'admettre la responsabilité de l'Etat sur le seul fondement du risque. Cette décision fut confirmée par une législation rapide puisqu'en 1898 fut adoptée la première loi sur les accidents du travail, aujourd'hui remplacée par des dispositions du code de la sécurité sociale, reprenant les dispositions de l'arrêt pour les étendre à l'ensemble des ouvriers. [...]
[...] Ainsi, les seules exclusions du domaine de l'article 1384 al ne peuvent résulter que d'un texte spécial. Relèvent ainsi d'un régime spécial la responsabilité du fait des animaux (art de fait, similaire à la responsabilité du fait des choses), la responsabilité du fait des ruines (art. 1386), la responsabilité en matière de dommage causé par un incendie (art. 1384), la responsabilité en matière d'accident de la circulation (loi Badinter du 5 juillet 1985) et la responsabilité du fait des produits dangereux art 1386- 1 à -18 instaurés par la loi du 19 mai 1998). [...]
[...] La responsabilité pour risque La notion de risque désigne ici l'ensemble des actions dangereuses poursuivies par les personnes publiques. Historiquement, c'est dans ce domaine que s'y situe le berceau de la responsabilité sans faute en droit administratif - La responsabilité sans faute au profit des collaborateurs occasionnels des services publics Avec l'arrêt Cames, le Conseil d'Etat initie en 1875 un long mouvement de définition des circonstances pouvant conduire à la reconnaissance d'une responsabilité sans faute de l'Etat. L'affaire implique un ouvrier de l'arsenal de Tarbes, blessé par un éclat de métal sous le choc du marteau- pilon qu'il manipulait. [...]
Bibliographie, normes APA
Citez le doc consultéLecture en ligne
et sans publicité !Contenu vérifié
par notre comité de lecture