En écrivant dans l'article 1384 al 1er que l' « on est responsable non seulement du dommage que l'on cause par son propre fait mais encore de celui qui est causé par le fait […] des choses que l'on a sous sa garde », le législateur n'avait eu probablement d'autre intention que d'annoncer l'article 1385, voire l'article 1386.
Cet article ne fut donc interprété pendant un siècle que comme une simple transition vers la responsabilité du fait des animaux et la responsabilité du fait des bâtiments.
Pourtant, à la fin du XIXème siècle, certains auteurs pressentent que l'article 13984 al 1er offre une dérogation latente aux principes de l'article 1382. Se basant sur l'article 1384 al 1er, on peut déduire une présomption de responsabilité pour le gardien d'une chose lorsque cette chose a causé des dommages à un tiers. Il n'est plus nécessaire de prouver le lien entre la faute et le dommage. Or, cette théorie prend une ampleur conséquente dans un contexte de développement du machinisme où la faute est parfois difficile à prouver en cas d'accident.
Ainsi, le domaine de l'article 1384 al 1er est étendu jusqu'à devenir du fait de la lecture jurisprudentielle, le principe fondamental de la responsabilité du fait des choses.
Le gardien d'une chose, c'est-à-dire d'objets divers allant de l'automobile à l'aiguille à tricoter, l'arbre ou le morceau de bois, est désormais responsable de tout dommage causé par la chose qu'il possède. Ce principe jurisprudentiel n'est pas sans soulever de multiples questions. L'élaboration d'un régime complexe de responsabilité ne s'est en effet pas faite sans mal.
Si le gardien est présumé responsable sans que la victime ait à prouver de faute, le gardien peut-il s'exonérer de cette accusation ? Et si oui, par quels moyens, quel type de preuve ?
Egalement, la notion de gardien a pu soulever des interrogations : qu'en est-il lorsque le propriétaire n'est plus le gardien, notamment en cas de prêt ou de vol ?
La responsabilité du fait des choses se caractérise avant tout par une présomption de responsabilité pour le gardien de la chose. Mais ce gardien a néanmoins la possibilité des se défendre et de s'exonérer de cette responsabilité dans certains cas.
[...] Ainsi, l'arrêt Teffaine du 16 juin 1896 ouvre pour la première fois, mais de façon très restrictive, la possibilité d'une responsabilité du fait des choses pour indemniser les victimes d'un dommage sur la base de l'article 1384 al 1er. Une telle option demeure alors très contestée par la doctrine. Et la loi du 9 avril 1898 sur la réparation des accidents du travail retire très vite à cette construction son utilité majeure. Dans les années 1920, c'est au tour des accidents de voiture de se multiplier. Or, les avis divergent encore quant à savoir si l'on applique ou non l'article 1384 al. [...]
[...] La seconde énonce que la qualité de gardien est subordonnée à l'exercice effectif des pouvoirs sur la chose au moment du dommage. Si le propriétaire est privé de l'usage, de la direction et du contrôle de la chose, il n'est plus le gardien. L'arrêt Franck opte pour cette deuxième interprétation, consacrant par là même un principe essentiel qui sera par la suite complété. En quelques années, la jurisprudence jette donc les bases de la responsabilité du fait des choses. Mais la pratique fait surgir irrésistiblement de nouvelles questions face à des cas nouveaux. [...]
[...] Qui est alors responsable des dommages causés ? Le transporteur, gardien de la chose comme la jurisprudence antérieure l'avait défini, ou le propriétaire (fabricant), gardien de la structure ? Le juge a en fait cherché à savoir qui est en mesure d'exercer au mieux un contrôle sur la structure de la chose ; C'est là le véritable sens de l'arrêt. Certes, il n'y a toujours qu'un seul gardien, mais c'est une garde alternative pensée selon les circonstances. La condition d'application de ce principe est souvent la dangerosité de la chose ou la complexité de son mécanisme. [...]
[...] Cet article ne fut donc interprété pendant un siècle que comme une simple transition vers la responsabilité du fait des animaux et la responsabilité du fait des bâtiments. Pourtant, à la fin du XIXème siècle, certains auteurs pressentent que l'article 13984 al 1er offre une dérogation latente aux principes de l'article 1382. Se basant sur l'article 1384 al 1er, on peut déduire une présomption de responsabilité pour le gardien d'une chose lorsque cette chose a causé des dommages à un tiers. [...]
[...] Puis, il fût jugé que la faute de la victime n'a qu'un aspect partiellement exonératoire (13 avril 1934) . Ce principe s'est longtemps appliqué ; le juge détenant dans la pratique une totale liberté d'appréciation du degré d'exonération à accorder, ce qui s'est traduit souvent par une interprétation minimaliste de la faute de la victime. Certains auteurs ont alors soutenu que seule une faute inexcusable de la victime pouvait exonérer le gardien. Les critiques étaient également très vive sur le principe jugé injuste de réduire les dommages-intérêts à une victime du fait de sa seule imprudence. [...]
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