La volonté de neutralité de l'Etat, au regard des différentes manières de vivre en couple, manifestée par ses représentants lors des travaux préparatoires de la loi instituant le PACS et définissant le concubinage, si elle s'est traduite par une reconnaissance juridique de ces multiples façons de vivre à deux, n'a en revanche pas emporté leur soumission à un régime identique. Ce sont bien trois statuts qui se distinguent par leur degré de sophistication et de protection des membres du couple. Ce ne sont dès lors, et sans doute pas, les mêmes motivations qui animent ceux qui recourent à l'assurance-vie dans la perspective de la disparition de l'un d'eux, et aux fins de protection du survivant. Pour les concubins et pacsés, cette méthode volontaire de protection du survivant vient combler une lacune légale. Pour les conjoints, la loi déploie des mesures protectrices du survivant. L'une des ambitions des réformes contemporaines fut d'ailleurs de les renforcer. Il ne s'agit pas, dès lors, pour les époux prévoyants qui recourent à l'assurance-vie, de combler un vide légal ; il s'agit de protéger le survivant d'une manière différente, jugée par eux, sans doute, plus performante ou plus adaptée.
Présentée comme le placement favori des français, l'assurance-vie peut répondre au souhait exprimé par ces différents ménages de conforter la situation patrimoniale du survivant. Le contexte matrimonial de la souscription d'un contrat d'assurance-vie n'a d'ailleurs pas échappé au législateur qui a truffé le titre III du livre I du code des assurances de dispositions propres aux conjoints ou dérogatoires au droit patrimonial de la famille. La pratique a, elle aussi, constaté et consacré ce contexte en forgeant une clause bénéficiaire type désignant le conjoint en premier.
Il convient aujourd'hui de dépasser le contexte purement matrimonial pour saisir la place que l'assurance-vie peut occuper dans les prévisions des ménages de différentes natures. La question est, dans cette perspective, invariablement posée de la transposition, de lege lata ou de lege ferenda, de certaines dispositions du code des assurances propres aux conjoints aux pacsés voire aux concubins.
L'attention portée au sort du survivant ne doit pas permettre d'occulter la situation d'autres personnes. Le droit patrimonial de la famille recherche toujours l'équilibre entre les différents intérêts en présence, notamment en cas de décès, ménage les intérêts des différents héritiers, et des créanciers.
L'assurance-vie doit satisfaire le besoin de protection du survivant sans sacrifier les autres intérêts légitimes.
[...] Classiquement, l'assurance-vie poursuivait un objectif de prévoyance. D'ores et déjà, elle offrait une technique efficace de protection du survivant : la souscription d'une temporaire décès assure bien le confort patrimonial du survivant, en cas de décès de l'assuré avant le terme contractuel, en lui garantissant un capital ou une rente ou, lorsque la temporaire décès est adossée à un emprunt, en effaçant un élément de passif. Outre la prévoyance, l'assurance-vie moderne s'affiche toujours plus comme un procédé d'épargne, utilisé, notamment, à des fins de transmission. [...]
[...] Une même proposition figure dans les quatre arrêts rendus en chambre mixte : Mais attendu qu'il résulte de l'article L. 132-13 du code des assurances que les règles du rapport à succession et celles de la réduction pour atteinte à la réserve des héritiers ne s'appliquent pas aux sommes versées par le contractant à titre de primes, à moins que celles-ci n'aient été manifestement exagérées eu égard à ses facultés ; qu'un tel caractère s'apprécie au moment du versement, au regard de l'âge ainsi que des situations patrimoniale et familiale du souscripteur La Cour s'est attachée à préciser le caractère manifestement exagéré des primes. [...]
[...] Impossible alors pour cette donation d'échapper au régime du droit commun des libéralités. Le survivant du couple sera protégé, mais les mécanismes successoraux interdiront le sacrifice en conséquence des réservataires La protection volontaire renforcée Le souscripteur dispose de nombreux moyens pour concilier l'intérêt de celui dont il partage la vie (notamment de son partenaire ou concubin, ignorés de la dévolution ab intestat) et celui de ses héritiers, lorsqu'il souscrit une assurance-vie. C'est essentiellement en peaufinant la clause bénéficiaire qu'il y parviendra. [...]
[...] Tout est question d'interprétation de la volonté du souscripteur. La loi induit de la simple indication du conjoint dans la clause bénéficiaire la volonté du souscripteur de gratifier celui qui sera conjoint au moment de l'exigibilité. En ces temps de recompositions familiales accélérées, cette présomption légale est raisonnable. Pour les partenaires et concubins, le plerumque fit commande une solution identique. Elle pourra s'imposer au terme d'une extension analogique de l'article L 132-8, et reposera alors sur une présomption légale, ou au moins, au terme d'un raisonnement inductif du juge et elle s'imposera alors au prix d'une présomption du fait de l'homme qui pourrait finir par dégénérer en présomption quasi légale Le bénéfice de l'assurance Les solutions sont connues pour les époux. [...]
[...] Il sera difficile de plaider l'erreur invincible. Si l'on voit dans l'emploi des deniers indivis ou présumés tels, pour le paiement des primes, un simple acte d'administration, du moins un acte qui ressortit à l'exploitation normale des biens indivis (c. civ., art. 815-3), alors le jeu de la présomption de mandat tacite sera susceptible de valider l'acte du souscripteur agissant seul. La présomption de mandat tacite couvre en effet les actes d'administration lorsque un indivisaire prend en main la gestion des biens indivis, au su des autres et néanmoins sans opposition de leur part Il demeure que l'assureur n'est pas à l'abri d'une action de l'autre indivisaire qui discuterait la réunion des conditions d'application de la présomption de mandant, en prétextant, notamment, que la souscription du contrat et le paiement des primes ont été faits à son insu. [...]
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