L'ensemble des créances représente une grande richesse. Elles signifient un gain futur pour le créancier. Celui-ci peut légitimement s'attendre à une entrée dans son patrimoine. Une fois la créance recouvrée, il est propriétaire du gain ainsi réalisé. Avant que la créance ne soit recouvrée, le créancier est dit « titulaire de la créance ». Certains utilisent l'expression « propriétaire de la créance ».
On comprend aisément le raccourci de langage que comporte cette expression. La créance apparaît comme un élément à part entière du patrimoine du créancier. Classiquement, la doctrine dénonce l'inexactitude de cette expression. Cette inexactitude vient de l'association de deux termes diamétralement opposés : la créance est en droit français classique un droit personnel alors que le droit de propriété est un droit réel.
On retrouve ici la distinction fondamentale des droits subjectifs entre droits réels et droits personnels. Les droits réels sont ceux qui portent sur une chose. Ce sont des liens de droit directs entre une personne et une chose. Le droit réel type est le droit de propriété. Il existe d'autres droits réels que l'on répartit en droits réels principaux et droits réels accessoires. Les droits réels principaux sont issus, classiquement, d'un démembrement de la propriété tandis que les droits réels accessoires sont ainsi dénommés en ce qu'ils dépendent d'un autre droit subjectif. Par exemple, l'usufruit est un droit réel principal, tandis que le gage est un droit réel accessoire qui grève un autre droit subjectif. Les droits personnels sont ceux qui portent sur une personne. Ce sont des liens de droit entre une personne (le créancier) et une autre personne (le débiteur), qui est tenu de donner, faire ou ne pas faire quelque chose envers l'autre.
Classiquement, la propriété, en tant que droit réel, doit porter sur une chose. La créance est un droit personnel et non une chose. Ainsi, la propriété, droit réel, ne peut porter sur une créance, droit personnel. L'expression est donc, aux yeux de la doctrine classique, inexacte.
Cependant, certains auteurs affirment qu'il existe une propriété des créances. L'ensemble de ce devoir consiste à déterminer si « la propriété des créances » est une expression juridiquement exacte.
Tel est le cas lorsque la créance peut être considérée comme une chose appropriable, un bien. Certains auteurs ont développé cette idée. D'autres ont redéfini la notion de propriété pour élargir l'objet sur lequel elle porte. Pour que le droit de propriété puisse porter sur une créance, il faut, en effet, que les caractéristiques du droit de propriété ne soient pas inconciliables avec les caractéristiques du droit de créance. De même il faut que les prérogatives du propriétaire s'appliquent au créancier, le propriétaire du bien que serait la créance.
Deux parties s'imposent donc pour déterminer l'exactitude de l'expression. Il nous faut, en premier lieu, qualifier la notion de créance (Chapitre I). Puis, en second lieu, comparer la propriété, dans ses caractéristiques et son fonctionnement, au droit de créance (Chapitre II).
[...] Martin, De la nature corporelle des valeurs mobilières (et autres droits scripturaux), D Chron. p n°3. - Véronique Allegeart, De la propriété des valeurs mobilières, Bulletin Joly Société, Mars 2005, Chron. 68, p - F. Zénati, Chronique de législation française et communautaire, RTDCiv et 3. - Stéphanie Pavageau, Le droit de propriété dans la jurisprudence des juridictions suprêmes française, européenne et communautaire, Th - C. Witz, La fiducie en droit privé français, Th - C. Witz, Les transferts fiduciaires à titre de garantie in Les opérations fiduciaires, Feduci-LGDJ p.1985. - P. [...]
[...] Un auteur[68] estime cependant que l'action paulienne est une forme particulière d'action en revendication de la valeur de la créance protégée par le droit de gage général des créanciers chirographaires parce que la fraude paulienne permet au créancier chirographaire de transformer son droit de gage général, droit à une valeur non individualisée, en droit exclusif sur une valeur individualisée Envisageant la créance sous l'angle négatif de la dette, il estime que le débiteur détient une valeur. Le créancier possède cette valeur au titre de propriétaire in corpore alieno. C'est donc la valeur qui constitue le véritable objet de propriété du créancier. Cette valeur n'est cependant pas attachée à un bien en particulier du débiteur, mais à l'ensemble de son patrimoine en vertu du gage général des créanciers. [...]
[...] En cela le nantissement de créance gagne aussi à cette réforme. Il sera sûrement plus souvent utilisé en pratique, ce qui permettra une plus grande mobilisation des créances et donc une possibilité supplémentaire de crédit. La qualification en bien de la créance apparaît, à la simple lecture de ces articles, comme juridiquement correcte. Elle permet de concevoir la propriété des créances, mais aussi la création de différents droits sur elles, notamment l'usufruit, et, le gage. Ainsi, la créance devient un objet d'échange, dont la valeur est reconnue. [...]
[...] Pour être indisponible, un bien n'en est pas moins à faire partie du patrimoine. Ainsi, les limites à la libre disposition des biens n'empêchent pas de les approprier. La règle reste d'ailleurs la libre disposition. La propriété des créances n'est donc pas remise en cause par les lois qui réduisent les pouvoirs du créancier. L'étude des prérogatives du propriétaire et de celles du créancier permet de relever les adéquations. La propriété s'applique donc, de par ses caractéristiques et ses prérogatives, à la créance. L'expression propriété des créances est donc exacte juridiquement. [...]
[...] Une telle applicabilité de cette caractéristique à la créance tend à considérer que la propriété des créances existe. Le caractère absolu du droit de propriété appliqué à la créance La propriété est un droit absolu. Cette caractéristique est expressément posée par l'article 544 du Code Civil. Certains auteurs soulignent même le pléonasme que constitue le superlatif la plus absolue La théorie classique ne perçoit cependant pas le terme de la même façon que la théorie moderne. Pour les classiques, il s'agit de souligner la plénitude des pouvoirs du propriétaire de jouir et de disposer Pour les modernes, il revêt une toute autre incidence. [...]
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