A la différence d'un débiteur ordinaire, la caution qu'elle soit simple ou solidaire, est tenue pour un autre, le débiteur principal. Aussi, ne doit-elle pas supporter définitivement le poids de la dette. En général, la caution se retourne contre le débiteur principal après avoir désintéressé le créancier. Le recours de la caution contre le débiteur principal s'exerce en principe après paiement. La caution réclame au débiteur le remboursement de ce qu'elle a payé à sa place, ainsi que l'indemnisation du dommage que lui a causé ce paiement . Traditionnellement, il lui est offert le choix entre le recours personnel et le recours subrogatoire . Cependant, ces deux recours ne lui sont pas toujours d'une grande utilité; le débiteur étant le plus souvent insolvable.
Pour cette raison, exceptionnellement, la caution peut anticiper ce recours, lorsque les circonstances particulières aggravent le risque d'insolvabilité du débiteur, et par conséquent menacent de rendre inefficace le futur recours après paiement .
Ce recours avant paiement, à plusieurs égards apparaît comme incongru: lorsque la caution n'a pas encore payé, on peut s'interroger sur le bien-fondé d'un recours contre le débiteur , dans la mesure où la sûreté n'a pas encore été mise en œuvre. On cherche à conjurer un recours inutile de la caution contre le débiteur après paiement. Le risque d'un recours illusoire est presque certain en cas d'insolvabilité du débiteur ou lorsque la durée de l'obligation dépasse celle de la caution.
Quoi qu'il en soit, le recours avant paiement demeure une originalité du cautionnement, c'est pourquoi aussi bien les législateurs africains que ceux du Code civil ont limitativement énuméré les cas d'ouverture du recours anticipé. Ils sont au nombre de cinq pour le premier (articles 2032 et 2039) et six pour le second (articles13 alinéa 2 et 24 de l'Acte Uniforme OHADA portant organisation des sûretés) : lorsque la caution est poursuivie en justice pour le paiement, quand le débiteur est en faillite ou en déconfiture, quand le débiteur s'est obligé de lui rapporter sa décharge dans un certain temps, lorsque la dette est devenue exigible par l'échéance du terme, en cas de prorogation du terme consentie par le créancier au débiteur, au bout de dix ans lorsque l'obligation principale n'a pas de terme fixe d'échéance. En dehors de cette dernière hypothèse non prévue par le législateur OHADA, ces différents cas d'ouverture existent mutatis mutandis dans l'AUS précité.
Au mépris de l'ordre chronologique, le recours avant paiement est généralement étudié après le recours "normal " c'est-à-dire après paiement. Ceci est sans doute dû à son caractère inhabituel et au souci pour les différents auteurs de partir d'une situation générale qu'ils maîtrisent mieux à une situation exceptionnelle et assez floue et hésitante.
Au-delà du fondement de cette action exceptionnelle accordée à la caution, c'est son objet qui retient l'attention. En effet, pour ce qui est du fondement, il n'y a aucun doute qu'il est textuel et résulte d'une volonté du législateur d'accorder une faveur à la caution; elle qui est considérée le plus souvent comme la partie faible de l'opération de cautionnement, surtout lorsqu'elle est profane.
Traditionnellement, la finalité du recours anticipé est binaire: d'une part, la caution peut prendre des mesures conservatoires; d'autre part, elle peut obtenir un véritable paiement anticipé de la dette cautionnée. Nous nous proposons d'aller au-delà de ce diptyque et de dégager plus clairement l'aspect indemnisation qui est souvent occulté.
[...] Il paraît logique dans ce cas, qu'elle ne pourrait faire recours qu'à des mesures conservatoires. II- Le recours anticipe donne droit a la mise en œuvre des mesures conservatoires Dès l'instant où la dette garantie existe, qu'elle soit ou non exigible, la caution est débitrice d'une obligation de règlement[15]. Et en tant que créancière virtuelle, la caution peut tout au plus faire pression sur le débiteur, pour se mettre à l'abri des conséquences d'une poursuite ultérieure du créancier ou des risques d'une détérioration de la situation du débiteur. [...]
[...] C'est ainsi que la caution pourrait alors recourir à l'exécution forcée, recevoir le cas échéant un dividende dans la procédure de redressement du débiteur. La caution pourrait aussi opposer la compensation de sa créance anticipée avec ce qu'elle peut elle-même devoir au débiteur. Les sommes ainsi versées à la caution lui sont pleinement acquises[9]; " sauf à être reversée(s) au débiteur s'il doit ultérieurement payer le créancier; ou déduites du recours de la caution contre ses cofidejusseurs[10]" Remarquons au passage, que contrairement au législateur OHADA qui, en cas de prorogation du terme, assigne deux finalités au recours anticipé, à savoir le paiement ou l'obtention d'une mesure conservatoire, le Code civil dans cette même hypothèse, ne parle que du paiement[11] et plus précisément de " forcer au paiement L'expression est impropre. [...]
[...] NDOUNKEU (H. op.cit.,PP.86-87. Voir FRUGIER précité. SIMLER op.cit. P SIMLER op.cit , n°468, P. 432; NDOUNKEU (H. op.cit P et svtes. [...]
[...] Civ. I Fév.1982, consorts Fisse, B. JCP a note AUBERT (J.-L.). "La simple prorogation de terme accordée au débiteur principal, ne décharge point la caution, qui peut, en ce cas poursuivre le débiteur pour le forcer au paiement.” SIMLER op. cit., n°629, P.564. MALAURIE et AYNES(L.); op.cit., n°163, P.54. Idem. SIMLER op.cit. [...]
[...] La clause selon laquelle aucune prorogation du terme ne pourra être consentie par le créancier au débiteur sans l'accord de la caution, sous peine de déchéance du cautionnement n'est pas rare[20]. L'idée essentiel qui se dégage de notre argumentaire est la suivante: la caution n'ayant encore rien payé, il paraît difficile de l'autoriser à exiger un paiement du débiteur. Pourtant, il est de plus en plus admis que la caution puisse condamner le débiteur à lui verser une certaine somme, en réparation du préjudice actuel par elle subi. [...]
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