l'interventionnisme judiciaire en matière d'ordre public de protection est systématiquement condamné.
Cette position a été adoptée par la Cour de cassation depuis le milieu du XXème siècle, comme en témoigne l'arrêt « Berger des Causses » en date du 18 mars 1955 qui, dans un domaine tout à fait différent de celui du droit du crédit à la consommation, à savoir celui du droit du travail, avait indiqué que le caractère d'ordre public de la loi du 10 mars 1948 ne pouvait permettre aux juges, en l'espèce, d'en faire application d'office.
Il y a bien eu un arrêt (civ. 1ère, 18 décembre 2002, n°99-21121) dont la doctrine s'est félicité, par lequel la Haute cour avait semblé assouplir sa position relative à l'étendue des pouvoirs du juge, en soulignant que « si la méconnaissance des articles L121-21 et suivants du Code de la consommation ne peut être opposée qu'à la demande de la personne que ces dispositions ont vocation à protéger, il en va autrement lorsque cette personne a manifesté son intention de se prévaloir de la nullité de l'acte, fût-ce sur un autre fondement ».
Mais, cette nuance mise à part, la Cour de cassation a maintenu sa position en réduisant la mission du juge à celle d'un arbitre impassible ne pouvant se substituer à la partie protégée.
Devant cette opposition constante des juridictions du fond avec la juridiction suprême, la question de la situation du consommateur se pose.
Se faisant une obligation de relever d'office les dispositions d'ordre public du Code de la consommation, il conviendra de voir que la protection que les juges du fond accordent par là même au consommateur peut se révéler être à double tranchant (I). Mais, face à eux, se trouve la Cour de cassation, dont la position reste inflexible et dont il résulte un sacrifice contestable des intérêts du consommateur (II).
[...] Autrement dit, l'interventionnisme judiciaire en matière d'ordre public de protection est systématiquement condamné. Cette position a été adoptée par la Cour de cassation depuis le milieu du XXème siècle, comme en témoigne l'arrêt Berger des Causses en date du 18 mars 1955 qui, dans un domaine tout à fait différent de celui du droit du crédit à la consommation, à savoir celui du droit du travail, avait indiqué que le caractère d'ordre public de la loi du 10 mars 1948 ne pouvait permettre aux juges, en l'espèce, d'en faire application d'office. [...]
[...] Il en résulte, et c'est ce que cette juridiction affirme clairement, que la situation d'inégalité qui existe entre les parties d'un contrat régit par le Code de la consommation doit pouvoir être compensée par une intervention positive extérieure aux seules parties au contrat. Il apparaît ici que la position de la Cour de cassation est clairement en opposition complète avec l'esprit de la jurisprudence communautaire. Loin d'être conforme à notre droit processuel interne, la position de la Cour de cassation est également en opposition avec la jurisprudence communautaire. [...]
[...] En effet, l'article 12 du nouveau code de procédure civile dispose que le juge tranche le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables Il n'est pas nécessaire d'aller plus loin dans la démonstration pour conclure que le droit processuel, loin de la justifier, est même totalement opposé à la règle instaurée par la Haute cour, selon laquelle la méconnaissance des dispositions d'ordre public des articles L 311-1 et suivants du Code de la consommation, relatifs au crédit à la consommation, ne peut être opposée par les juges qu'à la demande de la personne que ces dispositions ont pour but de protéger. Contraire au droit processuel, le sacrifice instauré par la Cour de cassation n'est pas plus conforme au droit européen. [...]
[...] Si l'emprunteur est dans la position de défendeur à l'instance, et que l'action intentée par le prêteur est une action en exécution par exemple, alors le relevé d'office obligatoire est favorable au consommateur ignorant la sollicitude de la loi à son égard, dans la mesure où il va pouvoir bénéficier de l'opposition par le juge au demandeur, des dispositions d'ordre public par lesquelles le législateur a entendu protéger la partie faible du contrat de prêt. Mais si l'emprunteur est demandeur à l'action, la situation est totalement différente. Prenons, pour s'en convaincre, l'exemple d'un consommateur qui agirait en justice pour obtenir l'exécution d'un contrat de prêt. [...]
[...] Autre avantage, ce relevé d'office obligatoire pourrait contribuer à accélérer la résolution des conflits. En effet, lorsqu'une partie du procès est déboutée pour avoir soulevé un mauvais fondement à ses prétentions, que le juge n'a pas pu modifier, elle retourne souvent devant les juridictions en invoquant un nouveau moyen ce qui contribue incontestablement à la surcharge de nos tribunaux. Alors que permettre au juge de relever d'office des dispositions d'ordre public de protection permet de vider une fois pour toutes le différend et évite le renouvellement de procès aux fondements successifs. [...]
Bibliographie, normes APA
Citez le doc consultéLecture en ligne
et sans publicité !Contenu vérifié
par notre comité de lecture