La notion de garde de la chose se rattache à la responsabilité du fait des choses. Au XIXe siècle, avec l'entrée des machines dans la vie quotidienne, la responsabilité du fait des choses est devenue une partie prépondérante du droit de la responsabilité. Cette dernière notion peut se définir comme l'engagement de la responsabilité délictuelle d'un individu suite à un dommage qu'il a causé à autrui par son propre fait, ou par le biais d'une personne ou d'une chose.
La jurisprudence, qui jusqu'à la fin du XIXe siècle n'avait légiféré que sur la responsabilité du gardien des animaux et des propriétaires de bâtiments (articles 1385 et 1386 du Code civil), a fait de l'article 1384 du Code civil le texte de référence, un principe général de la responsabilité du fait des choses.
[...] C'est donc pour simplifier cette notion de garde et réduire les ambigüités que la jurisprudence a évolué. L'arrêt Jand'Heur (Cour de cassation, assemblée plénière février 1930) pose une base majeure à la notion de garde : l'article 1384 alinéa premier désigne la responsabilité comme relevant de la garde de la chose et non de la chose elle-même. C'est surtout par un arrêt du 2 décembre 1941, arrêt Franck, que la cour de cassation adopte une conception matérielle de la garde, en considérant qu'une personne privée de l'usage, de la direction et du contrôle d'un véhicule du fait d'un vol en perdait la garde. [...]
[...] La détermination du gardien se caractérise par un transfert involontaire de la garde ou par un transfert volontaire de la garde Le transfert involontaire de la garde. Par principe, la qualité de gardien doit être fixée in concreto en déterminant qui exerçait les pouvoirs d'usage, de contrôle et de direction sur la chose au moment du dommage. La jurisprudence présume cependant que le propriétaire est le gardien. Cela reste une présomption simple, qui peut être renversée par une preuve contraire. Lorsque le propriétaire de la chose est privé de son usage contre son gré, un transfert de garde s'opère au détriment de l'utilisateur de la chose. [...]
[...] L'arrêt Franck retient implicitement que la garde implique l'exercice d'un pouvoir indépendant. Or, depuis un arrêt d'assemblée plénière du 9 mai 1984, la cour de cassation affirme en effet qu'un enfant peut être déclaré gardien d'une chose, sans qu'il soit nécessaire de caractériser sa capacité de discernement. Cette position semble en contradiction avec la notion même de garde définie par l'arrêt Franck. L'exercice d'un réel pouvoir de contrôle et de direction sur la chose semble en effet impliquer une capacité de discernement de son gardien. [...]
[...] L'article 1384, en effet, dispose, dans son premier alinéa : On est responsable non seulement du dommage que l'on cause par son propre fait, mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre, ou des choses que l'on a sous sa garde Or, la notion de garde de la chose est ici une condition centrale de l'application, un élément incontournable de la mise en œuvre de la responsabilité du fait des choses. En effet, une chose sans gardien est exclue du champ de l'article 1384. La garde de la chose est conférée au gardien. [...]
[...] le transfert volontaire de la garde. Le transfert de garde peut résulter d'un acte volontaire de son propriétaire, qui confie l'usage, le contrôle et la direction de la chose à un tiers. Ce dernier en devient ainsi le gardien, et doit désormais répondre, à l'égard des victimes, des faits dommageables causés par cette chose. La jurisprudence apprécie le transfert de garde dans un arrêt de la première chambre civile de la cour de cassation, du 9 juin 1993 : le propriétaire de la chose, bien que le confiant à un tiers, ne cesse d'en être responsable que s'il est établi que ce tiers a reçu corrélativement toute possibilité de prévenir lui-même le préjudice qu'elle peut causer Le propriétaire doit donc confier à autrui, lors d'un transfert volontaire, l'usage mais aussi la direction et le contrôle sur la chose. [...]
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