L'arrêt que nous allons étudier dans ce commentaire est une célèbre décision rendue le 31 mai 1991 par la formation plénière de la Cour de cassation, portant sur l'épineuse question de bioéthique de la pratique, en France, de la maternité de substitution.
En l'espèce, l'épouse au sein d'un couple marié était atteinte de stérilité irréversible. Son mari donna alors son sperme à une autre femme qui, par suite d'une insémination artificielle, porta et mit au monde l'enfant ainsi conçu (...)
[...] La Cour de cassation considère ainsi qu'un contrat de conception / gestation pour autrui, par une femme qui mettrait ses ovocytes et son ventre à disposition d'un couple dont la femme est stérile, est contraire à l'ordre public. Voila pourquoi le contrat qui comporte l'engagement par une femme de procréation et de gestation d'un enfant pour autrui est considéré comme contraire à l'ordre public. La contrariété à l'institution de l'adoption. Cette décision sanctionne également le détournement de l'institution de l‘adoption. [...]
[...] Par ailleurs, c'est le corps humain en tant qu'élément ne pouvant pas faire l'objet de conventions que l'on préserve dans le même temps - Le doute quant au contrat de substitution portant sur la seule gestation pour autrui. On peut, en outre, se demander la chose suivante : qu'en est-il de la question de la maternité de substitution par la seule gestation pour autrui ? La Cour de cassation énonce bien que c'est la convention par laquelle une femme s'engage à concevoir et à porter un enfant ( ) qui est contraire à l'ordre public. Cette décision ne concernerait donc pas la convention qui consiste à ne s'engager qu'à porter l'enfant. [...]
[...] En l'occurrence, la mère porteuse concevait et portait l'enfant avec le sperme du mari de l'épouse stérile. Au moment de la naissance, l'enfant était abandonné par la mère, entendue comme aussi bien conceptrice que porteuse. À la naissance, en effet, la mère porteuse ne se déclarait pas comme étant la mère de l'enfant, ainsi que le stipulait sûrement le contrat. De son côté, plutôt que de reconnaître l'enfant et éviter une usurpation de filiation, ce qui est une infraction pénale, l'épouse stérile présentait une demande d'adoption plénière de l'enfant ainsi conçu. [...]
[...] Autrement dit, l'institution était détournée dès lors que l'adoption n'était finalement que l'aboutissement d'un processus contractuel de conception et de gestation d'un enfant qui allait être abandonné à sa naissance, pour ensuite être adopté par l'auteur de tout ce processus. C'est une atteinte à l'indisponibilité de l'état de la personne de l'enfant. C'est en quelque sorte une mise à disposition illicite de sa filiation. C'est devant le vide juridique qui existait en la matière que la jurisprudence s'est fondée sur ces principes pour trancher le litige. La matière relavait en fait de la loi (II). II Le passage de l'interdiction jurisprudentielle nuancée à la prohibition légale étendue. [...]
[...] Pour répondre à cette interrogation, la formation plénière de la Cour de cassation a fait appel à l'avis d'un représentant du Comité national d'éthique. Elle décide de casser l'arrêt de la Cour d'appel de Paris en ces termes : Attendu que la convention par laquelle une femme s'engage, fût- ce à titre gratuit, à concevoir et à porter un enfant pour l'abandonner à sa naissance contrevient tant au principe d'ordre public de l'indisponibilité du corps humain qu'à celui de l'indisponibilité de l'état des personnes Cette adoption n'était que l'ultime phase d'un processus destiné à permettre à un couple d'accueillir un enfant dans leur foyer, enfant conçu en exécution d'un contrat qui tendait à l'abandon à sa naissance par sa mère. [...]
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