Le lancer de nain

Extraits

[...] En 1991, le maire de Morsang-sur- Orge avait en effet interdit, par un arrêté municipal, le spectacle du lancer de nain prévu dans une discothèque de la ville. Cette attraction conduisait à utiliser comme un projectile une personne affectée par un handicap physique et présentée comme telle. Son objet même portait atteinte à la dignité de la personne humaine quand bien même des mesures de protection avaient été prises pour assurer la sécurité du nain, qui se prêtait librement au spectacle contre rémunération. [...]

[...] Le respect de la dignité de la personne humaine, composante de l'ordre public Le maire de la commune de Morsang-sur-Orge, pour interdire des spectacles de lancer de nains, s'est fondé non sur les pouvoirs de police spéciale qu'il tient de l'ordonnance du 13 octobre 1945 relative aux spectacles, mais sur les pouvoirs de police générale que lui confient les dispositions de l'article L. 131-2 du code des communes. Ces dispositions sont généralement entendues, lorsqu'elles concernent des spectacles, comme visant à garantir la sécurité du public ou à prévenir d'éventuels troubles matériels à l'ordre public. Toutefois, dans ce cas-là, le maire avait interdit ces spectacles non pour des considérations de cette nature mais en estimant qu'ils portaient atteinte au respect de la dignité de la personne humaine. [...]

[...] Le lancer de nain est également pratiqué aux Etats-Unis même s'il a été interdit dans l'Etat de Floride en 1989, puis dans l'Etat de New York. Le lancer de nain a été condamné en France le 27 Octobre 1995 par un arrêt de la commune de Morsang-sur-Orge du Conseil d'État. Par cet arrêt, le Conseil d'Etat condamne cette activité au nom du respect de la dignité de la personne humaine et fait également de ce principe une composante de l'ordre public. I. [...]

[...] Le lancer de nain, interdit au nom du respect de la dignité de la personne humaine 1. Un principe affirmé dans les textes Le principe de respect de la dignité de la personne humaine s'est surtout affirmé au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, après la découverte de l'horreur des camps nazis. Le respect de la dignité de la personne humaine est alors consacré comme un principe juridique démocratique universel. Pour preuve, le préambule de la Déclaration universelle des Droits de l'Homme, adoptée en 1948, débute ainsi : Considérant que la reconnaissance de la dignité inhérente à tous les membres de la famille humaine et de leurs droits égaux et inaliénables constitue le fondement de la liberté, de la justice et de la paix dans le monde . [...]

[...] De plus en plus, le juge est amené à protéger l'individu menacé dans son statut socio-économique pour s'opposer à sa déchéance, et préserver sa dignité, qualité commune à l'humanité tout entière, et ce dans la pauvreté ou dans la maladie. Ainsi, très récemment, a été adopté par le gouvernement un projet de loi établissant un droit au logement opposable. Cette préservation de la dignité est donc consacrée, et ce y compris si elle va à l'encontre de la propre volonté de l'individu concerné car une atteinte à sa dignité est une atteinte à la dignité de tous les hommes. [...]