Le mot enfant n'est pas une réalité juridique, il appartient à d'autres sciences humaines, sociologie, psychologie, philosophie. Le droit résume la notion d'enfant à la notion de mineur, dont la personnalité est définie par les règles régissant sa capacité (ou plutôt son incapacité) juridique. La figure du mineur ne se réduit pas pour autant à celle de l'infans du droit romain, c'est à dire de l'enfant en très bas âge, maitrisant aussi peu le langage verbal que le langage gestuel. Il convient de relever l'extrême hétérogénéité d'une enfance légale qui concerne également des bébés et des adolescents proches de l'âge de la majorité. D'où la complexification croissante du droit des mineurs, qui se manifeste par la prolifération de règles spéciales favorisant la reconnaissance d'une capacité juridique limitée : capacité d'accomplir seul les actes autorisés par l'usage, capacité de tester ou d'ouvrir un compte épargne sous certaines conditions à partir de 16 ans, etc.
[...] Il y a bien faute de la victime, le mineur est bien responsable civilement. Ce principe est toutefois écarté dans le cas majeur des accidents de la circulation (loi Badinter) ; la faute, même inexcusable de la victime ne peut être invoquée à l'encontre d'un adolescent de moins de 16 ans, à pied ou chevauchant un cycle sans moteur, ce qui ne représente pas une incapacité délictuelle, mais plutôt une sorte d'impunité. Une responsabilité délictuelle sans responsabilisation Cette décision, si elle constitue une révolution dans le droit de la responsabilité civile français, n'obéit qu'à un objectif d'indemnisation des victimes et non à une réelle responsabilisation des mineurs, car il faut noter que le jeune enfant est ordinairement insolvable. [...]
[...] Malgré la décision de la Cour de cassation, le poids de la responsabilité délictuelle continue de reposer sur le socle traditionnel de l'autorité parentale. Le cas des mineurs discernants Dans le cas dit des mineurs discernants ou mineurs émancipés la théorie ne suffit plus à expliquer l'incapacité : le mineur discernant dispose d'une volonté consciente, mais qui est déclarée incapable, parce qu'elle est présumée inexpérimentée, parce qu'elle doit aussi être soumise aux exigences d'un ordre familial. Vers une responsabilisation accrue du mineur discernant L'incapacité du mineur est couramment qualifiée de générale, mais ce n'est pas le cas ici puisqu'elle ne concerne pas les faits juridiques, notamment les délits et quasi-délits civils, la responsabilité. [...]
[...] En conséquence, il convient, pour le juge et le législateur, de protéger le mineur en l'empêchant d'agir valablement dans le commerce juridique. L'incapacité juridique se présente donc comme le moyen d'éviter les méfaits de l'incapacité naturelle née des limites des facultés de discernement du mineur. La logique distributive (plus de discernement entraîne plus de capacité) cesse donc d'être respectée lorsqu'il s'agit d'apprécier la responsabilité de l'enfant. Car c'est en jugeant la conscience des individus que les juristes sont en mesure de prendre en compte leur inconscient. [...]
[...] Mais on ne peut nier que le mineur se voit reconnaître une capacité juridique accrue, à la mesure des progrès de sa capacité naturelle. Si cette pré-majorité suscite la controverse, notamment quant à son extension identique aux actes patrimoniaux et extra patrimoniaux, elle n'en témoigne pas moins d'une évolution spectaculaire, depuis le début des années 1990, de la doctrine juridique au sujet du traitement de la minorité en général et de la responsabilité civile de l'enfant en particulier. [...]
[...] Ce type de recours était déjà ouvert avant 1984, du moment que le fait du mineur non discernant était regardé comme un fait purement matériel vide de volonté et de faute. La loi présumait une faute des parents : ils avaient mal surveillé l'enfant au moment des faits, ou ils l'avaient laissé acquérir de mauvais penchants. En conséquence, ceci permettait aux parents de s'exonérer, en démontrant qu'ils n'avaient pas commis de faute. Mais en 1997, la Cour de cassation leur retire cette faculté d'exonération : leur responsabilité, devenue objective, se fonde désormais sur le risque, le risque d'avoir des enfants. [...]
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