L'unilatéralisme est « un phénomène irritant. » Quant à lui, « l'acte unilatéral est, sauf rare exception, entouré d'un silence craintif, comme s'il portait en lui-même les germes de la destruction du contrat, même si parfois il en prolonge la vie ».
Non sans quelque arbitraire, l'agacement du juriste devant cette réalité complexe du droit, pourrait s'expliquer par la difficulté d'en cerner les contours ; le droit aime construire des typologies, cependant l'unilatéralisme semble être rétif à toute délimitation précise de son domaine.
En effet, l'unilatéralisme - c'est-à-dire l'aptitude d'une personne publique ou privée à créer des effets de droit par l'expression de sa seule volonté - est une technique qui semble innerver le droit, tant elle est présente dans de nombreuses branches. Foyer de prédilection de l'unilatéralisme, le droit administratif semble s'articuler autour de ce procédé de l'acte unilatéral, prérogative essentielle de la puissance publique. « L'acte unilatéral de l'administration, expression de son pouvoir de décision unilatérale est censé illustrer l'inégalité foncière entre l'administration et les personnes privées ». Pourtant, le constat de l'existence de l'acte unilatéral n'est pas un phénomène nouveau dans les rapports privés.
Dès l'avènement du Code civil, le législateur consacre l'existence de certains actes juridiques unilatéraux isolés (testament, reconnaissance d'enfants, renonciation etc), dans lesquels une volonté solitaire produit des effets de droit. L'obligation qui peut naître ici n'est pas l'objet du consentement. Toute la complexité de l'unilatéralisme réside dans le fait de savoir ce que recouvre cette notion d' « effet de droit ». Une manifestation unilatérale de volonté peut-elle donner naissance à une obligation ; en d'autres termes, est-ce que l'engagement unilatéral peut être source d'obligations ?
L'engagement unilatéral est en effet un acte juridique unilatéral particulier, dont la vocation est de créer une obligation. Il n'est pas à confondre avec le contrat unilatéral (art 1103 du code civil), dans lequel l'existence de l'obligation est subordonnée à l'acceptation du créancier, et où la volonté unilatérale n'est donc pas suffisante pour donner naissance à l'obligation. Il ne saurait être source d'obligations, si l'on entend créer une obligation à la charge d'autrui (...)
[...] Comment la prouver ? 2. D'où une marginalisation Les rédacteurs, n'ont pas consacré l'unilatéralisme. Ainsi, si les rédacteurs du code civil avaient été aussi individualistes qu'on le prétend, ils auraient prôné l'unilatéralisme. Or, ils l'ont ignoré, et cette ignorance, est consubstantielle à l'élévation du contrat - La place de l'unilatéralisme, en tant que source créatrice d'obligations est insignifiante si l'on compare au contrat : l'engagement et le désengagement restent limités, et très controversés. Au stade de l'exécution de l'obligation, on remarque l'existence d'un droit unilatéral du contractant insatisfait de suspendre son exécution (exception d'inexécution), encore qu'elle soit subordonnée au principe de proportionnalité. [...]
[...] L'unilatéralisme s'impose de lui-même en tant que ressource juridique incontournable. La jurisprudence a donc enfin reconnu la détermination unilatérale du prix : sous réserve de bonne foi Arrêt Alcatel (29 nov. 1994), puis dans les 4 arrêts rendus en Assemblée plénière sous réserve d'abus de droit (1er dec 1995) mettant fin à 25ans d'instabilité artificielle des contrats de distribution. L'unilatéralisme est consacré sous réserve d'un contrôle judiciaire du juge : de la bonne foi à l'abus de droit, le contrôle passe d'un contrôle de validité à celui de l'exécution du contrat, et simultanément d'une question de fait contrôlée par les juges du fond, à une question de droit contrôlable par les juges de Cassation (contrôle renforcé) - Dans la résiliation : l'arrêt du 20 février 2001 consacre l'unilatéralisme en permettant la résiliation d'une CDD. [...]
[...] L'unilatéralisme, obstacle théorique à la cohérence du droit des obligations 1. L'unilatéralisme en conflit avec la logique contractuelle - Le contrat se caractérise par une rencontre de volontés, dès lors, l'acte unilatéral, issu d'une manifestation de volonté solitaire va à l'encontre de cette logique. Il est surprenant de constater que si la théorie de l'autonomie de la volonté n'est pas suffisante pour fonder le contrat, elle l'est en revanche pour fonder l'acte unilatéral. Ce constat est peut être de nature à expliquer le désaveu de l'unilatéralisme : cette théorie reconnue, on a préféré invalidé l'unilatéralisme que celle-ci, qui constituait un des piliers sur lequel reposait le contrat. [...]
[...] L'unilatéralisme, une place marginale en droit civil 1. L'unilatéralisme, une admission dangereuse - En droit civil, le principe même qu'une volonté unilatérale puisse engendrer des effets de droits, aux conséquences graves (exemple : testament, reconnaissance d'un enfant, rupture unilatérale du PACS etc), est admis de manière très circonscrite. Les cas sont strictement énumérés par le code civil, afin qu'un encadrement soit pleinement exercé. Une pleine liberté reconnue au pouvoir de décision unilatérale est impensable au niveau de la sécurité juridique, ainsi qu'au niveau de l'ordonnancement de la société. [...]
[...] L'entrée dans le contrat se doit d'être définitive. Le consentement, nécessairement unilatéral, perd son essence dès qu'il s'incorpore au contrat, et pour cette raison, il ne peut être unilatéralement repris.[5] Or, si l'unilatéralisme est une source du droit des obligations, comment pourrait-on expliquer qu'une volonté unilatérale ne soit pas capable de se délier ? Ainsi, le droit de rétractation (hypothèse très exceptionnelle) est perçu comme une atteinte à la logique contractuelle L'absence d'un régime autonome de l'acte juridique unilatéral - Il existe une réglementation des actes juridiques unilatéraux, mais qui n'a pas permis l'élaboration d'une théorie générale propre en la matière. [...]
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