Avec le recul du temps, la multiplication des couples de personnes de même sexe en Occident apparaîtra sans doute comme un des phénomènes marquants de la fin du XXe et du début du XXIe siècle. Non que des couples homosexuels n'aient pas existé par le passé ; mais la réprobation sociale qui entourait l'homosexualité et, parfois, la répression pénale qui la frappait les rendaient exceptionnels et commandaient qu'ils fussent socialement et, surtout, juridiquement invisibles. La tolérance manifestée par les sociétés occidentales contemporaines a conduit à l'abolition des sanctions pénales même si cette disparition est récente et que la Cour européenne des droits de l'homme a dû peser de tout son poids pour vaincre les dernières résistances.
Au-delà de la liberté et de l'égalité reconnues aux homosexuels en tant qu'individus, certains Etats ont estimé juste et nécessaire de construire des statuts pour les couples de même sexe. Il est vrai que la revendication se faisait d'autant plus forte qu'elle s'appuyait sur la dynamique des droits fondamentaux.
Dans un premier temps, il ne fut question que de créer pour les couples de même sexe un statut légal qui leur ouvrirait un certain nombre de droits civils, sociaux et fiscaux. Parti des pays scandinaves, le mouvement s'est peu à peu étendu en Europe, en Amérique du Nord et en Australie. A vrai dire, les règles mises en place sont très diverses : véritable statut plus ou moins copié sur le mariage ou simple cadre largement offert aux volontés individuelles, partenariat ouvert à tous les couples ou réservé aux couples homosexuels, etc.. Toutes ces institutions se rejoignaient cependant sur un point essentiel : elles étaient construites à côté du mariage, conçu comme l'union légalement consacrée de l'homme et de la femme.
Bientôt apparut cependant une nouvelle revendication : l'ouverture du mariage lui-même aux couples homosexuels. Une telle mesure est parfois présentée comme l'aboutissement logique et nécessaire d'une évolution naturelle : de même que le partenariat est accessible à tous les couples, homo et hétérosexuels, de même le mariage doit être possible pour tous. Le respect des libertés individuelles, le refus des discriminations, l'égalité entre les couples l'exigeraient. Le premier pays à briser le consensus fut, on le sait, les Pays-Bas, suivi par la Belgique, par l'Espagne et par le Canada, alors que le débat fait rage aux Etats-Unis.
A l'évidence, cette ouverture pose de délicats problèmes de droit international privé, tant il est vrai que, dans un monde où les personnes circulent, vivent et meurent en pays étranger avec leurs droits, leurs biens et leurs statuts, la reconnaissance de telles unions dans un pays donné ne peut qu'avoir des répercussions dans les autres pays. D'autant que certains pays entendent assurer le rayonnement de leurs choix nationaux grâce à des règles de droit international privé particulièrement souples. Ainsi, le législateur néerlandais ouvre-t-il toutes grandes les portes du mariage homosexuel aux étrangers : pour que le mariage soit valablement célébré aux Pays-Bas, il suffit que l'un des époux soit hollandais ou réside habituellement aux Pays-Bas. Peu importe qu'un tel mariage soit interdit par la loi nationale de l'un(e)... ou des deux époux(ses) : dès lors que l'un des intéressés est de nationalité néerlandaise ou qu'il réside aux Pays-Bas, les conditions de validité du mariage sont régies par la loi néerlandaise. Franchissant un pas de plus, le nouveau droit international privé belge érige plus ou moins l'admission du mariage homosexuel en principe d'ordre public : la loi nationale étrangère est écartée si elle prohibe le mariage homosexuel alors que l'un des intéressés a la nationalité d'un Etat ou a sa résidence habituelle sur le territoire d'un Etat dont le droit permet un tel mariage. Deux Français(es) résidant en Belgique pourront donc se marier sur le territoire belge.
Reste à savoir quels effets produiront de telles unions en France.
Pour répondre à la question, il convient de bien distinguer les deux étapes du raisonnement de droit international privé : le temps de la qualification précède nécessairement (I) celui d'une éventuelle reconnaissance (II).
[...] Peu importe qu'un tel mariage soit interdit par la loi nationale de l'un(e) . ou des deux époux(ses) : dès lors que l'un des intéressés est de nationalité néerlandaise ou qu'il réside aux Pays-Bas, les conditions de validité du mariage sont régies par la loi néerlandaise. Franchissant un pas de plus, le nouveau droit international privé belge érige plus ou moins l'admission du mariage homosexuel en principe d'ordre public : la loi nationale étrangère est écartée si elle prohibe le mariage homosexuel alors que l'un des intéressés a la nationalité d'un Etat ou a sa résidence habituelle sur le territoire d'un Etat dont le droit permet un tel mariage. [...]
[...] On vérifiera donc l'absence d'empêchement dans les deux lois. Quid si la loi nationale d'un des époux n'admet pas le mariage entre personnes de même sexe, mais que, en vertu des règles de droit international privé édictées par l'Etat du pays de célébration, le mariage peut cependant être valablement contracté sur son territoire ? Soit, par exemple, un mariage célébré à Amsterdam entre un Français et un Néerlandais ou un mariage contracté entre deux Italiens résidant habituellement en Belgique. L'union a certes été valablement célébrée au regard des règles de droit international privé néerlandais et belge, mais elle ne pourra produire effet en France : en droit international privé français, seules sont compétentes les lois nationales des intéressés ; or, l'une d'elles interdit le mariage entre personnes de même sexe. [...]
[...] Encore faut-il se garder d'une utilisation abusive des droits fondamentaux et, plus encore peut-être, d'une transposition pure et simple au droit des personnes et de la famille de principes communautaires conçus pour des questions d'une tout autre nature. Le problème de la réception ou du rejet des mariages homosexuels étrangers paraît donc pour le moins complexe. Le pire serait certainement de le traiter en oubliant de poser les questions de fond. D'autant que les difficultés renaîtront, irréductibles, lorsque le juriste qui avait cru échapper aux interrogations suscitées par le mariage entre personnes de même sexe se trouvera confronté à la question de l'homoparentalité. Bibliographie Droit de la famille, Gérard Cornu, éd 2006. Le Recueil Dalloz. [...]
[...] Elle présente cependant l'avantage de maintenir l'institution sous l'empire de la loi étrangère, qui correspond sans doute mieux aux attentes des parties qu'une loi dont ils ignorent, lorsqu'ils se marient qu'elle est susceptible de s'appliquer un jour. Resterait bien sûr à apprécier le jeu de l'ordre public. Une autre solution, moins rigoureuse il est vrai, consisterait à requalifier le mariage étranger ou partenariat à la française i.e. en PACS : l'union contractée à l'étranger produirait donc en France les effets d'un PACS français. [...]
[...] Si l'on s'en tient à la définition française du mariage, reste à savoir comment analyser l'union homosexuelle contractée à l'étranger. B - Inexistence du mariage homosexuel étranger et requalification en partenariat ? Reprenant une analyse développée jadis à propos d'unions qui auraient été célébrées accidentellement entre personnes de même sexe, on s'est demandé si de tels mariages ne seraient pas inexistants aux yeux du droit français. Dès lors en effet que manque un élément essentiel à l'union matrimoniale, élément naturel (la différence de sexe), élément volontaire (absence totale de volonté) ou élément formel (absence complète de célébration), on a prétendu que le mariage ne serait pas nul mais inexistant. [...]
Bibliographie, normes APA
Citez le doc consultéLecture en ligne
et sans publicité !Contenu vérifié
par notre comité de lecture