Le 12 novembre 2009, la Cour administrative d'appel de Douai a confirmé la condamnation de l'Etat que le tribunal administratif de Rouen avait prononcée. L'arrêt de la Cour contraint l'Etat à indemniser trois détenus, au motif que leurs conditions d'incarcération n'assuraient pas le respect de la dignité inhérente à la personne humaine.
Pourtant, si Emmanuel Kant avait été le premier à énoncer ce principe, en tant que principe moral, dans son impératif catégorique - « Agis de telle sorte que tu traites l'humanité, aussi bien dans ta personne que dans la personne de tout autre, toujours en même temps comme une fin et jamais comme un moyen » - le droit n'a quant à lui commencé à s'en saisir qu'au XXe siècle, à la suite des atrocités de la Seconde Guerre mondiale. Ce principe a pour but de protéger l'individu contre toute atteinte à ce qui fait de lui un être humain, peu importe l'origine de cette atteinte.
Autrement dit, la préservation de la dignité humaine revient à empêcher la réification de la personne humaine. Dès lors, la définition de la dignité humaine reposant sur la définition de l'être humain, se heurte à de nombreuses interrogations philosophiques. En effet, savoir ce qu'est l'être humain est un préalable indispensable pour cerner ce concept de dignité humaine, fondement des droits de l'homme.
[...] Elle avait certes accepté de subir ces mutilations dans son contrat, mais le principe de respect de sa dignité rendait nécessairement ce contrat nul. Un principe remis en cause Les exemples que nous venons d'étudier montrent bien que l'hégémonie du principe de dignité s'applique même au principe de liberté individuelle. La liberté d'entreprendre, comme la liberté d'aller et venir, s'inclinent dans l'affaire des lancers de nain. De même, un individu privé de sa liberté, par exemple incarcéré, conserve toujours le droit au respect de sa dignité. [...]
[...] Néanmoins, en pratique le principe du droit à la dignité se trouve remis en cause. En effet, les droits qu'il a engendrés n'ont pas le même caractère absolu et il se trouve mis en concurrence avec d'autres principes qui ont attrait à la liberté. Par exemple, la jurisprudence et les textes juridiques ont dû admettre quelques restrictions au respect de la dignité pour garantir la liberté de la recherche. Ainsi le Conseil Constitutionnel a admis, dans des conditions très strictes, la réification d'embryons produits in vitro, et donc la possibilité de les détruire ou de les utiliser à des fins thérapeutiques. [...]
[...] La charte des Nations Unies emploie l'expression de dignité humaine dans son Préambule, de même la Déclaration Universelle des droits de l'homme de 1948 (DUDH) évoque la dignité de la personne humaine à la fois en tête de son Préambule[3] et dans plusieurs de ses articles[4]. Plus tard, ce même principe est aussi proclamé par le Pacte international relatif aux Droits Civils et Politiques, et le Pacte international relatif aux Droits Economiques, Sociaux et Culturels de 1966[5], et plus récemment encore par la Charte des droits fondamentaux[6] de l'Union européenne qui a désormais une valeur juridique avec l'entrée en vigueur du traité de Lisbonne. [...]
[...] JORION, La dignité de la personne humaine in Revue du droit public, n°1-janvier 1999, p. 197-233 -P. MALAURIE, Le droit et l'exigence de dignité in Etudes, mai 2003, tome 398 -B. MATHIEU, La dignité de la personne humaine : quel droit? Quel titulaire? Recueil Dalloz Sirey, p. 282-286 -B. [...]
[...] Cette délimitation du concept de dignité est variable d'un point de vue temporel, mais aussi d'un point de vue spatial. Ainsi en Allemagne, où le respect de la dignité de la personne humaine est affirmé dès l'article 1er de la Constitution, la jurisprudence est allée jusqu'à ériger le droit à connaitre ses origines en corollaire du droit à la dignité. Mais notons que si la proclamation de ce principe peut être bénéfique, elle est loin d'être suffisante. Pour la relativiser, il est utile de remarquer que le projet national du gouvernement de Vichy de 1941, de même que l'actuelle Constitution iranienne, reconnaissent tous deux ce principe[17]. [...]
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