Il est très difficile d'imaginer la liberté sans les notions d'appartenir ou d'appropriation qui fondent la propriété. Et c'est justement la raison pour laquelle liberté et propriété sont très liées. Ainsi le libéralisme semble fondé sur l'idée qu'on est par essence propriétaire de sa propre personne. C'est cet individualisme possessif qui semble le mieux lier la propriété avec la liberté par son contenu.
Par ailleurs la forme de la propriété semble aussi garantir la liberté. En effet la définition dogmatique de la liberté qui a longtemps prévalu, associe elle-même liberté et propriété. L'idée principale de cette définition est que la propriété est un droit absolu d'une personne sur une chose. Mais cet absolutisme implique alors aussi une liberté totale dans la manière dont on peut disposer des choses que l'on possède.
Historiquement l'absolutisme de la propriété a été consacré en France comme un droit naturel, à partir du Code Civil de 1804. Toutefois cette consécration a dû départager les débats post révolutionnaires, dans lesquels le droit absolu à la propriété ne faisait pas l'unanimité. C'était un des objets de dispute entre les Girondins et les Montagnards. Depuis la propriété s'est ancrée dans les esprits comme étant effectivement un droit absolu sur une chose. Même les critiques de Proudhon ou Marx se sont basées sur cette définition. Pourtant aujourd'hui l'héritage du Code Civil semble parfois remis en cause par la jurisprudence.
Pour mieux comprendre le lien entre la propriété et la liberté nous verrons donc d'abord en quoi le Code civil garantit un droit absolu à la propriété, et au nom de quelles idées. Ensuite nous nous demanderons si ces idées ne doivent pas être nuancées tant par le droit lui-même que par d'autres idées. Ainsi on se demandera quelles limites on peut apporter à la liberté qui accompagne nécessairement la propriété.
[...] En effet sur le plan philosophique la propriété est souvent synonyme de liberté. Elle en est souvent la garantie, voire même une condition essentielle. Pour cela certains penseurs présentent donc la propriété comme un droit naturel à respecter car c'est ce droit qui rend vraiment la liberté possible. D'abord, on peut penser à Saint Thomas pour ce qui est de la propriété comme droit naturel. En effet Saint Thomas justifie la propriété à partir de pensées métaphysiques. Il considère que la domination n'est pas mauvaise en elle-même car elle existait déjà avant la chute d'Adam et Eve dans l'état d'innocence. [...]
[...] Ainsi, l'article 544 exprimait déjà une limite à la propriété dans les lois et les règlements. La propriété ne libère donc personne de sa responsabilité civile. C'est pourquoi on peut limiter l'usage qu'on fait de sa propriété par la possibilité d'une faute. Le propriétaire à le devoir de ne pas commettre de faute en faisant un mauvais usage de sa propriété par manque de prudence ou avec l'intention de nuire à autrui. C'est là l'exemple de l'affaire Clément- Baillard août 1915) avec l'érection de pics visant à nuire au dirigeable d'un voisin. [...]
[...] Or c'est à cause de cette même égalité que la propriété de chacun limite celle des autres. Ce principe s'exprime aussi dans le droit et dans la jurisprudence, notamment lorsque l'on regarde la manière dont sont définis les rapports de voisinage. Ainsi, les droits des voisins peuvent faire naître des obligations ou au moins limiter la liberté d'un propriétaire. Un propriétaire peut par exemple obliger son voisin à borner d'après l'article 646 du Code Civil. Il est à noter que ce droit est encore une fois issu de la propriété, laquelle est donc à la fois source de liberté pour soi et entrave à la liberté des autres. [...]
[...] Et dans son essence même, le droit de propriété suppose d'ailleurs un encadrement du droit égal de chacun par les droits des autres. La propriété n'en demeure pas moins très étroitement liée à la liberté par les nombreux droits qu'elle offre, et ce, bien au-delà du simple domaine juridique et dès la propriété qu'on a de soi-même. [...]
[...] C'est la justice qui est en jeu et c'est ce qui permet d'énoncer parfois des principes supérieurs à la propriété et la liberté qui l'accompagne. Ainsi, on peut penser à l'article 6 qui limite les conventions: "On ne peut déroger, par des conventions particulières, aux dispositions qui intéressent l'ordre public et les bonnes mœurs". Les conventions ayant pour enjeu la propriété doivent donc être elles-mêmes soumises à ces restrictions. Par ailleurs un principe notable qui semble limiter la propriété est l'exemple de la dignité humaine. [...]
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