L'antienne est connue : « au commencement était la faute ». En effet, en 1804, la faute, que l'on définit traditionnellement comme la violation d'un devoir ou la transgression d'une norme juridiquement obligatoire, était au coeur du droit de la responsabilité civile. On pouvait alors dire qu'il n'existait pas de responsabilité sans faute : l'ensemble des cas de responsabilité prévus par le Code civil étaient perçus comme reposant sur l'idée selon laquelle le responsable avait commis une faute, étant précisé que celle-ci était parfois présumée. On expliquait par exemple ainsi l'article 1384, alinéa 4 du Code civil, relatif à la responsabilité des parents du fait de leur enfant mineur. Dans l'esprit des rédacteurs du Code civil, lorsqu'un enfant venait à causer un dommage par sa faute, cette situation était très vraisemblable imputable à un défaut de surveillance et/ou d'éducation de l'enfant par les parents. Mais aujourd'hui, ce constat ne vaut plus. Les régimes de responsabilité sans faute, telle la responsabilité générale du fait des choses, fondée sur l'article 1384, alinéa 1er du Code civil, ou encore la responsabilité du fait des produits défectueux prévue aux articles 1386-1 et suivants du même Code, se sont multipliés. Aujourd'hui, la faute est donc loin de résumer à elle seule l'ensemble du droit de la responsabilité extracontractuelle.
A ce titre, on peut parler d'un déclin de la faute dans le droit de la responsabilité civile, tout du moins en ce qui concerne le rôle de la faute en tant que fait générateur de responsabilité (I). Pour autant, il ne faudrait pas en déduire que la faute a totalement disparue du droit de la responsabilité civile extracontractuelle. Cette notion continue à jouer un rôle essentiel dans un certain nombre de domaines, notamment lorsqu'il s'agit d'appréhender la faute de la victime (II). (...)
[...] Leur faute simple demeure sans aucun effet sur leur droit à indemnisation, lequel reste entier. On le voit, tout en consacrant une cause de responsabilité totalement détachée de la faute, les régimes de responsabilité objective ne parviennent toutefois pas à supprimer toute référence à cette notion. C'est alors la nécessité de prévenir les comportements dangereux qui explique cette permanence de la faute. La sanction de la faute de la victime, en tant qu'elle s'apparente à une peine privée, constitue une mesure de dissuasion qui, espère-t-on, va inciter les victimes potentielles à surveiller leur comportement. [...]
[...] La faute de la victime. Tout en évinçant la faute, comme fait générateur de responsabilité, les régimes de responsabilité sans faute y font malgré tout référence sous un autre angle, celui de la faute de la victime. Sur le terrain de l'article 1384, alinéa 1er du Code civil, la victime qui commet une faute ayant contribué à la survenance de son dommage et qui présente l'ensemble des caractères requis pour être entièrement exonératoire de responsabilité ne percevra ainsi aucune indemnisation. [...]
[...] Mais c'est surtout la multiplication des régimes spéciaux de responsabilité, à la suite d'interventions ponctuelles du législateur, qui a consacré le déclin de la faute comme fait générateur de responsabilité. La loi du 5 juillet 1985, relative aux accidents de la circulation a ainsi introduit, au profit des victimes de ce type d'accident, un droit à indemnisation totalement objectif, c'est-à-dire détaché de l'appréciation que l'on peut porter sur la conduite du débiteur d'indemnité. Or, en pratique, ce régime d'indemnisation est très fréquemment appliqué, de sorte que ce faisant, le législateur a ôté à la faute un champ d'intervention très important. [...]
[...] Le déclin de la faute dans le droit de la responsabilité extracontractuelle. Les régimes de responsabilité sans faute se multipliant, la faute a vu sa place réduite d'autant en tant que fait générateur de responsabilité A l'origine de cette situation, se trouve la volonté du législateur et des juges d'améliorer, dans un certain nombre d'hypothèses, le sort de la victime, cette amélioration étant rendue possible par le recours généralisé à la technique de l'assurance de responsabilité La multiplication des cas de responsabilité sans faute. [...]
[...] DROIT CIVIL : LES OBLIGATIONS Déclin et permanence de la faute dans le droit de la responsabilité extracontractuelle Introduction. L'antienne est connue : au commencement était la faute En effet, en 1804, la faute, que l'on définit traditionnellement comme la violation d'un devoir ou la transgression d'une norme juridiquement obligatoire, était au cœur du droit de la responsabilité civile. On pouvait alors dire qu'il n'existait pas de responsabilité sans faute : l'ensemble des cas de responsabilité prévus par le Code civil étaient perçus comme reposant sur l'idée selon laquelle le responsable avait commis une faute, étant précisé que celle-ci était parfois présumée. [...]
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