Déclin de la loi, Portalis, Code civil, inflation législative, Constitution, pensée humaniste, idéal de 1804
La loi devrait être claire, générale, abstraite et rare : c'est l'idéal exprimé par Portalis, l'un des rédacteurs du Code civil de 1804, dans son discours présentant le Code civil avant qu'il ne soit voté. À l'époque de la rédaction du Code civil, sous Napoléon, la pensée humaniste a en effet une grande influence : la loi étant l'expression de la raison humaine, elle est sacralisée. Ceci explique les critères évoqués par Portalis dans son discours. En respectant ces critères, la loi serait presque parfaite : compréhensible par tous, en étant générale et abstraite la loi est aussi applicable à toutes les situations, le juge l'adaptant aux cas particuliers. Nul besoin alors d'édicter de nouvelles lois. Mais cet idéal s'est progressivement effacé. La loi « stricto sensu », c'est-à-dire les textes votés par le Parlement dans le domaine et selon la procédure définis par la Constitution, a été désacralisée. Après la Seconde Guerre mondiale notamment, durant laquelle des lois moralement inacceptables ont été promulguées, la loi a perdu une partie du respect qui lui était dû. Cette désacralisation de la loi a entraîné ce que l'on peut appeler le « déclin de la loi ». Il s'agit de l'idée d'après laquelle la loi s'éloigne de plus en plus de cet idéal exprimé par Portalis au moment de la rédaction du Code civil. Si les articles du Code civil de 1804 étaient généralement courts et assez clairs, ce n'est plus le cas des articles de loi aujourd'hui. Les lois, de plus en plus nombreuses, semblent également être de plus en plus complexes et imparfaites.
[...] Un déclin soulevant d'autres problèmes et s'approfondissant Le déclin de la loi a permis l'affirmation d'autres sources du droit. Ainsi, la doctrine influence de plus en plus le législateur, et la jurisprudence tente de s'affirmer comme une source du droit. Bien que les arrêts de règlement soient interdits, la Cour de cassation vise parfois des principes pour fonder ses décisions, sans appui textuel. Elle va même parfois à l'encontre de la loi, comme avec l'arrêt Lorthioir en 1991, où elle s'arroge le droit de reconnaître une clause comme étant abusive, sans passer par un décret du Conseil d'État. [...]
[...] Le déclin de la loi se manifeste donc par divers problèmes, qui montrent bien que l'on s'éloigne de l'idéal de la loi. Des solutions au déclin de la loi ont bien sûr été cherchées, mais les résultats n'ont jamais été satisfaisants, et de nombreux problèmes liés à ce déclin de la loi demeurent encore aujourd'hui. II. Le déclin de la loi : un problème difficilement résoluble, aux multiples conséquences Les problèmes de déclin de la loi apparus progressivement auraient pu être résolus, mais jusqu'à présent les solutions trouvées n'ont pas bien fonctionné Elles ont même parfois créé d'autres problèmes : le déclin de la loi s'approfondit Des solutions imparfaites Diverses solutions ont été mises en œuvre pour remédier au déclin de la loi. [...]
[...] L'augmentation du nombre de lois est également due au fait qu'elles descendent de plus en plus dans le détail. Par exemple, la loi Hamon sur le fait-maison votée en février 2014 explique en détail ce qui peut être qualifié ou non de fait-maison On est bien loin de l'idéal de Portalis d'une loi générale. Si les lois sont aujourd'hui si nombreuses, c'est aussi parce qu'il existe de plus en plus de lois catégorielles ne s'adressant qu'à une partie des citoyens, à un corps de métiers par exemple. [...]
[...] Comment se manifeste ce déclin de la loi, et quelles en sont les conséquences ? La loi s'éloigne de plus en plus de l'idéal exprimé en 1804, sous différents aspects Ce déclin de la loi semble être une tendance difficilement inversable, soulevant de nouveaux problèmes (II). I. Une législation de plus en plus éloignée de l'idéal de 1804 Le déclin de la loi se manifeste par des problèmes majeurs, révélateurs de la distance prise avec l'idéal de Portalis. Le principal problème aujourd'hui est l'inflation législative À ce problème se joignent d'autres défauts, si importants qu'ils peuvent même sembler contraires à la Constitution L'inflation législative, un défaut majeur Chaque année, les lois votées par le Parlement sont de plus en plus nombreuses. [...]
[...] Un second problème révélateur du déclin de la loi actuel est celui des lois sans portée normative. Le Conseil constitutionnel peut également censurer ces neutrons législatifs. Il a par exemple censuré un article d'une loi sur l'éducation de 2005 disposant que l'objectif de l'école était la réussite de tous les élèves. Ce problème peut également se poser avec les lois mémorielles, comme la loi dite loi Taubira de 2001 reconnaissant la traite négrière. Ces lois n'ont pas vraiment de portée normative, dans la mesure où leur objectif est de dire l'Histoire. [...]
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