La conception actuelle du corps se trouve au croisement de différents domaines, scientifique, médical, juridique, politique et, bien sûr, philosophique. La revendication de libre disposition du corps en matière d'IVG par exemple, de chirurgie esthétique, de procréation médicalement assistée, voire d'euthanasie comme le prouve la récente affaire Humbert semble s'amplifier sous l'effet d'une demande sociale forte. L'ambiguïté de la question de la propriété du corps humain tient à sa nature même. « C'est un objet certes écrit C.CRIGNON-DE OLIVEIRA, mais pas un objet comme un autre (il fait corps avec le sujet) ; il n'est pas non plus tout à fait un sujet (on peut en céder une partie, un rein, du sang ; le prêter dans le cas des mères porteuses). Comment le construire juridiquement ? Pour arriver à penser la possibilité d'une propriété de l'homme sur son corps il faut reconnaître une distance entre le sujet et son corps. C'est avec la philosophie que l'on retrouve une telle idée dès Platon qui postule pour une séparation du corps et de l'âme. Descartes reprendra cette idée en y ajoutant une subtilité ; corps et âme sont bien distincts mais ils agissent l'un sur l'autre. Rappelons qu'à cette période, l'anatomie fait de grands pas en avant et que l'on est amené à considérer le corps comme objet de recherche. Ce faisant, il reconnaît la possibilité d'un droit subjectif de l'homme sur son corps. Le sujet soumet les objets qui se trouvent en sa possession et de ce fait l'âme peut devenir propriétaire du corps. C'est avec Locke qu'apparaît pour Fierens une première théorie explicite de la propriété du corps. En effet, Locke, tout comme Hobbes affirme qu'il existe un droit absolu de conserver sa vie. De plus, il considère que ce qui fonde l'appropriation privée c'est le travail donc le corps. Puisque la propriété privée est en quelque sorte « la prolongation du corps » il est nécessaire de reconnaître à l'individu un droit absolu sur celui ci et d'en garantir la protection. Cette approche, postulant résolument une propriété de la personne sur son corps ouvre la possibilité de voir se développer un marché du vivant. C'est reconnaître l'existence d'un droit subjectif à disposer des éléments de son corps comme de celui d'autrui (problème éthique esclavage, eugénisme, euthanasie …) A cette approche s'oppose celle de philosophes comme Aristote qui bien que reconnaissant la dualité corps-âme ne conçoit une possible séparation entre ces deux éléments. Reconnaître que l'homme n'existe pas sans son corps c'est consacrer l'indisposition de ce dernier pour autrui et soi même.
En droit français reconnaît-on cette dualité en d'autres termes, la personne est elle propriétaire de son corps et ou de ses éléments ? Peut-elle détenir sur celui ci l'usus, l'abusus et le fructus ? Et si elle ne le peut, quelqu'un d'autre le peut-il ? Nous nous concentrons sur la propriété corporelle du corps et non sur sa dimension incorporelle impliquant les questions de propriété intellectuelle comme celle de la brevetabilité des éléments du corps humain notamment les gènes.
[...] De plus en plus la loi cherche à réglementer les prélèvements d'organes comme en témoigne encore récemment un décret du 2 août 2005. Les personnes incapables juridiquement Dans certaines situations, une personne peut se trouver hors d'état d'exprimer un consentement à une intervention sur son corps. - S'agissant des mineurs, ce sont les représentants légaux qui donnent leur consentement et si leur refus met en danger la vie de l'enfant, le médecin peut saisir le juge ; cependant, depuis la loi du 4 mars 2002, le mineur peut valablement s'opposer à ce que ses parents soient consultés sur les décisions à prendre, à condition d'être accompagné par une personne majeure. [...]
[...] C'est reconnaître l'existence d'un droit subjectif à disposer des éléments de son corps comme de celui d'autrui (problème éthique esclavage, eugénisme, euthanasie ) A cette approche s'oppose celle de philosophes comme Aristote qui bien que reconnaissant la dualité corps-âme ne conçoit une possible séparation entre ces deux éléments. Reconnaître que l'homme n'existe pas sans son corps c'est consacrer l'indisposition de ce dernier pour autrui et soi même. Problématique : En droit français reconnaît-on cette dualité en d'autres termes, la personne est elle propriétaire de son corps et ou de ses éléments ? Peut-elle détenir sur celui ci l'usus, l'abusus et le fructus ? [...]
[...] 1988) a autorisé une sorte de contrat de cobaye pour des expérimentations à finalité thérapeutique directe (dont le patient est appelé à bénéficier lui même) mais également pour les progrès de la science (auquel cas une rémunération ou une indemnité en compensation des contraintes subies doit être versée au sujet passif consentant librement) ; de plus, si l'aliénation totale du corps, assimilable à de l'esclavage, est illicite, le code civil ne suggère-t-il pas l'idée que les salariés louent à l'employeur la force de travail qui est incluse dans leur corps (art 1711 al. ? Face aux incertitudes du droit quant au statut du corps humain et aux limites de la liberté de l'individu dans l'utilisation des nouvelles techniques biomédicales, des évolutions doctrinales ou jurisprudentielles sont toujours possibles Bibliographie CARBONNIER J., Droit civil, Les personnes, 21e édition, PUF, Thémis, Droit privé, 2000µ. CORNU G., Droit civil, Introduction, Les personnes, Les biens, 12e édition, Montchrestien, coll. Domat droit privé n°473 et suiv. [...]
[...] Le dépassement de l'idée de propriété : le concept de dignité Pour Fierens, il y a d'abord eu avec la philosophie l'émergence d'un droit illusoire de propriété de la personne sur son corps nécessitant une protection juridique forte. Ceci recèle des dangers non négligeables. En effet, considérer le corps comme un objet de propriété potentielle c'est courir le risque d'une chosification de celui ci avec tout ce que cela implique. On pense ici à l'esclavage, à l'holocauste également. Fierens en vient à proposer de dépasser la réflexion en terme de propriété au profit de l'idée de dignité de la personne, vague idée dans un premier temps devenu concept juridique à part entière. [...]
[...] L'article 16 du Code Civil consacre la primauté de la personne et interdit toute atteinte à la dignité de celle-ci et garantit le respect de l'être humain dès le commencement de sa vie. En 1994, (94-343-344 DC) le Conseil Constitutionnel reconnaît la dignité de la personne contre toute forme d'asservissement et de dégradation comme principe à valeur constitutionnelle en référence au Préambule de la Constitution de 1946. Néanmoins, ce principe a du mal à quitter la sphère du droit naturel pour entrer pleinement dans le droit positif, du fait d'appréciations contradictoires et de la concurrence avec d'autres droits. [...]
Bibliographie, normes APA
Citez le doc consultéLecture en ligne
et sans publicité !Contenu vérifié
par notre comité de lecture