« La liberté s'arrête là où commence celle des autres ». Il en va ainsi de la liberté syndicale lorsque son exercice entraîne la violation d'autres principes constitutionnellement protégés tel que celui de non-discrimination.
Il s'agit, dans cet arrêt de la Chambre mixte de la Cour de cassation du 10 avril 1998, d'un litige né entre un groupement de personnes dénommé Font National de la Police et plusieurs syndicats tels que le Syndicat national des policiers en tenue (SNPT) ou encore la Confédération générale du travail (CGT).
Ces derniers reprochent au Front National de la police de se prévaloir d'une part de la qualité de syndicat professionnel et d'avoir pris d'autre part la dénomination d'un parti politique.
[...] La Cour de cassation, confrontée au respect de ce principe contourne le problème en admettant que le principe de la liberté syndicale ne fait pas obstacle à ce que la qualité de syndicat professionnel d'un groupement poursuivant des objectifs politiques soit contestée en justice et sanctionnée par l'interdiction de se prévaloir de cette qualité. En conséquence pour les juges l'exercice d'un droit fondamental tel que l'exercice du droit des syndicats de se constituer librement doit se traduire par le respect d'autres principes et libertés eux aussi fondamentalement consacrés. [...]
[...] La Cour de cassation, quant à elle, estime que même en l'absence de disposition expresse le prévoyant et indépendamment du droit pour le Procureur de demander la dissolution d'un syndicat lorsque cela s'avère nécessaire il est possible pour toute personne justifiant d'un intérêt à agir de contester la qualité de syndicat professionnel d'un groupement qui ne satisfait pas aux exigences des articles L411-1 et L411-2 du Code du travail, et qu'en l'espèce l'action des syndicats contestataires est recevable. En admettant pour la première fois une telle possibilité, les juges de la Haute juridiction vont être confrontés, se faisant, à l'exigence du respect d'une garantie fondamentale. [...]
[...] Le raisonnement de la Cour de cassation est simple ; Le FNP, qui est un instrument du front national, lequel véhicule une idéologie qui prône des distinctions fondées sur la race, la couleur, l'ascendance, l'origine nationale ou ethnique, constitue en lui-même et par sa seule dénomination une atteinte au principe de non-discrimination. Les juges, en se fondant sur le droit des obligations et sur les dispositions du Code civil, confirment l'arrêt rendu par la cour d'appel de Paris en ce qu'il interdit au FNP de se prévaloir de la qualité de syndicat professionnel. [...]
[...] La Haute juridiction rejette le pourvoi au motif qu'en l'espèce il ne s'agit pas de dissoudre le Front National de la Police, mais de lui interdire de se prévaloir de la qualité de syndicat professionnel compte tenu de l'illicéité de leur cause et de leur objet. La Cour de cassation admet que le respect du principe de la liberté syndicale ne fait pas obstacle à ce que toute personne ayant un intérêt à agir puisse contester la qualité de syndicat professionnel d'un groupement ayant cette vocation en se fondant sur le droit des obligations et en s'en remettant à l'appréciation souveraine des juges du fond quant aux faits déterminants de l'espèce (II). [...]
[...] Pourtant, la sanction qui découle normalement de l'illicéité de l'objet et de la cause d'un contrat est la nullité en droit civil et la nullité ou l'inopposabilité en droit des sociétés. En l'espèce, la sanction semble être moins sévère, car elle n'empêche pas le groupement d'exister, mais seulement de bénéficier de certains droits réservés aux syndicats professionnels. Une question reste toutefois en suspens : la Cour de cassation a-t-elle sanctionné le FNP pour avoir pris la dénomination d'un parti politique ou pour avoir pris la dénomination d'un parti politique d'extrême droite ? [...]
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