L'arrêt rendu par la Chambre mixte de la cour de cassation le 27 février 1970 marque un tournant dans la jurisprudence en matière de réparation civile.
Pour la première fois, la juridiction civile accordait une indemnité à une concubine en réparation du préjudice moral et matériel subi par elle en raison de la mort accidentelle de son concubin.
En l'espèce, un homme a été tué à la suite d'un accident de circulation dont l'auteur a été identifié.
La concubine du défunt a assigné l'auteur du dommage en réparation du préjudice résultant pour elle de la mort de son concubin. Le juge de première instance a fait droit à sa demande en considérant que ce concubinage offrait des garanties de stabilité et ne présentait pas de caractère délictueux.
L'auteur du dommage a interjeté appel. La cour d'appel de Paris, dans un arrêt du 16 octobre 1967 a infirmé le premier jugement et débouté la concubine de son action au motif que « le concubinage ne crée pas de lien de droit entre les concubins, ni à leur profit, ni vis-à-vis des tiers ».
[...] Droit civil le dommage Commentaire d'arrêt : Chambre mixte février 1970 L'arrêt rendu par la Chambre mixte de la Cour de cassation le 27 février 1970 marque un tournant dans la jurisprudence en matière de réparation civile. Pour la première fois, la juridiction civile accordait une indemnité à une concubine en réparation du préjudice moral et matériel subi par elle en raison de la mort accidentelle de son concubin. En l'espèce, un homme a été tué à la suite d'un accident de circulation dont l'auteur a été identifié. [...]
[...] Lorsqu'un individu est blessé dans un accident, la victime du dommage est le blessé, il subit bien un dommage direct. La question se complique dès lors qu'une personne se prévaut d'un dommage causé par l'effet du dommage initial. Ainsi, il arrive qu'une personne devienne une victime médiate du dommage, mais la personne souffre tout de même du dommage à titre personnel. La concubine peut souffrir de plusieurs préjudices causés par le décès accidentel de son amant. Il s'agit bien d'un dommage direct puisque la concubine agit en son propre nom et pas au nom du défunt, elle réclame la réparation de son préjudice personnel. [...]
[...] La Cour de cassation casse l'arrêt rendu par la cour d'appel de Paris au visa de l'article 1382 du Code civil. La cour considère que l'article 1382 qui ordonne que l'auteur de tout fait ayant causé un dommage à autrui sera tenu de le réparer, n'exige pas, en cas de décès, l'existence d'un lien de droit entre le défunt et le demandeur en indemnisation La Cour d'appel qui a subordonné l'application de l'article 1382 du Code civil à une condition qu'il ne contient pas a violé le texte de l'article. [...]
[...] La concubine est donc une victime par ricochet. La question des victimes par ricochet est très sensible car il s'agit dès lors pour la jurisprudence de limiter le champ d'action du ricochet autrement dit il s'agit de déterminer les personnes en droit d'alléguer un préjudice découlant du dommage initial. Le professeur Georges Ripert dans Le prix de la douleur a imaginé jusqu'où pourrait aller la succession des actions en responsabilité si celles-ci n'étaient pas soumises à des conditions. L'auteur prend l'exemple d'un arrêt du 22 octobre 1946 indemnisant une fillette pour le dommage qu'elle avait subi personnellement à la suite d'un accident et de son père ; il ironise de manière cynique sur le fait que la fille souffre de son infirmité, le père souffre de voir sa fille souffrir, la femme souffre de voir souffrir son mari et à un degré plus éloigné, si le père abîmé dans sa douleur néglige son service, son patron pourra-t-il agir contre l'auteur de l'accident ? [...]
[...] Ainsi, la chambre mixte qui rappelle les termes du jugement de première instance précise que le concubinage n'était pas délictueux Par là, le juge entend écarter le concubinage adultérin. De même, et parce que la moralité est encore fragile, pour que l'intérêt de la concubine soit reconnu, les relations de concubinages doivent être stables et continues. La seule circonstance de la présence de deux maîtresses conduit aussitôt à écarter la stabilité de la relation de concubinage. Un peu plus tard, dans un arrêt du 19 juin 1975, le juge, animé par un courant libéral, admet l'indemnisation de la concubine dans le cadre d'une relation adultérine. [...]
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