Les ayants droit de la victime assignent en réparation de leur préjudice la SNCF, sur un fondement contractuel. La Cour d'appel donne raison aux requérants, et refuse d'exonérer entièrement la SNCF par la faute de la victime, au motif que le comportement délibérément dangereux de la victime n'était pas une cause d'exonération de responsabilité. La SNCF se pourvoie en cassation, estimant que le comportement délibérément dangereux de la victime était un comportement imprévisible et irrésistible de nature à l'exonérer totalement de sa responsabilité (...)
[...] En revanche, si l'obligation est de moyen, la partie sur laquelle pèse l'obligation devra seulement faire tout son possible pour atteindre le résultat demandé. Ainsi, si elle n'y parvient pas, l'autre partie devra prouver une faute à son égard pour engager sa responsabilité contractuelle. Pour s'en tenir au transport de personnes, la jurisprudence a donc ajouté, au contrat conclu par le transporteur avec les passagers, une telle obligation : alors que, auparavant, la victime d'un accident de transport devait prouver la faute du transporteur, un arrêt du 21 janvier 1911 a posé que, dorénavant, celui-ci assumerait l'obligation de conduire le passager, sain et sauf, à destination (Cass. [...]
[...] La Chambre mixte de la Cour de cassation approuve : la SNCF ne peut s'exonérer de sa responsabilité en invoquant la faute d'imprudence de la victime que si cette faute présente les caractères de la force majeure Selon les juges du droit : ayant relevé qu'il n'était pas imprévisible que l'un des passagers ouvre ou tente d'ouvrir l'une des portes des voitures et que l'ouverture intempestive par un passager d'une porte donnant sur la voie est évitable, notamment par la présence d'agents de contrôle à même d'intervenir dans tout le train , la Cour d'appel a pu retenir que la faute de la victime, n'étant ni imprévisible ni irrésistible pour la SNCF, ne présentait pas les caractères de la force majeure Il y a eu cependant un fort débat jurisprudentiel sur ces deux derniers critères. Certains arrêts, notamment ceux de la première chambre civile de la cour de cassation, ont considéré que l'imprévisibilité n'était pas forcément requise, et que seul l'irrésistibilité de l'évènement devait être prise en compte. L'assemblée plénière a essayé de trancher le conflit, dans ses deux arrêts rendus le 14 avril 2006. [...]
[...] La Cour de cassation répond par la négative. Selon la première chambre civile, le transporteur ferroviaire, tenu envers les voyageurs d'une obligation de sécurité de résultat, ne peut s'exonérer de sa responsabilité en invoquant la faute d'imprudence de la victime que si cette faute, quelle qu'en soit la gravité, présente les caractères de la force majeure En l'espèce, la Cour d'appel a pu retenir que la faute de la victime, n'étant pas imprévisible ni irrésistible pour la SNCF, ne présentait pas les caractères de la force majeure, et en a déduit à bon droit que celle-ci n'était pas fondée à prétendre s'exonérer de sa responsabilité Ainsi le transporteur cherchait à s'exonérer totalement de sa responsabilité en démontrant les caractéristiques de la force majeure s'appliquant selon lui, à la faute commise par la victime (II). [...]
[...] Seulement, en l'espèce, la Cour de cassation considère que la faute de la victime n'était pas intentionnelle, puisque la victime était d'un jeune âge. Elle considère que l'évènement n'était pas imprévisible, puisque le train ne disposait pas de système de verrouillage des portes, et qu'il était certain que la SNCF en était avertie. Elle aurait dû prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité de tous les usagers. Elle reprend ici le critère d'inévitabilité, en estimant que l'ouverture intempestive par un passager d'une porte donnant sur la voie était évitable Elle semble cependant associer le critère d'inévitabilité avec celui de l'irrésistibilité. [...]
[...] Plus récemment, la première chambre civile, dans un arrêt rendu le 30 octobre 2008, a repris l'exigence des deux critères. Elle énonce dans un attendu de principe fondamental que seul un événement imprévisible lors de la conclusion du contrat et irrésistible dans son exécution est constitutif d'un cas de force majeure Ainsi, le transporteur, pour s'exonérer totalement de sa responsabilité, devait prouver que la victime avait elle-même commis une faute, irrésistible et imprévisible à son égard, qui l'avait amené à sa propre perte. [...]
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