Au regard des articles 1382 et 1383 du Code civil se dégage une obligation de réparation du préjudice du à la faute du responsable, la faute est donc un fait générateur de responsabilité délictuelle. Malgré l'absence de définition de cette notion de faute, la jurisprudence traditionnelle supposait la réunion d'un élément objectif : acte ou abstention du responsable, associé à un élément subjectif rendant la faute imputable au responsable . Ainsi la faculté de discernement c'est-à-dire l'aptitude à apprécier la portée de ses actes était retenue comme élément constitutif de la faute délictuelle jusqu'au revirement de jurisprudence marqué par les arrêts de la Cour de cassation en date du 9 mai 1984. Dès lors la faute d'un incapable mineur peut engager sa responsabilité sans considération des éléments de son comportement propres à son âge comme le montre l'arrêt de la 2ième chambre civile de la Cour de cassation en date du 28 février 1996.
En l'espèce, Sonia Pierre, mineure de 8 ans a été confiée par ses parents à Monsieur Bernard Aybram pour une soirée. Jouant sous une table elle en surgit brutalement et heurta David Aybram, fils mineur de son gardien, qui portait une casserole d'eau chaude, se brulant gravement. En vertu de l'article 1384 al. 4 du Code civil permettant d'agir contre les parents de l'enfant responsable, la mère de la victime assigna en responsabilité Monsieur Bernard Aybram qui fut déclaré entièrement responsable du préjudice subit par Sonia Pierre par la cour d'appel de Besançon dans un arrêt du 27 janvier 1994. Monsieur Aybram s'est alors pourvu en cassation, contestant le refus des juges du fond de retenir la faute de la victime. En effet par son comportement imprévisible, Sonia Pierre a concouru a la réalisation de son dommage, mais les juges du fond ont écarté cette faute de la victime en raison de son jeune âge.
Dès lors l'existence d'une faculté de discernement constitue t elle une condition nécessaire à la mise en œuvre de la responsabilité délictuelle pour faute ? Au regard de quel modèle d'appréciation le comportement de l'enfant peut il donc être considéré comme fautif ?
Les juges de la Cour de cassation ont retenu la faute de la victime entrainant une exonération partielle du responsable sans se pencher sur les éléments subjectifs dont découlent le comportement de ladite victime, confirmant leur refus d'excuser le comportement d'un enfant eu égard à son âge. En effet le modèle d'appréciation du comportement de l'enfant semble être celui du « bon père de famille » et non celui d'un autre enfant du même âge.
A travers « l'abandon d'une conception subjective de la faute au profit d'une conception purement objective » ( I ) nous pouvons observer une évolution jurisprudentielle de la notion de faute qui mènera à « une appréciation abstraite de la faute de l'enfant » ( II )
[...] En effet si le but premier du glissement jurisprudentiel vers une conception purement objective de la faute était une plus grande indemnisation des victimes, la pratique produit des effets contraires concernant la faute de l'enfant victime qui est facilement retenue à son encontre et donne lieu à une indemnisation plus difficile de l'enfant victime comme le prouvent les arrêts Derguini et Lemaire. En l'espèce, la faute de la victime est retenue par les juges de la Cour de cassation qui refusent d'apprécier la faute de l'enfant victime par rapport au comportement normal d'un enfant, ce qui aura pour effet une indemnisation partielle de Sonia Pierre. La doctrine semble donc attendre un minimum d'adaptation de ce modèle d'appréciation au vu des résultats pratiques. [...]
[...] Arrêt du 28 février 1996, 2e chambre civile de la Cour de cassation Au regard des articles 1382 et 1383 du Code civil se dégage une obligation de réparation du préjudice due à la faute du responsable, la faute est donc un fait générateur de responsabilité délictuelle. Malgré l'absence de définition de cette notion de faute, la jurisprudence traditionnelle supposait la réunion d'un élément objectif : acte ou abstention du responsable, associé à un élément subjectif rendant la faute imputable au responsable. [...]
[...] Au regard de quel modèle d'appréciation le comportement de l'enfant peut il donc être considéré comme fautif ? Les juges de la Cour de cassation ont retenu la faute de la victime entrainant une exonération partielle du responsable sans se pencher sur les éléments subjectifs dont découle le comportement de ladite victime, confirmant leur refus d'excuser le comportement d'un enfant eu égard à son âge. En effet le modèle d'appréciation du comportement de l'enfant semble être celui du bon père de famille et non celui d'un autre enfant du même âge. [...]
[...] Ainsi, la faute qui découle de l'acte du responsable peut être une faute de commission voire d'abstention en cas d'existence d'une obligation d'action préalable, et ce indifféremment de sa gravité ou de son caractère intentionnel. L'appréciation de la faute par le juge se fait alors in abstracto c'est-à-dire non pas au regard du comportement habituel du défendeur, mais en confrontant sa conduite à celle qu'aurait eu un modèle, individu moyen : le bon père de famille ainsi les particularités strictement personnelles au responsable sont éludées de l'appréciation de la faute. [...]
[...] La conception purement objective de la faute délictuelle est alors pleinement consacrée au détriment de la conception subjective à travers ces arrêts et comme on peut le voir en l'espèce son application n'est pas sans difficultés. Les conséquences de la conception objective de la faute : une appréciation abstraite de la faute de l'enfant Le comportement de l'enfant est désormais apprécié au regard du modèle abstrait du bon père de famille (A') en raison de la conception objective de la faute, mais l'application de ce modèle d'appréciation du comportement est contestée dans le cas de la faute de l'enfant (B') A') Le comportement de l'enfant apprécié au regard du modèle abstrait du bon père de famille Comme la conception objective de la faute implique l'indifférence à tout motif propre à la personne responsable, la Cour de cassation semble avoir opté en l'espèce pour une appréciation abstraite de la faute de l'enfant. [...]
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