La possibilité pour un sujet de droit d'être responsable du fait d'une chose n'avait été envisagée, dans le Code civil de 1804, que dans des hypothèses limitées. En effet, seuls les articles 1385 et 1386 faisaient du fait de la chose une cause génératrice de responsabilités, dans les cas très spéciaux des animaux ou des bâtiments en ruine. Cette responsabilité a cependant fait l'objet d'une évolution historique fondamentale dès la fin du XIXe siècle.
La fin du XIXe siècle a été le théâtre d'une modification profonde des causes et du nombre d'accidents. Le développement du machinisme, lié à l'avènement de la révolution industrielle a en effet été source d'un nombre croissant de dommages causés par des choses inanimées (NB : une chose inanimée n'est pas une chose immobile), sans que la faute de leur propriétaire ne puisse le plus souvent être établie. La nécessité d'indemniser les victimes sur la base d'une responsabilité détachée de la faute s'est alors imposée, bien qu'aucun texte du Code civil n'ait alors semblé de nature à fonder une telle responsabilité.
[...] Le détenteur serait quant à lui gardien du comportement de cette chose et responsable des seuls préjudices causés par son utilisation défectueuse. Cette distinction a été retenue par la jurisprudence à partir d'un arrêt de la Cour de cassation du 5 janvier 1956 (2e Chambre civile de la Cour de cassation janvier 1956, arrêt Oxygène liquide, JCP retenant la responsabilité du fabricant du fait de l'explosion de bouteilles d'oxygène bien que la bouteille ait été sous la surveillance du transporteur lors de l'accident). Cette solution a depuis connu des applications variées (bombe aérosol ou bouteille qui explosent, téléviseur qui implose). [...]
[...] Les détracteurs d'une responsabilité objective du fait des choses ont soutenu que dans des situations où l'homme dirige la chose, il n'y avait pas lieu de faire application de l'article 1384 alinéa 1. La Cour de cassation, dans l'arrêt Jeand'heur, a clairement refusé d'opérer une telle distinction. Par la suite, la jurisprudence a plusieurs fois rappelé que la mise en mouvement de la chose par l'homme n'exclut pas l'application de l'article 1384 alinéa 1. Ainsi la responsabilité du fait des choses a été retenue pour un porte-aiguille que maniait un chirurgien (Arrêt du 30 décembre 1936, DP 37.I.5), pour un casier à bouteilles que portait un livreur, pour un ski au pied du skieur (Grenoble juin 1966, JCP67.II.14928) pour une collision de bicyclette (Chambre criminelle 21 juin 1990, RTDciv 1991, p.124). [...]
[...] Dans une telle situation, la jurisprudence présume donc le fait de la chose, son rôle actif dans la production du dommage. La victime doit seulement prouver l'intervention matérielle de la chose et sur cette base une présomption de causalité est déduite par le juge (2e Chambre civile de la Cour de cassation novembre 1984, Bull civ.ll.n° 184 ; au sujet d'un escalator, 2e Chambre civile de la Cour de cassation 1er février 1973, JCP 74.II mars 2001, D 2001.inf rap mars 2003 D 2003.inf rap. [...]
[...] Les solutions varient en effet en fonction de la complexité d'utilisation de la chose, de la durée et des circonstances du prêt. Lorsque le contrat qui emporte remise de la chose est conclu par un non professionnel avec un professionnel, la jurisprudence reconnaît facilement un transfert de la garde d'autant plus que le professionnel sera le plus souvent assuré. Par exemple, le garagiste qui se voit confier un véhicule en devient le gardien (2e Chambre civile de la Cour de cassation mai 1964, RTDciv 1965, p 128). [...]
[...] Il peut s'agir d'une chose solide ou gazeuse, voire d'une chose purement immatérielle comme une onde sonore, électrique, ou même une image de télévision (Tribunal de grande instance de Paris février 1991, JCP 1992.II.21809). Le fait de la chose La notion de fait de la chose, mentionnée à l'article 1384 alinéa renvoie à une exigence de causalité qui est une exigence générale en matière de responsabilité civile. La responsabilité du gardien ne peut en effet être engagée qu'à la condition que le dommage subi par la victime ait été causé par la chose sur laquelle il exerce ses pouvoirs. [...]
Bibliographie, normes APA
Citez le doc consultéLecture en ligne
et sans publicité !Contenu vérifié
par notre comité de lecture