Le logement abritant le couple constitue un bien crucial. D'abord, humainement et socialement, car le logement est un besoin vital et une attache sociale et affective. Ensuite, patrimonialement, parce que le logement conjugal ou familial est, souvent, le seul bien de valeur dont dispose le couple. Il représente une partie importante, voire exclusive, de la fortune conjugale.
Le logement familial fait l'objet d'une protection renforcée de la part de la loi. L'objectif est de lier, autant que faire se peut, le sort du logement à la volonté des deux époux, que le lien entretenu par un époux avec le logement soit assuré par un droit personnel (droit de bail) ou un droit réel (droit de propriété et ses démembrements). La loi s'est efforcée de lutter contre la perte unilatérale, c'est-à-dire de l'initiative d'un seul époux, des droits assurant le logement de la famille.
La perte de ces droits peut avoir des causes diverses : des faits, des actes, des engagements.
- Des faits : un époux, pour diverses raisons, peut porter atteinte à l'intégrité du logement, par des dégradations voire des destructions (incendie, saccage, défaut d'entretien du local loué...). Si de tels faits sont sans doute répréhensibles, la loi est fort dépourvue pour les sanctionner ou les prévenir. Comme souvent, le droit est faible contre les actes matériels (L'article 215 vise seulement des actes juridiques). Tout au plus, l'article 220-1 pourrait-il servir de support pour prévenir de tels actes. De manière résiduelle, l'article 14 (L. 06 juill. 1989) pourvoit aux conséquences d'un fait - l'abandon - du logement par l'époux titulaire du bail.
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- Des actes : un époux peut, par toutes sortes d'actes juridiques, mettre un terme (ou seulement amoindrir) au droit réel ou au droit personnel qui lui assure son logement : vente, donation, hypothèque du logement, bail, résiliation du bail.... C'est ce que vise l'article 215, alinéa 3, lorsqu'il fustige le fait de « disposer des droits par lesquels est assuré le logement de la famille ». Par des moyens distincts, les articles 215, alinéa 3, et 1751 tendent à protéger le conjoint contre les conséquences de la disposition, par l'un des époux, des droits assurant le logement de la famille (...)
[...] De même, la souscription d'un droit réel accessoire pouvant tendre à la saisie du logement ou des meubles meublants (hypothèque, gage : Civ. 1re déc Bull. civ. 357) est concernée. Le critère essentiel des actes prohibés consiste dans la perte ou l'atteinte à la jouissance du logement : ainsi, la vente du logement par l'époux propriétaire est-elle valable dès lors que l'acte inclut une réserve de la jouissance aux deux conjoints (TGI Paris déc. 1970), mais ne l'est plus en cas de réserve d'usufruit au bénéfice au seul époux propriétaire vendeur (Civ. [...]
[...] A peine deux mois plus tard, l'immeuble est partiellement détruit par un incendie. L'épouse, qui a accepté le montant des indemnités versées par l'assureur, tout en émettant des réserves, assigne alors ce dernier en dommages-intérêts au motif que la résiliation opérée par son mari n'était pas efficace en raison de la perte par ce dernier de la jouissance du logement. La Cour de cassation donne gain de cause à l'épouse en jugeant, au visa de l'article 215, que l'époux ne pouvait pas résilier sans le consentement de son conjoint le contrat d'assurance garantissant le logement familial Ainsi, par cette décision, la Cour de cassation décide-t-elle que l'assurance de dommages portant sur le local abritant la famille constitue, au sens de l'article 215, alinéa un droit par lequel est assuré le logement de la famille Une telle extension du domaine des actes soumis à la cogestion de l'article 215, alinéa est assurément audacieuse, puisque la protection s'étend, par une sorte de subrogation réelle, au droit à la valeur de remplacement du local objet de cette jouissance. [...]
[...] En d'autres termes, ce sont les droits octroyant la jouissance du logement aux époux qui sont visés par l'article 215. Un arrêt récent (Civ. 2e mars 2004) semble pourtant donner une nouvelle orientation à l'article 215, alinéa tant sur le plan des actes que des droits visés par ce texte. En l'espèce, deux époux étaient engagés dans une procédure de divorce. Dans le cadre de celle-ci, l'épouse s'est vue attribuer judiciairement (vraisemblablement sur le fondement de l'article 255) la jouissance du logement familial qui appartenait en propre au mari. [...]
[...] La sanction de la cogestion prévue par l'article 215, alinéa est la nullité de l'acte fait par un seul époux. L'action en nullité peut être engagée par le conjoint pendant l'année à partir du jour où il a eu connaissance de l'acte, sans pouvoir jamais être intentée plus d'un an après que le régime matrimonial s'est dissous Toutes les dispositions de l'acte sont annulées, de sorte que ne peut être déclarée valable une promesse de porte-fort incluse dans cet acte (Civ. [...]
[...] En cas de décès d'un des époux, le conjoint survivant co-titulaire du bail dispose d'un droit exclusif sur celui-ci sauf s'il y renonce expressément. L'engagement : un époux peut, indirectement et de façon parfois inconsciente, mettre en péril le logement de la famille par ses engagements envers des tiers. Dès lors que le logement, dont la qualification peut varier bien commun, bien personnel, bien indivis ne fait pas l'objet d'un traitement particulier sur le plan du passif, sa perte peut être consécutive à la souscription de dettes par un époux. [...]
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