[...] En premier lieu, les obligations sujettes à compensation doivent être réciproques. Cette condition de réciprocité est de l'essence même de la compensation, elle lui est co-substantielle : il faut que les titulaires des obligations compensables soient personnellement et cumulativement créanciers et débiteurs l'un de l'autre.
La jurisprudence a une lecture réaliste de cette condition de réciprocité : Com. 9 mai 1995 (Infra ? Fiche TD) ? nous reviendrons dans un instant sur les faits de cette espèce ; notons toutefois qu'une société B voulait faire jouer une compensation entre une dette qu'elle a envers une société A et une créance qu'elle détient sur une société C. Alors même que l'on se trouve en présence d'une relation triangulaire, la jurisprudence a considéré que les obligations compensables étaient réciproques car, les sociétés A et C ayant confondu leur patrimoine, on pouvait en déduire que « sous l'apparence de deux sociétés A et C distinctes, il n'existait en fait qu'une seule personne morale ».
[...] L'effet extinctif est expressément visé par les articles 1289 et 1290 (« les dettes s'éteignent ») et n'appelle pas de longs développements. On rappellera que cet effet extinctif a pour objet non seulement les obligations réciproques, mais également leurs accessoires (sûretés) et que, comme tout paiement, il interrompt la prescription? même si la compensation doit alors avoir été invoquée par le débiteur (Com. 6 février 1996, Bull. Civ., IV, n° 42 ; D. 98, 87, V. Brémont ; D. 96, Som. 336, Ph. Delebecque ? Fiche TD). En définitive, on notera simplement que si l'un des candidats à la compensation est titulaire de plusieurs obligations « compensables », l'article 1297 du Code civil ordonne de faire application des règles établies pour l'imputation des paiements par l'article 1256 (il faut alors se demander quelle dette le débiteur a le plus intérêt à voir s'éteindre) et que si les obligations réciproques n'étaient pas d'un même montant, l'extinction ne jouera qu'à concurrence du montant le plus faible ? ce qui fait d'ailleurs échec à la règle selon laquelle on ne peut imposer à son créancier un règlement partiel (si A est débiteur de 500 de B et B débiteur de 600 de A, l'extinction se fait à hauteur de 500 et B demeure donc encore débiteur à hauteur de 100). (...)
[...] FAGES ; JCP, éd. E note M. KEITA. Dès lors encore, on l'a dit, la compensation n'interrompt la prescription que si elle a été invoquée par celui qui s'en prévaut (Com février 1996 - Bull. Civ., IV, 42 ; D V. Brémont ; D Som Ph. Delebecque Fiche TD). D'autre part, la compensation est une exception personnelle. [...]
[...] Il y a donc double satisfaction et non, comme avec l'exception d'inexécution, double insatisfaction. Second exemple : imaginons que A soit créancier de B et que B soit à la fois débiteur de A et de C. Grâce à la compensation (à laquelle est attachée un certain automatisme), A sera certain de primer C quand bien même C serait un créancier privilégié (la compensation le met hors concours). Nous distinguerons deux types de compensation, selon que les dettes réciproques sont ou non connexes. [...]
[...] Deux points : conséquence (il y en a une seule ) et limites de l'automaticité. Premier point On tire de cette automaticité une conséquence tout à fait importante quant à la date de la compensation : celle-ci correspond bien au jour où les conditions de la compensation ont été réunies quand bien même, à cette époque, les parties ignoraient la compensation elle joue donc bien ici à leur insu Cette question de date est parfois tout à fait déterminante : elle sert à savoir par exemple si au jour de l'ouverture de la procédure collective, de la subrogation, de la signification de la cession de créance ou de la saisie-attribution, la compensation avait déjà joué. [...]
[...] Martin-Serf ; RTDCiv J. Mestre Fiche TD). Dans cette affaire, une société se trouvait débitrice du prix de travaux exécutés par un entrepreneur ; or, elle souhaitait que cette dette se compense avec la créance dont elle bénéficiait par ailleurs à l'égard de ce même entrepreneur, lequel s'était en effet rendu coupable d'un délit pénal dans l'exécution de ce contrat. Or, cette dernière créance étant dépourvue de tout fondement contractuel, la Cour de cassation a refusé de conclure à la connexité. [...]
[...] La dernière est en revanche plus importante : une créance alimentaire ne peut être l'objet d'une compensation. La règle n'étonne pas dans la mesure où la créance alimentaire est tout à fait impérieuse pour son titulaire ce qui explique d'ailleurs que la jurisprudence décide que si le débiteur ne peut l'imposer au créancier des aliments, celui-ci peut finalement décider de s'en prévaloir. Il faut enfin noter que cette exception a été étendue à toutes les créances insaisissables. L'interdiction peut ensuite être indirecte : Ainsi, le législateur peut suspendre, pendant un certain temps, la possibilité de procéder à tout paiement et donc, indirectement, à toute compensation. [...]
Bibliographie, normes APA
Citez le doc consultéLecture en ligne
et sans publicité !Contenu vérifié
par notre comité de lecture