Pour des motivations diverses, telles que le travail, la proximité des commodités, … de plus en plus d'habitants isolés se voient contraints de se rapprocher de la ville : c'est l'exode rural. Cet afflux migratoire implique une concentration de la population. Les citadins doivent donc faire face à des inconvénients de voisinage. En effet, un voisin écoute de la musique, reçoit des visiteurs, cuisine, … ces activités peuvent provoquer différents troubles tels que les bruits, les odeurs… mais ils peuvent également être visuels. C'est de ce dernier type de troubles dont se plaignait un couple propriétaire d'une maison face à laquelle s'est construit un centre commercial.
En l'espèce, un propriétaire a donné à bail son terrain, à une société qui a érigé un centre commercial. Il a également cédé un droit d'occupation définitif, à une société d'électricité qui y a installé un transformateur. Ce propriétaire, estimant qu'il était libre d'user comme il l'entendait de sa propriété, a procédé à l'arrachage et la plantation d'arbres. Un couple, habitant face à ce centre commercial, qui souhaitait préserver la tranquillité de son domicile, a, après expertise faite en référé, assigné le propriétaire du terrain voisin, ainsi que les sociétés locataires sur le fondement des troubles de voisinage. L'inconvénient invoqué résultait d'un trouble visuel. Les époux réclament alors, réparation de préjudice, par équivalence c'est-à-dire, par l'allocation de dommages et intérêt, mais ils demandent aussi une réparation en nature, caractérisée par la réalisation de travaux permettant de mettre fin aux troubles de voisinage.
Les juges du fond de première instance, puis les juges d'appel, font droit aux demandes des époux, en condamnant le propriétaire et les sociétés locataires, d'une part à payer aux demandeurs des dommages intérêts, et d'autre part, à procéder à la plantation de nouveaux arbres et de remettre en état les voies d'accès au centre commercial.
Le propriétaire du terrain intente alors un pourvoi en cassation, fondée sur la violation par la Cour d'appel, des articles 544 et 1382 du c.civ, mais aussi sur l'article 1er du protocole additionnel à la Convention européenne de droits de l'homme (CEDH). Le propriétaire affirmait alors que le droit de propriété prévu aux articles 544 du c.civ et 1er du protocole, lui conférait le droit d'user de son bien comme il l'entendait. Le pourvoi reproche également à la cour d'appel un défaut de réponse à conclusion, et par conséquent, il lui reproche la violation des articles 6 de la convention européenne, relatif à un procès équitable, ainsi que la violation des article 1382 du c.civ et L.2224-13 du code général des collectivités territoriales.
La question qui se pose est celle de compatibilité du principe jurisprudentiel de la réparation du trouble de voisinage avec la protection de la propriété par le droit commun et particulièrement avec 544 du c.civ, et aussi avec la protection européenne du droit au respect des biens. Ce dernier article, peut-il remettre en cause la théorie française des inconvénients anormaux du voisinage ? Enfin, la cour de cassation peut elle apprécier le trouble subit ainsi que la réparation qui en découle ?
La cour de cassation va rejeter la demande faite par le propriétaire du terrain, au motif que le droit de propriété protégé par l'article 544 du c.civ et par l'article 1er du protocole additionnel, est limité par le principe jurisprudentiel des troubles anormaux de voisinage. La cour de cassation précise également que cette limitation ne constitue pas une atteinte disproportionnée au droit protégé par la Convention.
En cas de raisonnement inverse de la cour de cassation, cela remettrai totalement en cause un principe posé par la jurisprudence, selon lequel « nul ne doit causer à autrui aucun trouble anormal du voisinage ». La Haute juridiction écarte les arguments de défaut de réponse à conclusion, précisant que les juges du fond disposent d'un pouvoir souverain pour l'appréciation du caractère anormal du trouble, ainsi que de la réparation en résultant.
La cour de cassation, fait une application claire et neutre, de la théorie des troubles anormaux de voisinage, qu'elle laisse à l'appréciation souveraine des juges du fond (I). Elle réaffirme aussi clairement, que la responsabilité pour trouble anormal de voisinage intervient comme limite au droit de propriété consacré par le code. De plus, pour la première fois elle affirme que cette restriction est compatible avec la protection européenne de la propriété (II).
[...] - En l'espèce les juges du fond ont affirmé que le couple propriétaire subissait un trouble d'ordre visuel. Mais il paraîtrait également que le trouble soit olfactif, car lié aux odeurs des déchets d'ordure. - Le propriétaire du terrain, où ce situe le centre commercial invoque l'article L2224-13 du code général des collectivités territoriales qui dispose que les communes ou les établissements publics de coopération intercommunale assurent, éventuellement en liaison avec les départements et les régions, l'élimination des déchets des ménages. [...]
[...] - L'article 544 du c.civ vise implicitement le droit d'user de la chose. L'usus permet au propriétaire d'user ou de ne pas user de son bien. - L'exercice de ces droits est soumis au critère de l'absoluité En effet, l'article précise que ces droits peuvent être exercés de la manière la plus absolue possible Le droit de propriété définie par 544 du c.civ est incomplet, car il faut rajouter les caractères : exclusif et perpétuel. Le caractère absolu détermine l'étendue des pouvoirs du propriétaire. [...]
[...] À cette occasion, la cour de Strasbourg à autoriser une atteinte aux droits des personnes, lorsque l'usage de ce droit portait atteinte, en l'espèce, à l'environnement, et qui privait une personne de la jouissance de son domicile. Le contrôle de proportionnalité est plus souple lorsqu'il s'agit d'une atteinte à l'usage du bien, que quand il s'agit d'une privation du droit de propriété. - Au regard des jurisprudences de la cour européenne, on peut supposer que celle-ci aurait statué dans le même sens que la Cour de cassation. [...]
[...] (locataires, occupants, entrepreneurs, maîtres d'ouvrage) - De plus, l'application de l'article 1382 du c.civ était paradoxale du fait que cet article s'appuie sur la preuve d'une faute, et que dans les cas de troubles anormaux de voisinage la preuve d'une faute n'est pas nécessaire. - Afin d'engager la responsabilité, le trouble doit s'avérer anormal. (trouble dans la jouissance de son bien, dépréciation de la valeur du bien). - Les articles 544 et 1382 du c.civ sont parfois encore évoqués lors d'un pourvoi en cassation. C'est le cas en l'espèce, dans l'arrêt du 23 octobre 2003 de la deuxième chambre civile. [...]
[...] Ainsi, les mots nul et autrui conservent un caractère général, et s'appliquent aussi bien à des propriétaires, que des locataires, ou encore de simples occupants. B : Une appréciation laissée aux pouvoirs souverains des juges du fond 1 : Une appréciation souveraine du caractère anormal du trouble. - La Cour de cassation n'opère aucun contrôle de l'atteinte au droit de propriété, estimant que ce pouvoir d'appréciation correspond à une prérogative des juges du fond. Cette affirmation est faite en réponse au deuxième, troisième et quatrième moyens du pourvoi. [...]
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